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Christian's Encyclopedia : J






J

’initiale J n’est apparue que trés tard. Ce son était étranger à l’araméen, à l’hébreu, au grec et au latin. L’anglais ne distinguait même pas le J du I avant la moitié du XVIIe siècle. Par conséquent, la Bible du roi Jacques de 1611 se réfère à Jésus en tant que «Iesus» et à son père en tant que «Ioseph». L’orthographe actuelle vient probablement de Suisse, où le J ressemble au Y anglais. Quand les protestants anglais ont fui la Suisse pendant le règne de Marie d’Angleterre, ils écrivirent une version de la Bible de Genève en utilisant l’orthographe suisse. Les traducteurs en Angleterre utilisèrent l’orthographe de Genève de 1769

JAAZAN JA

1 ° fils d'un Jérémie inconnu (695 a.C.),et l'un des chefs de la maison des Réchabites, Jér. 35, 3. Jérémie le prophète le fit appeler, lui et les siens, et voulut les contraindre à boire du vin contre les ordonnances de leur aïeul Jéhonadab ; ils refusèrent tous, et Jérémie, qui l'avait bien prévu, se servit de ce fait pour reprocher aux Juifs leur rébellion contre la loi de Dieu, tandis que la voix d'un homme était encore obéie dans la famille de Réchab.

2° Fils de Saphan, Ez. 8,11. ( 594 av. G.). A la tête de soixante et dix des anciens d'Israël, il se tenait dans une des salles du parvis du temple, ornée de toutessortes de figures de reptiles et de bêtes tout à l'entour, et il leur offrait de l'encens. Ezé-chiel était en Caldèe, quand l'Eternel lui montra en vision toutes ces abominations et beaucoup d'autres qui se commettaient à Jérusalem ; il annonça alors aux Juifs qui étaient avec lui les châtiments qui devaient fondre sur ces impies idolâtres; mais on n'ajouta pas foi à ses paroles.

3° Jaazanja, fds de Hazur, inconnu, Ez. 11,1. On suppose qu'il était un des membres du sénat sous le règne de Sédécias ; sa parole perfide et pleine d'iniquité séduisait le peuple par de mauvais conseils.

JABAL, descendant de Caïn par Lémec et Hada, Gen. 4,20., « fut père de ceux qui habitent dans les tentes, et des pasteurs. » La vie nomade est ainsi séparée de la vie pastorale. On peut dire que l'un et l'autre de ces genres de vie existaient déjà de fait avant lui. car Abel était berger, et les patriarches étaient nomades par cela même qu'ils n'étaient pas organisés en société, qu'il n'y avait pas de ville, et que chacun se transportait où il voulait avec le modeste bien dont il était possesseur. La gloire de Ja-bal fut probablement d'avoir régularisé la vie nomade en apprenant aux hommes à se servir de tentes, à les dresser, et à les plier au besoin pour se remettre en course, Gen. 4, 20.

JABBOK. Ce torrent, maintenant Zer-ka, se forme de ruisseaux qui viennent de l'est et du nord, et d'un ruisseau qui arrive du sud et coule près de Rabbath-Hammon. La source principale descend de la partie de la haute plaine qui touche au grand désert. Le Jabbok coule vers l'ouest, dans une vallée assez large dont le fond se maintient à une certaine élévation ; plus bas il rencontre comme une fente profonde dans le plateau, et se fraye* sa route dans une gorge étroite entre des parois de rochers de 300 pieds de hauteur, déchirure singulière qu'on aperçoit seulement en arrivant sur ses bords, du haut desquels on entend bouillonner dans l'abîme les eaux de la rivière (Rouge-mont). L'endroit où le Jabbok sort de ce défilé et du plateau est peut-être le gué de Péniel, Gen. 32, 22. sq., que d'autres voyageurs croient avoir retrouvé plus à l'est sur le plateau. Le Jabbok se jette dans le Jourdain, à 6 kilom. de l'endroit où il sort des montagnes, et à peu près à égale distance du lac de Tibériade et de la mer Morte. La partie supérieure de son cours, appelée aussi le ruisseau de Rabbath-Hammon, était la frontière qui séparait les Hammonites à l'est, des A-morrhéens, et plus tard de Gad à l'ouest. La partie inférieure était la limite nord des Amorrhéens sous leur roi Sihon, et la limite sud du royaume de Basan ; plus tard elle sépara Gad de Manassé, Nomb. 21,24. Deu 2, 37. 3,16. Jos. 12, 2. Jug. 11, 13. 22.

JABÈS, ville de la demi-tribu trans-jourdaine de Manassé, ordinairement appelée Jabès de Galaad. Elle était située au-dessus d'une vallée ou d'un vvady qui porte encore son nom, sur le sommet d'une montagne d'où elle avait vue sur les collines de Basan, et qni fait partie de la chaîne la plus septentrionale des monts de Galaad. Elle fut saccagée par les Israélites pour avoir refusé de prendre part à la guerre d'extermination contre Benjamin, Jug. 21, 8. 10. Plus tard, Nahas, roi de Hammon, l'ayant réduite à la dernière extrémité, elle allait se rendre aux conditions les plus dures, quand Saùl vint et la délivra, 1 Sam. 11. Les habitants conservèrent toujours la plus vive reconnaissance pour leur libérateur, et pour sa maison; et quand Saiil et ses fils eurent été tués en Guilboah, dans la bataille contre les Philistins, ceux de Jabès vinrent de nuit, enlevèrent les corps qui avaient été pendus aux murailles de Bethsan, et les ensevelirent honorablement sous un chêne, près de leur ville, 1 Sam. 31, 11. 12. — Eusèbe la met à 6 milles de Pella, vers Gérasa.

JABLN, I ° roi de Hatsor à l'époque de Jo-sué, Jos.11,1. (1450 av. C). C'était un des rois les plus puissants de Canaan ; il demeurait au-dessus du lac de Séméchon, dans la Galilée, et dominait presque tout le nord du pays. Il résolut d'écraser Jo-sué, et se ligua avec quelques rois voi-sinsses tributaires, tellementqu'ilsétaient un grand peuple comme le sable qui est au bord de la mer ; mais ils ne se réunirent que pour être détruits plus facilement, et Josué les chargea avec tant de vigueur que personne n'échappa, ni hommes, ni chevaux ; la ville même fut brûlée et Jabin mis à mort. — 2° Hatsor re-construite, eut, cent soixante-cinq ans après, 1285 av. C., un autre roi du même nom, peut-être descendant du premier. Ce Jabin était devenu si puissant, que l'Ecriture lui donne le nom de roi de Canaan, Jug. 4, 2. Se rappelant les vieilles injures de son peuple, et désireux de les venger, il avait accablé Israël de toutes ses forces, et entretenait une grande armée, et 900 chariots armés de faux, dont il avait confié le gouvernement à son général en chef Siséra. Cette oppression, qui fut la troisième servitude, dura vingt années, et se termina par les victoires et le cantique de Débora. — v. Ps. 83, 10.

JABNÉ, ville des Philistins, située entre Joppe et Asdod; Hozias s'en empara, 2 Chr. 26, 6. Plus tard, elle fut appelée Jamnie, et Josèphe dit qu'elle était très populeuse, habitée par beaucoup de Juifs mêlés avec quelques païens ; elle possédait un bon port. Pompée la prit sur les Juifs et la donna à la Syrie. Elle était à 240 stades de Jérusalem et à 12 milles de Diospolis. Après la ruine de Jérusalem, elle fut pendant quelque temps le siège du sanhédrin et d'une école juive assez distinguée.

JACOB, Gen. 25, 26. sq. (1836 av. C), fils d'Isaac et de Rébecca, plus aimé de sa mère à cause de son naturel paisible et facile à mener, le troisième des grands patriarches théocratiques, Ex. 19, 3. Ps. 22, 24. 105, 6. Es. 45, 19. Ez. 20, 5. Il lutta par la ruse contre l'infériorité de sa naissance, et réussit à se procurer le droit d'aînesse pour le prix d'un plat de lentilles ; à ce droit d'aînesse il fallait joindre la bénédiction paternelle, sans laquelle il restait stérile, et Jacob, par un artifice honteux et grossier, vint, à l'âge de soixante-dix-sept ans, se jouer d'un père aveugle pour lui soutirer cette bénédiction que le vieillard se proposait de donner à l'aîné, que Dieu avait dessein de transférer sur la tête du second, et qu'il eût effectivement transférée sans le concours de moyens déshonnêtes, comme il le fit bien voir plus tard à Jacob lui-même, en inclinant son cœur à bénir de la main droite Ephraïm plutôt que Manassé. La ruse réussit, mais Jacob dut recueillir les fruits de son péché avant de jouir des bénédictions que Dieu lui avait assurées : il lui fallut quitter son père et sa mère pour fuir le ressentiment d'un frère justement irrité, et il partit pour la Mésopotamie, où une épouse lui était réservée dans la maison de Laban, frère de sa mère. Il avait alors soixante-dix-sept ans, chiffre qui surprend d'abord, mais qui se justifie par les considérations suivantes : Joseph avait trente ans quand il fut présenté à Pharaon, Gen. 41, 46.; lorsque son père et ses frères vinrent le rejoindre, c'est-à-dire en la deuxième année de la famine, il en avait par conséquent trente-neuf (45, 6.). A celte époque Jacob en a cent trente (47, 9.); Joseph est donc né dans la quatre-vingt-onzième année de Jacob. Or Joseph est né vers la fin des quatorze premières années que Jacob passa chez Laban (30, 22. 2o.), après avoir quitté la maison d'Isaac, ce qui donne l'âge de soixante-dix-sept ans pour l'époque de son entrée en Mésopotamie.

Ce voyage fut pour Jacob la fin de l'enfance et le commencement de la vie : sa mère n'était plus là pour le mener, il devait se sentir à la fois libre et responsable, et le remords dut se faire sentira son cœur. Sans doute il emportait la bénédiction de son père, mais Dieu lui accorderait-il la sienne ? Accablé de fatigue et peut-être aussi de pensées décourageantes, il s'endormit un soir près deLuz, et Dieu qui avait fait de lui un vase d'élection, voulut le rassurer, et lui envoya cette grande et belle vision de l'échelle qui, partant de la terre pour se perdre dans les cieux, servait d'intermédiaire entre l'homme et l'Eternel par le moyen des anges, qui montaient et qui descen-daient, saints et brillants messagers du Dieu d'Abraham, d'Israël et de Jacob. Saintement effrayé, le voyageur s'écria : « C'est ici la maison de Dieu, c'est ici la porte des cieux. » 11 oignit d'huile la pierre qui lui avait servi de chevet, et changea le nom de Luz en celui de Béthel, qui signifie maison de Dieu. Cependant, il ne comprit pas toute la grandeur des promesses qui lui étaient faites, et il se borna à quelques vœux pour l'heureux achèvement de son voyage et pour son heureux retour auprès d'Isaac. Bientôt il arrive en Mésopotamie, où Rachel accueille avec joie son cousin presque octogénaire. Le cupide Laban met à de rudes épreuves la patience et l'amour de Ja-cob; après sept ans de service il lui donne Léa, sa fille aînée, au lieu de Rachel qu'il aimait et qu'il avait demandée. Jacob se plaint de cette substitution, et obtient qu'on lui accorde aussi Rachel, pour laquelle il offre de servir sept nouvelles années. Les deux épouses rivales divisent la maison du patriarche ; Rachel est la préférée, mais Léa est féconde et s'élève au-dessus de sa sœur qui ne l'est pas, Gen. 30. Pour complaire à celle qu'il aime, Jacob donne le titre de concubine à Bilha, la servante de Rachel, et Léa lui demande la même faveur pour Zilpa, sa servante. La famille de Jacob s'accroît ainsi considérablement, mais il n'est encore que le serviteur de son oncle et beau-père; il exprime le désir de retourner auprès de sa famille et demande à Laban, avec son congé, la récompense de ses travaux. Ces deux hommes rivalisent de ruse pour se tromper l'un l'autre, et Jacob est le plus fort; il demande à Laban de lui donner toutes les bêtes picotées de son troupeau et s'engage à le servir quelques années encore. Laban accepte et consent; mais d'abord il éloigne du troupeau, pour les confier à ses fils, toutes les bêtes déjà picotées, afin de diminuer d'autant la chance qu'il en naisse de nouvelles. Jacob, de son côté, s'éloigne avec les chèvres et les brebis blanches. Il devait savoir que Dieu ferait tourner ce contrat en sa faveur (31, <l I.); il voulut,coin-$ me toujours, forcer la fortune et accomplir par des ruses la volonté divine; il plaça donc devant les auges et les abreuvoirs de jeunes branches dont il avait pelé et mis à blanc quelques parties, de sorte que les troupeaux ne pouvaient boire sans arrêter les yeux sur ces diverses couleurs et sans en être frappés. Jacob pensait que de cette manière les brebis, quoique blanches, donneraient des agneaux de couleur; et le résultat ré-pondit à ses espérances, soit que Dieu intervint directement, soit aussi que le stratagème employé par Jacob fût réellement efficace, ainsi que paraissent l'établir certains faits. En tout cas, Jacob s'enrichit en fort peu d'années, et ses grands biens ne tardèrent pas à exciter la jalousie de Laban et de ses fils. Jacob s'en aperçut, et averti par une vision divine, il résolut de s'enfuir sans délai. Ses femmes sont d'accord avec lui. Il part donc « à la dérobée », emmenant sa famille, ses serviteurs et ses troupeaux, et après avoir traversé les gués de l'Euphrateet les campagnes de la Syrie, il arrive sans accident sur les limites de la terre promise, au pied des montagnes de Galaad; mais là il est rejoint par Laban qui s'est mis à sa poursuite, et il doit lui expliquer les motifs de sa fuite secrète et précipitée. « Je craignais, dit-il, que tu ne me ravisses tes filles. » Mais Laban réclame encore de petits dieux qu'il dit lui avoir été enlevés, et comme ils ne se retrouvent pas, Jacob lui reproche avec beaucoup d'amertume et d'éloquence toutes les injustices de sa vie passée et ses soupçons présents que rien ne semble justifier; car Jacob ignorait que Rachel eût dérobé ces dieux. Après de longues contestations dans lesquelles l'avantage reste à Jacob, les deux parents qui vont se séparer pour toujours se réconcilient; une alliance est conclue, un monument s'élève, qui prend le nom de Gal-Hed, un sacrifice est offert, et un repas donné par Jacob achève de cimenter la paix et l'oubli du passé. Laban s'en retourne et Jacob s'apprête à pénétrer dans ce pays où il espère de retrouver son père, où il craint de rencontrer le frère qu'il a dépouillé. Comme il est agité de diverses pensées, de souvenirs pénibles, d'incertitudes et d'angoisses, une première vision le rassure, les anges de Dieu viennent au-devant de lui comme pour le saluer, et il nomme ce lieu, en souvenir de cet événement, Mahanajim, c'est-à-dire le camp de Dieu. Mais il apprend l'approche d'Esaû, suivi de 400 hommes; méfiant et rancunier, il suppose au généreux Esaii plus de rancune que celui-ci n'est capable d'en conserver; il prend ses précautions ; il partage ses troupeaux en deux bandes qu'il envoie en deux directions différentes, afin que si l'une pérît, l'autre puisse être sauvée; puis, pour essayer de les mettre à l'abri l'une et l'au-tre, il met à part pour son frère un présent considérable de chèvres, de brebis, de chameaux, de vaches et d'ànesses, et confie ces cinq troupeaux à cinq de ses serviteurs qu'il espace de manière qu'E-saù ne les rencontre que successivement, et soit peu à peu disposé d'une manière favorable à lui pardonner. Cette combinaison étant achevée, Jacob envoie au delà du Jabbok tout ce qui l'accompagnait, famille et troupeaux, et il reste seul sur la rive de l'exil, pour faire peut-être le compte de ses voies, et réfléchir aux diverses dispensations providentielles dont il avait été l'objet pendant une vie de près d'un siècle (98 ans). Sa vie avait été une lutte continuelle contre Dieu et les hommes ; il avait lutté dès le sein de sa mère pour supplanter son frère, et il avait fini par être le maître. Pendant qu'il était là, plongé dans ces pensées dont ceux qui ont quelque peu vécu sont bien à même de comprendre la nature et peut-être la tristesse, un homme lutta avec lui toute la nuit, jusqu'au lever du soleil, lutte miraculeuse, mystérieuse, unique. On voudrait pouvoir croire à une lutte toute morale et spirituelle, tant l'idée d'un combat corps à corps d'un homme avec Dieu répugne à notre intelligence; mais le récit de l'historien sacré est si exact, si complet, si précis, qu'on est obligé de reconnaître qu'il y a eu lutte matérielle et physique entre ces deux personnes, quoiqu'il s'y joignît aussi en même temps une lutte morale qui devait aboutir à un triomphe plus élevé. La hanche démise fut pour Jacob une défaite et une humiliation; il avait été vaincu et devait se le rappeler à toujours : mais ce trophée de défaite était en même temps pour lui un trophée de victoire, et lui rappelait que ce qu'il avait recherché dans la lutte il l'avait obtenu, la bénédiction de son adversaire. Il pleura et il demanda grâce, dit Osée 12, 5., et il fut le plus fort en luttant avec Dieu, car cet adversaire était en effet l'Eternel lui-même. Jacob reçut alors le nom d'Israël qui consacrait son triomphe, et il nomma ce lieu Péniel, parce que, dit-il, j'ai vu Dieu face à face. Il aurait voulu connaître le nom de son adversaire, mais ce sont là de ces choses qui n'ont pas de nom au terrestre séjour. L'homme ne peut nommer que les êtres qui ont quelque rapport avec lui, qui sont finis en gloire, en durée, en étendue. Ce moyen de reconnaître ce qui appartient à la terre et qui fut donné à l'homme dès la création ne peut s'appliquer au}; êtres infinis ; le Dieu de Moïse est celui qui est, le Dieu de Manoah est l'admirable, mais il ne se nomme pas. L'idolâtrie d'ailleurs aime à rendre son culte à ce qui a un nom, et Jéhovah ne voulait pas être assimilé à Bahal ; le paganisme seul a des noms pour ses milliers de dieux et de saints.

Au matin Jacob passe le gué et rejoint sa famille; mais déjà Esaû s'approche, et Jacob, par un surcroît de précautions, divise les enfants en trois bandes, en tète les deux servantes avec leurs enfants, puis Léa avec les siens, et enfin Rachel avec Joseph. Mais toutes ces mesures stratégiques devaient être inutiles; la prudence n'est bonne que contre des adversaires, et Esaii s'avançait en frère, en ami ; tout était oublié, excepté l'affection fraternelle, et dès qu'il voit Jacob il se jette à son cou et l'embrasse en fondant en larmes, pendant que Jacob voulait se prosterner devant lui. Esaii fait la connaissance de ses belles-sœurs et de ses neveux, et n'accepte que sur les instantes prières de Jacob les présents que celui-ci lui a destinés; puis les deux frères se séparent après que Jacob eut promis à Esaii de l'aller voir dans ses montagnes de Séhir, promesse sur l'exécution delà-quelle nous ne voyons rien dans l'Ecriture, quoiqu'il soit fort possible que Jacob ait fait ce voyage, soit pendant son séjour à Succoth même, soit pendant son séjour à Sichem, soit plus tard encore ; peut-être aussi cette promesse n'était-elle qu'une ruse de plus pour se débarrasser plus facilement et plus vite de la présence d'un frère qui le gênait et le troublait.

Après s'être d'abord établi pendant quelque temps à Succoth sur la rive orientale du Jourdain, Jacob passe à Si-chem; puis, après l'enlèvement de Dina et la vengeance de Siméon et de Lévi, il quitte cette contrée et se rend à Béthel, ayant enseveli d'abord les idoles hévien-nes dont le culte s'était introduit dans sa famille ; il s'établit ensuite successivement à Epbrat, à Migdal-Héder et enfin à Hébron dans les plaines de Mamré, où il retrouve son père, le vieillard Isaac qui ne tarde pas à rendre le dernier soupir entre les bras de ses deux fils réunis pour l'accompagner au sépulcre. Mais les souffrances du triste pèlerinage de Jacob ne sont pas à leur terme; les chagrins qu'il a causés à son père, ses fils doivent les lui rendre avec usure. Le vieillard aime Joseph l'enfant de Rachel, et ses frères jaloux le font disparaître et remettent à leur père une robe magnifique, teinte de sang, que Jacob ne peut hésiter à reconnaître pour celle qu'il a donnée à Joseph. Jacob déchire ses vêtements, met un sac sur ses reins et repousse toute consolation : Certainement, dit-il, je descendrai en menant deuil au sépulcre vers mon fils! C'est ainsi qu'il le pleurait, c'est ainsi que s'écoulèrent vingt années. Benjamin avait succédé à Joseph sans le remplacer dans le cœur de Jacob, et le dernier enfant de Rachel rappelait à Jacob tout ensemble et Rachel et Joseph, deux objets qu'il avait tant aimés. Les sept années de famine se firent sentir en Canaan comme en Egypte, et Jacob envoya ses dix fils dans ce dernier pays pour y acheter du blé, mais il retint auprès de lui Benjamin. Des dix fils qui étaient partis il n'en revint que neuf: Siméon avait été retenu prisonnier par celui qui dominait en Egypte, et ce dur gouverneur qur avait maltraité les dix frères les prenant pour des espions, leur avait défendu de reparaître en sa présence sans amener avec eux le dernier de la famille, Benjamin. Jacob écoule avec étonnement le rapport de ses fils, et l'étonnement de tous redouble quand, à l'ouverture des sacs, ils retrouvent l'argent qu'ils avaient cependant déposé en mains propres lorsqu'ils avaient acheté le blé. Bientôt un second voyage devint nécessaire, mais Jacob refusait d'y consentir ; car, disait-il, vous m'avez privé d'enfants : Joseph n'est plus, et Siméon n'est plus, et vous prendriez Benjamin! Toutes ces choses sont contre moi ! Il ignorait encore que toutes choses contribuent ensemble au bien de ceux qui aiment Dieu, mais il l'apprit bientôt par une douce expérience. Contraint de laisser partir Benjamin, il s'écriait avec résignation : « S'il faut que je sois privé de ces deux fils, que j'en sois privé! » et peu de temps après, non seulement Siméon était de retour, non seulement Benjamin lui était rendu, mais il pour y assister.

Le nom de Jacob se retrouve Ez. 28, ta. 37, 23. Os. 12, 13. Mal. I, 2. Rom. 9, 13. Hébr. 11, 9. 21. et ailleurs.

Ce patriarche qui vécut quinze ans avec Abraham, se présente avec un caractère bien différent de celui de son père et de son aïeul; on peut dire qu'il est sans grandeur naturelle, à la fois ardent et efféminé, faible et passionné, rusé, trompeur, peu scrupuleux sur les moyens; il ne grandit que par de rudes expériences et par l'adversité : mais ces épreuves lui sont utiles, il profite à une dure école, et mûrit forcément. Les vingt années qu'il passe à pleurer Joseph abrègent sa vie et sont à la fois pour lui la dernière et la plus douloureuse des épreuves; toutes ses souffrances se montrent dans cette parole qu'il adresse au roi d'Egypte :”Mes jours n'ont pas atteint les jours des années de la vie de mes pères au temps de leurs pèlerinages. » Sa noble vieillesse fait oublier les péchés de sa jeunesse et de sa maturité, et Jacob est un exemple de plus qui prouve que Dieu choisit librement ceux dont il veut faire des vases à honneur, et qu'il les façonne d'entre ceux-là même qui sont le moins honorables. Jacob est le symbole de l'espérance (Schroeder) ; il a passé sa vie à attendre plus qu'à jouir, à espérer plus qu'à posséder.

La Fontaine de Jacob dont il est parlé Jean 4, 6., et près de laquelle eut lieu l'entretien de Christ avec la Samaritaine, était située près de Sichem sur la route qui conduit à Jérusalem: elle tirait son nom du patriarche qui l'avait, dit-on, fait creuser. Quelques voyageurs disent l'avoir retrouvée à quelque distance de Na-plouse, dans un creux de rocher profond de trente-cinq mètres, mais contenant peu d'eau, situé dans un petit vallon qui court du nord au sud et qui est fort riche en sources; d'autres pensent que la fontaine de Jacob est une source située dans la ville même de Sichem et qui porte encore le nom du patriarche.

2° Jacob, père de Joseph le charpen-tier, Mat 1, 16., inconnu.

JACQUES. Outre le frère de Jésus, I Mat 13, ou.,le Nouveau Testament nous entendit de la houche de ses fils ces paroles qui étaient la résurrection de sa vieillesse : « Joseph vit ! et même il commande sur tout le pays d'Egypte. » Jacob alors part avec toute sa famille, Ex. 4,4. 1 Sam. 12, 8. Act 7,14., et Dieu, sans la permission de qui il n'eût pu sortir, l'y autorise par une vision à Béer-Sébah, lui réitérant les promesses qu'il lui a déjà faites pour sa postérité, et lui annonçant qu'après s'être beaucoup accrus en Egypte, ses descendants en sortiraient pour venir habiter de nouveau Canaan. Bientôt il arrive à Goscen, Joseph accourt à sa rencontre : le père et le fds se jettent dans les bras l'un de l'autre en fondant en larmes, et Jacob attend la mort avec joie; car, dit-il, j'ai vu ton visage, et que tu vis encore. (1706 av. C.) Présenté à Pharaon, Jacob parle comme un sage qui n'est plus de ce monde, il bénit le roi qui l'accueillit avec honneur comme le vénérable père de son premier ministre, et il résume sa vie en ces mots : Les jours de mon pèlerinage ont été courts et mauvais. Dès lors, il vécut encore quelques années en Goscen, heureux et fier de son Joseph qu'il avait retrouvé; puis il s'éteignit doucement à l'Age de cent quarante-sept ans (1689 av. C), ayant recommandé à Joseph et à ses fils de ne pas laisser reposer ses os sur la terre étrangère, mais de les transporter auprès de ceux de ses pères dans la caverne de Macpéla. Peu de temps avant sa mort, il avait adopté comme siens les enfants de Joseph, léguant à celui-ci, comme au plus puissant de la famille et au plus propre à le conserver, le territoire de Si-chem qu'il avait acheté des Amorrhéens (Héviens), et qu'il peut dire avoir conquis par son arc, en pensant à la violence dont deux de ses tils ont usé à l'égard des Sichémites. Les bénédictions prophétiques qu'il prononça sur ses enfants sont pleines de grâce, de force et de profondeur; s'il est sévère, c'est qu'il ne parle plus comme père, mais comme prophète ; il déclare ce qui doit arriver. Joseph conduisit lui-même en Canaan le corps de son père, qui fut enseveli avec grande pompe et au milieu d'un concours immense de personnes venues d'Egypte fait connaître, au sein de l'Eglise apostolique, trois hommes de ce nom, savoir : Jacques frère de Jean et fils de Zébédée, bientôt décapité, Act 12,2.; Jacques, fils d'Alphée, sur la vie duquel nous n'avons aucun détail ; et Jacques, frère du Seigneur, Gai. 1,19., le conducteur de l'Eglise de Jérusalem, et le chef de la portion encore judaïsante de cette Eglise. Plusieurs théologiens regardent ces deux derniers comme identiques, d'autres les distinguent (Sardinoux) ; d'autres regardent le Jacques frère du Seigneur, comme son cousin, et par conséquent distinct encore du Jacques de Mat 13, 53. Sans entrer dans un examen approfondi de cette question, que j'ai fini par trouver insoluble à force de l'avoir examinée, il convient de dire au moins quelles sont les raisons qui paraissent établir plutôt leur identité. Saint Luc, dans son Evangile et dans les Actes, distingue toujours Jacques fils d'Alphée, de Jacques fils de Zébédée, jusqu'à la mort de ce dernier ; mais depuis lors, Act 12, 2., il ne se sert plus que de la simple dénomination de Jacques, v. n. 11 paraît donc que depuis la mort du fils de Zébédée il ne resta plus dans l'Eglise qu'un seul Jacques assez distingué, et il est peu probable que ce seul Jacques ait élé le troisième, le frère du Seigneur, car on ne saurait alors ce que serait devenu Jacques fds d'Alphée ; on se verrait obligé de construire un édifice d'hypothèses comme De Wette qui fait mourir le fils d'Alphée subitement, et sans que les auteurs sacrés en disent rien, et qui élève rapidement au plus haut degré d'estime dans l'Eglise apostolique, le frère du Seigneur jusqu”alors inconnu. Saint Luc n'est pas le seul non plus qui, depuis la mort du fils de Zébédée, semble ne reconnaître qu'un seul Jacques dans l'Eglise, v. 1 Cor. 15, 7. Gai. 2, 9. 12. Jud. 1. Le passage Gai. 1, 19., semble contredire cette manière de voir, et établir l'existence d'un troisième Jacques, différent du fils d'Alphée et de celui de Zébédée, d'un Jacques frère germain de Jésus. Mais ce seul passage ne saurait suffire, et il s'explique assez facilement sans cela. Paul parle d'un temps où le fils de Zébédée était encore en vie ; en nommant Jacques il était donc obligé de dire duquel il voulait parler, et il donne au fils d'Alphée le nom de frère du Seigneur, parce que sa relation avec Jésus était alors une marque plus caractéristique et plus connue, d'autant plus qu'Alphée était un homme obscur (c'est pour la même raison que le fils de Zébédée est quelquefois appelé le frère de Jean). Reste à savoir pourquoi Jacques est appelé le frère du Seigneur s'il n'était que son cousin ; et ici la difficulté est réelle ; car, quoiqu'on puisse dire et même prouver que le mot frère s'employait quelquefois pour désigner une parenté collatérale plus éloignée (t\ Xen. Cyrop. 1,5. § 4. Tit. Liv. 3b, 10. Cicer. ad Attic. 1, 5. Gen. 13, 8. 29, 15.), cependant la chose n'était pas passée en loi, ni même en usage, et dans le cas particulier, comme il est constant que Jésus avait non seulement des cousins, mais des frères de mère, cf. Mat 13,55., Jacques était peut-être l'un d'entre eux, et il serait possible que celui qui est mentionné, Gai. 1, 19., comme une des colonnes de l'Eglise, et qui par conséquent se retrouve partout comme seul Jacques depuis la mort du fils de Zébédée, fût le même que Mat 13, ob.; la chose est possible en elle-même, mais elle n'est que cela, et il faudrait prouver qu'elle est sûre, il faudrait lever l'invraisemblance qu'il y a dans l'apparition subite d'un nouveau Jacques, accompagnée de la disparition également subite du fils d'Alphée. Ajoutons que dans ce passage, Gai. 1, 19. cf. Act 9, 27., Jacques est appelé apôtre, et que nous ne voyons nulle part qu'un Jacques, frère de Jésus, ait été élevé à cette dignité, jusqu'à être mis au même rang que Pierre. Nous nous en tenons donc à l'opinion généralement reçue qui pense qu'il n'y a eu que deux Jacques, en renvoyant pour un plus ample examen de la question au Comment, de Winersur Gai. 1, 19. à Néander, Apost. Kirche, H, 421., aux Beitrœge deSchnec-kenburger, et à un article de Steiger dans l'Evangelischse K. Z. de Hengstenberg, 1834, n°95 et suiv.

1° Jacques, fils de Zébédée et de Salo-mé, surnommé le Majeur, frère de Jean l'évangéliste, racommodait ses filets sur 30

les bords du lac de Génésareth, lorsqu'il entendit l'appel de Jésus, auquel il obéit sans hésitation, Mat 4, 24. 40, 2. Marc 1, 49. 3, 17. Luc 5, 9. 6, 44. Il fut toujours un des trois plus intimes confidents du Seigneur, malgré l'orgueil et l'intolérance qui signalèrent par deux fois ses premiers pas dans la carrière évangéli-que, Mat 20, 20. Luc 9, 54. On le trouve auprès de son maître à la guérison de la belle-mère de Pierre, dans la maison de Jaïrus, sur le mont Thabor, sur la colline où Jésus annonce la ruine de Jérusalem et les signes des derniers temps, en Gethsémané, lors de la réintégration de saint Pierre, et enfin à Jérusalem après l'ascension, Marc 1, 29. 5, 37. 9, 2. 40, 35. 4 3, 3.4 4, 33. Jean 21, 2. Act 4,13. Décapité par l'ordre d'Hérode Agrippa (44 ans ap. C), il mourut à Jérusalem, après avoir porté la prédication de l'Evangile, si l'on en croit une tradition peu probable, en Espagne et jusqu'en Angleterre. — Jésus l'avait surnommé Boaner-gès, cf.

2° Jacques le Mineur, fils d'Alphée et de Marie sœur de la mère de Jésus, succéda au précédent comme conducteur de l'Eglise de Jérusalem, Mat 10, 3. 13, 55. 27, 56. Les évangélistes ne donnent sur sa personne et sur son caractère aucun-détail particulier. Ses rapports de parenté avec Jésus, ses convictions religieuses qui conservèrent autant que possible les formes du judaïsme, qui établirent le christianisme sur des bases qui n'étaient pas hostiles ou directement opposées au précédent ordre de choses, enfin son caractère personnel et ses principes ascétiques, tout contribua à le rendre propre au rang élevé qu'il occupait dans Jérusalem et dans l'Église. Le chapitre 15 des Actes est celui qui nous fait le mieux connaître et comprendre son influence et son autorité; cf. aussi 21, 18., et la manière honorable dont en parle saint Paul, Gai. 1,19. 2,9. 4 2. Il parait avoir été un homme non seulement ferme dans ta foi, mais aussi irrépréhensible dans sa conduite à l'égard des Juifs incrédules. Selon Hégésippe, sa vie était celle d'un vrai ÎNa-zaréen ; il jouissait du privilège d'entrer à toute heure dans le temple, et il y passa beaucoup de temps en prières ferventes ; on l'avait surnommé le Juste, et le rempart de son peuple. Il vécut jusqu'à la ruine de la nation et de l'Eglise juive. Peu d'années avant que la guerre fatale éclatât, le souverain sacrificateur Ananus, sadducéen, profita de l'intervalle qui s'écoula entre la mort du gouverneur Festus et l'arrivée de son successeur Albinus, pour faire lapider l'apôtre. La majorité du peuple protesta contre cet acte de violence; Albinus étant arrivé écrivit à Ananus une lettre de reproches et de menaces, et Agrippa le destitua de son pontificat. D'après Hégésippe, les pharisiens auraient aussi pris part à la mort du j uste ; il raconte qu'on le précipita du haut du temple, que Jacques n'ayant pas été tué par la chute, on se mit à le lapider, et que pendant qu'il priait pour ses persécuteurs, un tanneur lui asséna sur la tête un coup qui mit fin à ses jours et à ses souffrances. C'était vers l'an 64. Eusèbe raconte sa mort d'une manière un peu différente.— Beaucoup de Juifs, après le siège et la destruction de Jérusalem, attribuèrent cette catastrophe à la malédiction divine que le peuple avait attirée sur lui par le supplice de cet homme si saint et si respecté.

C'est probablement à ce Jacques, fils d'Alphée, que se rapporte le passage 1 Cor. 15, 7. où il est fait allusion à un fait que les évangélistes ne nous ont pas conservé.

3° Jacques, un des frères de Jésus, Mat 13, 55., complètement inconnu; il s'est joint à l'Eglise après l'Ascension.

Epître de saint Jacques. Elle fut probablement écrite de Jérusalem, par Jacques fils d'Alphée, vers l'année 61 ; elle est adressée à des judéo-chrétiens qui pouvaient être tentés de se laisser tomber dans le relâchement et dans le mépris des œuvre's et de la loi : on n'y trouve pas un plan proprement dit, mais une suite d'exhortations telles que les circonstances les demandaient, et telles que l'Esprit les lui inspirait. Le chapitre 1er est dirigé contre la faiblesse de fei, l'irrésolution en doctrine, la pusillanimité ; depuis le verset 19 l'apôtre relève la nécessité d'une vie chrétienne.— Chapitres. Après s'être élevé contre les privilèges que le cœur humain est trop facilement porté a accorder aux riches, Jacques reprend ce qu'il a déjà dit sur la nécessité de montrer sa foi par ses œuvres. — Chapitre 3. Exhortations relatives à la tempérance de la langue. — Chapitre 4. Contre la frivolité, la légèreté, l'esprit mondain, etc. — Chapitre 5. Condamnation des richesses iniques, avertissements aux riches; diverses autres exhortations.

Les sujets que traite cette épître sont importants à méditer, particulièrement en certaines époques. On peut dire, je crois, que saint Jacques ne suscitera jamais un réveil religieux, mais c'est surtout dans un temps de réveil religieux qu'il pourra exercer une grande et salutaire influence, parce que la foi étant le grand et vrai levier de tout réveil, comme elle est aussi le seul moyen de salut, on risque, à force de relever l'importance de la croyance, de la doctrine, d'oublier que la croyance seule n'est pas la foi, et que pour mériter ce nom elle doit être accompagnée de ce qui en constitue la réalité, c'est-à-dire des bonnes œuvres. Saint Jacques ne diffère pas de saint Paul sur ce pas, ni saint Paul de saint Jacques ; l'un veut la foi et les œuvres, l'autre veut les œuvres et la foi, et chacun insiste sur celui des points de vue qui lui paraît le plus négligé dans les circonstances où il écrit, et le plus important à mettre en saillie. On peut voir sur ce sujet la dissertation du Dr Néander, dans ses Kleine Gelegen-heitsschriften; elle a été traduite en français dans le Narrateur religieux, 1837.

Quant à l'authenticité de l'épître, elle a été attaquée par des hommes de couleurs bien différentes ; cependant De Wette lui-même, qui avait d'abord émis quelques doutes, les a complètement rétractés dans la deuxième édition de son Einleitung etc.,p. 316 et suiv. Clément de Rome et Hermas, l'auteur du Berger, connaissaient déjà cette épître, et Irénée a fait une allusion à 2,23., en se servant d'expressions empruntées presque littéralement à cette épître ; Origène, Denys d'Alexandrie et Eusèbe la mentionnent également et l'attribuent à saint Jacques ; enfin une circonstance très favorable à l'authenticité de cette épître, c'est qu'elle se trouve déjà dans la Peschito, ce qui prouve que l'Eglise syrienne au deuxième siècle la connaissait et l'avait acceptée. Pour plus de détails, v. Guerike, Beitrage zur Einleitung, § 3. etc., Comment, de Stier.

JADDUAH, Néh. 12,11. 22., souverain sacrificateur, le dernier qui soit nommé dans l'Ancien Testament. Il vivait à l'époque de Darius de Perse et d'Alexandre le Grand, 336 av. C. C'est probablement le même que ce Jaddus dont Josèphe raconte la courageuse résistance à Alexandre. Occupé au siège de Tyr, l'empereur de Macédoine envoya demander du secours et des vivres à Jadduah en exigeant de lui qu'il le reconnût pour maître au lieu de Darius; mais Jadduah, fidèle à celui qu'il reconnaissait pour son souverain, refusa. Alexandre, irrité, dissimula jusqu'aprèsla réduction de Tyr, puis il marcha contre Jérusalem. Jadduah, rassuré par une vision divine, ouvre les portes de la ville et va au-devant d'Alexandre, revêtu des ornements pontificaux, accompagné des prêtres et suivi du peuple en vêtements blancs. A cette vue, Alexandre, qui venait pour se venger, se prosterne devant Jad-duah pour l'adorer, et comme Parménion s'en étonne, il lui répond que dans le temps où il délibérait s'il passerait en Asie, Dieu lui était apparu sous la forme de ce grand prêtre et l'avait encouragé à ne rien craindre et à exécuter hardiment son dessein. Puis il entre dans la ville, offre des sacrifices, accorde aux Juifs la liberté de conscience et des privilèges relatifs à l'impôt. — Jaddus eut pour successeur Onias Ier, son fils. Un de ses frères, Mauassé, gendre du Samaritain Samballat, se retira auprès de son beau-père et obtint d'Alexandre la permission de bâtir sur Guérizim un temple dont il fut le premier grand prêtre.

JAHATS, Nomb. 21, 23. Deu 2, 32. Es. 15, 4., ou Jathsa, Jér. 48, 21., ville située au delà du Jourdain, non loin de l'Arnon; elle fut donnée d'abord à la tribu de Ruben, Jos. 13, 18., et devint ensuite ville lévitique, 1 Chr. 6, 78. Elle paraît avoir appartenu plus tard aux Moabites. JAHAZIEL, lévite d'entre les enfants

d'Asaph, n'est connu que par un seul oracle, 2 Chr. 20, 14. ; il annonce à Jo-saphat et au royaume de Juda une prompte et complète victoire sur les Moabites et les Hammonites, prophétie qui ne tarda pas à s'accomplir en effet (897 av. C).

JAHBETS. 1° Un des descendants de Juda par Pharez; il vivait apparemment du temps des juges, 1 Chr. 4, 9. Il n'est connu que par une prière qu'il adressa à Dieu ; mais elle est sublime par l'abondance de foi dont elle est l'expression : « 0, si tu me bénissais abondamment, et que tu étendisses mes limites, et que ta main fut avec moi, et que tu me garantisses tellement du mal que je fusse sans douleur! » Il demandait beaucoup, et Dieu lui accorda ce fju'il avait demandé. 11 fut distingué entre ses frères. Quelques-uns ont cru que c'était le même que Hothniel, le premier des juges, opinion qui ne peut être ni soutenue ni réfutée. 11 s'établit probablement dans la contrée de ce nom. — 2° Jahbets, <l Chr. 2, 55., ville de la Palestine, située, à ce que l'on croit, dans la tribu de Juda.

JAHEL, Jug. 4, 17. (1283 av. C), femme d'Héber, assassina par surprise le général Siséra, qui lui avait demandé un asile, fuyant Barae; elle lui donna du lait, lui promit l'hospitalité, le cacha sous une couverture, et profita de son sommeil pour lui enfoncer dans la tempe un des clous qui servaient à retenir en terre les toiles de la tente; action que nous serions disposés â juger tout autrement que ne fait Débora, Jug. o, 6. 24., et qui dans la vie ordinaire ne serait qu une infâme et lâche trahison.

JAHZER, ville de Galaad, 2 Sam. 24, o. î\omb. 32, 1. '1 Chr. 26, 31. Après avoir appartenu d'abord aux Moabites, elle fut donnée à la tribu de Gad, puis aux Lévites, Jos. 21, 39. Elle redevint plus tard ville nioabite, Es. 16, 8. Jér. 48, 32., et hammonite depuis l'exil, 1 Macc. S, 8. D'après Eusèbe, elle était située à 8 ou 10 milles ouest-nord-ouest de Philadelphie (Rabbath-Hammon), et Seetzen a trouvé dans cette direction les ruines de deux villes, Szêr et Szâr, sur un petit fleuve, (ju'est-ce que lu mer ou le lac de Jahzer dont il est parlé Jér. 48, 32. ? Les géographes, comme d'Anville, placent dans leurs cartes, près de Jahzer, un lac d'où sort une petite rivière qui va se décharger dans le Jourdain, mais ils le font peut-être uniquement à cause du passage cité; or ce passage est emprunté presque littéralement à Es. 16, 8., sauf la mention du lac, et quelques interprètes supposent qu'il y a dans Jérémie une faute de copiste (adiam au lieu de adei), conjecture que Dahler trouve ingénieuse, mais qui a le malheur de n'être appuyée par aucune espèce d'autorité. Il n'y a rien d'ailleurs qui empêche qu'un lac, maintenant disparu, ait existé dans cette contrée, et Seetzen dit : « J'arrivai près des sources de Nahar-Szir, que je prends pour Jahzer. Personne ne savait rien de l'existence d'un lac dans le voisinage, mais j'y trouvai quelques étangs. » Ces étangs peuvent fort bien être les restes d'un lac lentement desséché, et cette supposition, tout à fait naturelle, est beaucoup plus admissible que l'altération du texte sacré, si révéré des Juifs. C'est aussi l'opinion de Winer. JAIR. 1° Fils de Ségub; il descendait de Juda par son père, et par sa mère de Manassé, dont il était l'arrière—petit-fils par Makir et sa fille, I Chron. 2, 21. cf. Nomb. 32, 41. Deu 3, 14. Jos. 13, 30. Il s'empara de toute la contrée d'Argob à l'est du Jourdain, et donna son nom aux vingt-trois bourgs nomades dont il lit la conquête et qu'il laissa subsister ; selon d'autres passages, le nombre des villes conquises s'élevait à soixante, et l'on ne concilie pas facilement ces deux données, quoiqu'on puisse supposer que le chiffre moindre n'ait égard qu'aux endroits plus considérables, et que le plus élevé comprenne les petits villages aussi bien que les villes plus étendues. C'est dans la dernière année de Moïse qu'on doit sans doute placer cette expédition, I4.'i1 av. C.— 2° Jaïr, Jug. 10, 3., Galaadite, de la tribu de Manassé, le huitième des juges d'Israël, descendait probablement du précédent, lljugea le pays pendant vingt-deux ans, et s'enrichit pendant son administration : il eut trente tils, qui avaient trente villes, toutes nommées du nom de leur père, villes de Jaïr, peut-être, en grande partie du moins, celles qu'avait conquises leur aïeul, et auxquelles de nouvelles possessions auraient été ajoutées. Cette même contrée conservait encore le nom de Jaïr sous Salomon, <l Rois 4, 13. — 3° Père de Mardochée, Est. 2, 5. — 4° Les villes ou bourgs de Jaïr. v. plus haut.

JAIRUS, chef ou président d'une synagogue de Capemaiim; il n'est connu que par l'histoire de la résurrection de sa fille, Mat 9, 18. Marc 5, 22. Luc 8, 41. La foi du père fut le salut de sa fille, et trouva dans cette résurrection un redoublement de force et d'assurance : il croyait, comme le centenier, et il fut aidé dans son incrédulité.

JAKË, Prov. 30, 1., père d'Agur; inconnu.

JAKIM, Mat 1, 11., probablement un autre nom ou un nom abrégé de Jé-hojakim; mais il doit être rayé de la liste généalogique de Joseph, parce qu'il ne se trouve pas dans le plus grand nombre des meilleurs manuscrits; en le conservant, on trouverait d'ailleurs quinze générations au lieu de quatorze dans la troisième classe. La comparaison de 1 Chr. 3, I o. 16. justifierait sans doute l'authenticité du texte reçu, si l'omission de chaînons intermédiaires n'était pas facile et même ordinaire dans les généalogies orientales, v. Jésus.

JAKIN et Boas. v. Boaz.

JAMBRÉS et Jannès, 2 Tira. 3, 8., deux des faux magiciens qui résistèrent à Moïse et à Aaron, Ex. 7, 11., en imitant leurs miracles. Leurs noms ne sont pas rapportés dans l'Ancien Testament, mais il est probable que saint Paul les a puisés dans la tradition orale : selon quelques rabbins, ces enchanteurs auraient été les fils du faux prophète Balaam. D'après Origène, il existait fort anciennement déjà un livre apocryphe intitulé Jamnès et Mambrès, auquel on supposait que l'apôtre avait emprunté le nom de ces imposteurs, ce qui aurait donné à quelques-uns l'occasion d'attaquer mal à propos l'authenticité de cette seconde épître à Ti-molhée. Ces mêmes noms se trouvent dans les apocryphes, chez les rabbins, dans quelques ouvrages mahométans (Abulfa-radsch), et même chez les auteurs païens, notamment chez le pythagoricien Numénius, et chez Pline, qui, énumérant les différentes sectes ou partis de magiciens, semble mettre Moïse et Jamnès sur le même rang. — C'est Théodoret qui suppose que Paul a puisé dans la tradition non écrite, et cela n'aurait rien d'étonnant, d'autres faits ayant été également empruntés à la tradition, v. Act 7, 22. On possède encore une histoire qui doit avoir été racontée par saint Macaire, fort ancien moine de l'Egypte; il affirme en particulier avoir vu leurs tombeaux.

JANNA, Luc 3, 24.,fils de Joseph; inconnu.

JANXÈS. v. Jambrès.

JANOAH. ville située sur les frontières des tribus d'Ephraïm et de Manassé, Jos. 16, 6.; ses habitants furent transportés en Assyrie par Tiglath-Piléser, 2 Rois 15, 29. Eusèbe nomme un bourg Janô situé à 12 milles est de Sichem, et que l'on croit être le même que Janoah.

JAPHET, l'aîné des trois fils de Noé comme il paraît d'après Gen. 10, 21. La bénédiction que son père prononça sur lui est tirée de la signification même de son nom, 9, 27. Martin a traduit « Que Dieu attire en douceur Japhet, » mais le mot hébreu emporte à la fois l'idée de l'extension et de la liberté, et le sens de cette bénédiction serait plutôt « Que Dieu permette à Japhet de s'étendre librement, » par opposition à Cam qui sera restreint dans ses limites et dans sa liberté ; par opposition aussi à Sem dont le sceptre sera plus spirituel, dans la famille duquel sera choisie la race théocratique, et dont l'empire dans ce monde sera moins étendu comme pouvoir temporel. Voici le tableau de sa descendance, tel qu'il se trouve indiqué Gen. 10,1-5.

JAPHET

1. Gomer (Askénas, Riphath, Thogarma).

2. Magog.

3. JUadaï.

i. Javan (Elisa, Tarsis, Kittim, Doda-

nim). 3. Tubal.

6. Mésech.

7. Tiras.

Pour les détails,?;, les articles spéciaux. II y aura bien ci et là des choses peu su-

res et reposant en grande partie sur des conjectures plus ou moins vraisemblables ; mais ce qui est évident, c'est que la race de Japhet est celle que les naturalistes appellent race du Caucase : la plupart de ces peuples ont en effet franchi le Caucase pour peupler le Nord, et leur famille a fini par occuper tout le nord de l'Asie, l'Europe, et probablement encore l'Amérique et la Polynésie. Quant à cette partie de la prophétie « que Japhet loge dans les tentes de Sera, » elle n'annonce à Japhet ni des conquêtes, ni l'esclavage, mais simplement la participation aux bienfaits de la révélation divine dont Dieu avait fait la descendance de Sem dépositaire. On y doit peut-être aussi joindre l'idée de la supériorité intellectuelle généralement reconnue de la race caucasienne sur les autres, et de l'usage que les descendants de Japhet sauront faire des inventions et des idées de leurs frères sémites.

Le nom de Japhet s'est conservé dans le titan des Grecs Japet, et les traditions indiennes donnent à leur Noé (Manu Sat-ja, c'est-à-dire le juste), trois fils, Schar-mse (Sem), Charma et Jyapeti ; la malédiction de Cam y est aussi rapportée et pour des motifs semblables à ceux dont parle la Genèse.

JAPH1A, ville de Zabulon,Jos. 19,12., peut-être la même que Sycamine sur la Méditerranée, non loin du Carmel, entre Ptolémaïs et Césarée, à 20 milles de cette dernière ; peut-être aussi la même que celle que Plins appelle Jebba (5, 17.), et qu'il distingue de Sycamine, mais dont il ne reste plus aucune trace.

JARDINS, v, Gelhsémané, Paradis, etc. Les passages Es. 1,29. 65, 3. 66,17., qui parlent de sacrifices et de purifications faites au milieu des jardins, sont une allusion à l'usage idolâtre des Perses, qui accomplissaient leurs lustrations et autres cérémonies sacrées dans les jardins et hors des villes ; nous ne pouvons plus déchiffrer maintenant le détail de ces mystères nocturnes, auxquels étaient censés présider Adonis et Yénus ; les Juifs, idolâtres par la chair comme par le cœur, avaient accepté en grand nombre ce culte impur, et le prophète leur annonce, avec les châtiments du ciel le terme de leurs cérémonies étrangères, v. Gad.

JAREB, Os. S, 13. 10, 6., surnom ou épithète donnée probablement à Tiglath-Piléser, et qui signifie adversaire, vengeur ou médiateur; selon d'autres, le roi Jareb signifierait un roi grand et puissant, titre que prenaient assez volontiers les rois d'Assyrie, cf. 2 Rois 18, 19.

JARED, ou' Jèred, fils de Mahalaléel, vécut neuf cent soixante-deux ans (de 3544 à 2582 av. C). Il devint père, à l'âge de cent soixante-deux ans, d'Hénoc, à qui il survécut quatre cent trente-cinq ans ; il est, après son petit-Bis Mèthusélah, celui des patriarches qui a atteint le plus long âge, Gen. 5,16.1 Chr. 1, 2. Luc 3, 37.

JARHAH, serviteur égyptien de Sé-san, probablement affranchi et prosélyte, épousa une des filles de son maître, 1 Chr. 2, 34., seul fait de ce genre qui soit rapporté dans l'Ecriture ; il se place à l'époque du séjour en Egypte.

JARMUTH, 1° ville des plaines de Juda, Jos. 15, 35. Néh. 11, 29., ancienne résidence d'un roi cananéen, Jos. 10, 3.12, 11. 15, 35. Saint Jérôme la place à 4 milles d'Eleuthéropolis, ailleurs à 10 milles de la même ville, ce qui est probablement une erreur. 2° Ville lévitique de la tribu d'issacar, Jos. 21, 29., la même qui est appelée Remeth dans le passage parallèle, 19,21.

JASAR, 2 Sam. 1,18., auteur inconnu d'un recueil historique et poétique, si l'on admet la version de nos Bibles. Mais il vaut mieux traduire ce nom qui signifie le juste, le droit, et y voir le titre du même livre du Droiturier déjà nommé Jos. 10,13., ainsi que probablement Nomb. 21,14., dans une note du texte hébreu. On a cru, il y a quelques années, avoir retrouvé, dans une bibliothèque de l'Orient, ce livre si longtemps perdu.

JASOBHAM, 1 Chr. 11,11., appelé Jo-seb-Basébeth dans le passage parallèle 2 Sam. 23,8., où il porte aussi le nom ou surnom de Hadino, à moins qu'en admettant une corruption du texte, on ne doive, avec Gesenius, traduire ce mot et le suivant, et rendre ainsi la fin du verset : « c'est lui qui, brandissant sa lance, eut le dessus sur 800 hommes, etc. », traduction qui est autorisée par la comparaison de 1 Chr 11,11. Le nom de Joseb-Basé-beth signitie celui qui babite dans la paix. Jasobham, tils de Hacmoni, était le chef des trois principaux guerriers de David, et par conséquent le premier de ses hommes d'élite après Joab, qui était établi sur tous, 2 Sam. 23, 8. 9, Il n'est connu que par l'exploit mentionné dans ce passage, et comme l'un des trois chefs qui exposèrent leur vie pour procurer un peu d'eau à leur roi. —v. Abisaï.

JASON, parent de saint Paul, Rom. 16, 21., et son hôte à Thessalonique, Act 17, 5. Il dut comparaître devant les gouverneurs de la ville, en l'absence de Paul, que les Juifs, ses ennemis, n'avaient pu retrouver. Accusés de sédition et de complots politiques, Jason et ses amis ne purent être convaincus, et furent relâchés sous caution. On pense que Jason accompagna l'apôtre à Corinthe. Les Grecs le font évèque de Tarse en Cilicie.

JASPE, Ex. 28, 18. 39,11. Ez. 28, 13. Apoc. 21,19. Pierre précieuse qui, dans presque toute les langues connues, porte le même nom dérivé de l'hébreu yashpèh, de sorte que l'identité n'est pas difficile à établir. C'est plutôt un marbre qu'une pierre précieuse proprement dite; il n'est pas transparent et approche de la nature de l'agate. Le plus beau jaspe est vert, avec des veines blanches et des taches jaunes ou rouges; on estime aussi le jaspe incarnat, le pourpre et le rose. Les anciens faisaient grand cas d'ornements et de bijoux de jaspe, et Pline dit que si cette pierre est surpassée en beauté par plusieurs, elle conserve toujours le prestige que lui donne sa priorité et l'usage qu'on en a fait de tout temps.

JATBÀ (etnon Jotba, comme le portent nos versions), lieu de naissance de Mes-sullémet, mère du roi Amon, 2 Rois 21, 19., antique ville de la Judée, dit saint Jérôme.

JATHSA. v. Jahats.

JATTIR, ville lévitique des montagnes de Juda, Jos. 15, 48. 21,14. cf. 1 Sam. 30, 27. 1 Chr. 6, 57. Eusèbe la nomme Jétheïra, et la place à20 millesd'Eleuthé-ropolis, non loin deMalatha, dans le district de Daromas, qui était tout entier peuplé de chrétiens.

JAVAN, quatrième fils de Japhet, et père d'Elisa, Tarsis, Kittim et Dodanim, Gen. 10, 2. 4. Son nom se retrouve encore Ez. 27,19. Zach. 9,13., etailleurs. On est d'accord à penser qu'il désigne la Grèce, l'ionie, cf.; son nom hébreu n'est même pas autre chose que Jon, et dans l'Iliade, 13, 685., les Ioniens sont appelés Jaoniens. Plus tard, les Grecs prirent le nom d'Hellènes, et celui d'Ioniens fut réservé à quelques-uns d'entre eux seulement, qui passèrent dans l'Asie Mineure, dont ils peuplèrent une partie des côtes.

JEAN. L'Ecriture mentionne quatre personnages de ce nom, le Baptiste, le fils de Zèbédée, un juge de la race sacerdotale, et le disciple plus ordinairement appelé Marc. Ce nom, en hébreu Jochan-nan, signifie accordépar la grâce de Dieu, et correspond ainsi, pour le sens, aux noms de Samuel, Nathanaël, Nathanja, Matthieu, Théodore, Diodati, Dorothée, Adéodat, etc.

1° Jean-Baptiste, fils de Zacharie et d'Elisabeth, Lévite et de la race sacerdotale, Luc 1,13., fut le dernier prophète de l'ancienne économie, Elie ressuscité, le précurseur immédiat du Messie. Sa naissance fut miraculeuse comme celles d'I-saac, de Samson, de Samuel, et l'ange qui l'annonça dans le temple lui imposa aussi le nom qu'il devait porter. Il naquit six mois avant Jésus, dans les montagnes de Juda, peut-être à Hébron ou à Jutta (Jos. 21, 16.), et resta dans ces solitudes jusqu'au commencement de sa vie publique, environ l'an 15 de Tibère. 11 apparut au monde avec toute l'austérité dévie des anciens prophètes, Nazaréen dans la sobriété de sa nourriture et la simplicité de ses vêtements. Il demeurait non loin de la mer Morte, et c'est là qu'il exhorta le peuple à la repentance et à un complet changement de vie, l'engageant à fuir la colère à venir, et lui administrant le signe symbolique du baptême pour marquer que toutes choses devaient être faites nouvelles. Le peuple accourait à lui de toutes parts; riches et pauvres, pharisiens et sadducéens, tous s'empressaient auprès du prophète qui venait, après pluleur répondit simplement en parlant du Seigneur : Il faut qu'il croisse et que je diminue.

Hérode Antipas ayant ouï parler de Jean-Baptiste, l'attira auprès de lui, plein de respect pour une sainteté qu'il ne se sentait capable ni d'imiter ni de contraindre; il lui demanda ses conseils et l'écou-lait volontiers, faisant même le. bien que Jean lui disait de faire (Marc 6, 20.), toutefois sans préjudice à ses honteuses pas-sions, et lorsque Jean eut condamné le mariage adultère qui l'unissait à sa belle-sœur, il fut mis en prison, et bientôt après décapité, sur la demande de cette femme impure et cruelle.

C'est dans la forteresse de Machserus ou Machéronte que se passa, au dire de Josèphe, ce drame inique et sanglant. Cette tour, bâtie avec magnificence par Hérode, était située à une grande hauteur sur le penchant de la montagne de Nébo, dont les parois de rochers descendent dans la mer Morte. Des ravins escarpés l'entourent au nord et au midi.

Il n'est pas douteux que Jean-Baptiste n'ait exercé une grande influence et joui d'une grande considération à l'époque où il vécut. Ses prétentions eussent suffi pour diriger sur lui bien des regards; sa sainteté et l'austérité de ses mœurs appuyaient d'une manière puissante les titres qu'il re-vendiquait, et l'on voit combien le nombre de ses adhérents était considérable et combien ces disciples étaient jaloux pour sa doctrine et pour sa gloire, Mat 3, 5. 9, 14. Jean 10, 41. Le grand saihédrin lui-même s'était ému et avait député auprès du précurseur quelques-uns de ses mem-bres, pharisiens et sacrificateurs, pour l'interroger sur sa mission, Jean 1,19. 24. Enfin Hérode le courtise, et quand il voit plus tard Jésus faire des merveilles de puissance, il se demande si ce n'est pas le Baptiste ressuscité, Mat I i, 2. Jean n'a pas été seulement précurseur, i) a été aussi docteur; il devait préparer la voie au Messie, et pour cela, il ne suffisait pas de l'annoncer, il fallait encore disposer les cœurs à le recevoir ; il a donc prêché la repentance, la contrition inté-| rieure sans laquelle personne n'acceptera e salut, parce que personne ri en sentir.

sieurs siècles de silence, faire entendre de nouveau les avertissements et les oracles de l'Eternel; tous espéraient trouver dans les eaux du Jourdain l'expiation de leurs péchés. Ils paraissaient voir dans le baptême de Jean une magique vertu d'ablution qui devait les dispenser de la pureté intérieure, et cette superstition, si répandue encore chez quelques sectes chrétiennes, leur faisait espérerl'impunité dans le mal. Mais Jean ne leur cacha pas la vérité; il les repoussa sévèrement, leur montrant dans la purification du cœur le vrai remède, le seul moyen d'échapper aux justes jugements de Dieu. Surpris de tant d'autorité, admirant la sainteté du prophète, le peuple se demandait si cet homme n'était peut-être pas le Messie ; mais Jean ne les laissa pas dans cette fatale erreur : il baptisait d'eau, le Messie devait baptiser du Saint-Esprit; il prêchait la repentance, le Messie devait prêcher le salut et le pardon ; entre l'un et l'autre il y avait toute la différence qu'il y a entre l'Ancien et le Nouveau Testa-ment, et Jean n'hésita pas à le leur dire : Je suis la voix qui crie au désert : aplanissez le chemin du Seigneur ; mais il en vient un après moi, plus puissant, dont je suis indigne de délier la courroie des souliers. — Parmi ceux qui venaient pour se faire baptiser, Jean vit un jour un de ses parents, Jésus de Nazareth : on ne peut douter qu'il ne le connût, il le regardait même comme un prophète plus grand que lui, plus saint que lui. Peut-être tous les mystères de la naissance et de la vie de Jésus lui étaient-ils encore inconnus, et Jean ignorait-il officiellement que son cousin fût le Messie promis; mais il pouvait le soupçonner, puisque déjà il s'humiliait devant lui. Ii refusa d'abord de le baptiser, et ne céda que lorsque Jésus lui eut fait sentir qu'il était venu pour accomplir toute justice. Dès lors, Jean-Baptiste se borna à rendre témoignage au Messie, qu'il avait fini par reconnaître; il le montra à la foule, il le montra aux disciples André et Jean, et comme le peuple cessa d'accourir auprès de lui pour se faire baptiser, et qu'il s'attacha à Jésus, les disciples de Jean, peines de cet abandon, le firent remarquer à leur maître; mais il XXXX

le besoin. Il a été chef d'une école, et cette école a coir.pté des disciples en dehors de la Judée, dans l'Asie Mineure, en Grèce, peut-être même à Alexandrie, Act 18,25. 19, 3. On voit par Luc 11,1., qu'il avait été jusqu'à leur donner uii modèle de prière, ce qui indique à la fois une grande spiritualité dans sa manière de comprendre le royaume de Dieu, une grande étendue dans la portée de ses enseignements, et une grande autorité sur l'esprit de ses adeptes. Mais on se demande avec quelque surprise comment il se fait qu'il y ait eu une si longue rivalité entre ses disciples et ceux du Messie, Mat 9, 14., Luc b, 33. 11, 1., rivalité qui se produit soit à propos du jeûne, soit à propos de la prière, soit à propos du baptême et des succès croissants de l'œuvre de Jésus ? On se demande pourquoi, si Jean a reconnu son parent pour « celui qui devait venir, » il ne s'est pas joint à lui avec tous ses disciples, pourquoi il a continué d'exercer son activité d'une manière si indépendante, au lieu de se subordonner au Messie et de devenir l'un de ses agents? Pourquoi, puisqu'il ne se considérait que comme le précurseur, n'a-t-il pas envoyé ses disciples à celui qu'il regardait comme le chemin, la vérité et la vie ? Pourquoi n'a-t-il pas déclaré sa tâche accomplie dès le moment où le Saint-Esprit fut descendu sur Jésus aux bords du Jourdain ? Il faut peut-être, pour le comprendre, admettre que le Baptiste a partagé jusqu'à un certain pas le préjugé d'un règne temporel du Messie et les espérances qu'une interprétation trop littérale de l'Ancien Testament avait fait naître chez les Juifs même les plus pieux. Il se regardait comme l'avant-cou-reur officiel du roi du monde, et pensait peut-être que son œuvre ne devait s'arrêter que lorsque le Messie lui-même se serait officiellement déclaré comme tel. Or, aussi longtemps qu'il voyait Jésus faire des miracles, prêcher, gagner les âmes à lui, mais vivre dans l'obscurité, dans le renoncement à lui-même, ne faire que des conquêtes spirituelles, et souffrir, ce qui, pour les disciples même du Messie, était encore une énigme impénétrable, il pouvait croire que sa mission de préparateur n'était pas achevée, et refuser de licencier ses disciples pour les adresser à un chef qui ne se présentait pas avec un caractère public. A sa mort, ses disciples continuèrent d'attendre le Messie, mais ils restèrent en l'état où Jean les avait laissés ; ils n'avancèrent pas en lumière, et leur secte, devenue station-naire, ne fit pas un pas vers Jésus; privés d'un maître qu'ils avaient grandement honoré, ils eussent cru Se montrer infidèles à sa mémoire s'ils se fussent tournés vers celui dont leur chef n'avait été que le précurseur; ils annoncèrent encore le Messie, mais ils ne le virent pas, ils ne le reçurent pas, ils ne le reconnurent pas malgré toutes les manifestations de sa gloire, et de nos jours encore, on trouve en Orient une secte qui porte le nom des disciples de saint Jean (les Mandéens, Nazaréens, ou Sabéens), et dont les livres saints sont empreints du gnosticisme le plus complet.

On peut donc regarder comme une tache dans la vie du Baptiste, comme le fruit d'une trop prudente irrésolution, la prolongation de son ministère de précurseur. C'est aussi peut-être à un affaiblissement momentané de sa foi que l'on doit attribuer l'étonnante question qu'il lit faire à Jésus par deux de ses disciples : Es-tu celui qui devait venir, ou si nous devons en attendre un autre? Mat 11, 2., Luc 7, 19. Quelques auteurs pensent que Jean n'envoya des disciples à Jésus que pour fortifier leur foi incertaine et les affermir dans la vérité ; mais il serait étrange que des hommes aussi dévoués à leur maître n'eussent pas reçu son témoignage sur ce qui faisait la partie la plus essentielle de son œuvre, et que Jean eût, dû les persuader en les envoyant auprès de celui dont ils étaient jaloux et en qui même ils ne croyaient pas. D'autres théologiens pensent que sous la forme d'une question, le prophète qui était dans les fers, voulait engager le Seigneur à hâter sa manifestation, à accélérer l'exécution de ses plans de miséricorde et de royauté, à venir le délivrer lui-même de la prison dans laquelle il languissait, n'ayant d'espérance que dans le Messie, et voyant la réalisation de ces espérances indéfiniment ajournée. Cette dernière explication se rapproche davantage de ce qui nous paraît être la vérité ; mais il faut en retrancher l'espèce de conseil que Jean aurait l'intention de donner à Jésus. La manière même dont la question est posée prouve qu'en la faisant, Jean pensait plus à lui qu'à Jésus, plus à sa position personnelle qu'à la mission de Christ ; et c'est dans l'âme du prisonnier plus que dans son esprit que le doute qu'il présente a dû prendre naissance. L'expérience intérieure, dit Olshausen, peut seule nous faire comprendre la pensée de Jean-Baptiste. II y a dans la vie de chaque fidèle des moments où les convictions les plus fortes et les mieux assises viennent à être ébranlées; les ténèbres succèdent à la lumière, et l'on est comme abandonné du Saint-Esprit ; or il est à croire que Jean a eu ses moments de faiblesse et de doute comme nous tous. On s'habitue trop en général à considérer les caractères bibliques comme étant tout d'une pièce, fermes et inébranlables ; on les divinise trop, et en les élevant trop au-dessus de l'humanité on leur fait perdre ce qu'il y a pour nous d'instructif dans leur foi triomphant de leurs doutes ; en tout cas, on sort de la vérité. Un seul a vécu sans passer alternativement du bien au mal et du mal au bien; un seul a vécu immuable dans sa force, parce qu'il était lui-même le Fort, le Puissant ; tous les autres ont dû lutter contre les ténèbres intérieures, et tous ont pu succomber, pour tous il a pu y avoir des jours d'obscurcissement. Et si l'on se représente le précurseur dans son cachot, on ne sera pas surpris qu'il ait eu ses heures d'angoisses, qu'en de pareils moments la tranquille et lente activité de Jésus lui ait paru peu divine, suspecte peut-être, et qu'il ait oublié toutes ses expériences précédentes pour se laisser aborder par des doutes. Mais dans ces doutes encore, que de confiance! dans cette incrédulité, que de foi! C'est à Jésus lui-même qu'il s'adresse dans son incertitude, et sa question n'est autre que cette prière : « Je crois, Seigneur, aide-moi dans mon incrédulité ! » Il ne s'interroge pas lui-même, il ne va pas auprès des docteurs et des pharisiens, il va droit à Jésus. Et certes, celui qui demande à Dieu s'il est Dieu, et au Sauveur s'il est Sauveur, celui-là n'est pas en dehors de la foi ; un seul rayon du ciel dissipera l'obscur nuage qui pèse sur son âme. Aussi ne voyons-nous aucune contradiction dans les doutes de Jean, et le témoignage que Jésus lui rend immédiatement après avoir répondu aux deux messagers ; c'est bien par rapport à Jean que Jésus dit : Bienheureux celui qui n'aura pas été scandalisé en moi ; mais ces paroles sont tout ensemble un encouragement et un avertissement. Le Sauveur est bref parce que ces combats intérieurs doivent être livrés intérieurement, et que le secours même ne peut venir du dehors ; il voyait d'ailleurs que, pour Jean, la victoire était proche. Puis, quand les messagers sont partis, il s'adresse à la foule et leur de-inande : Qu'êtes-vous allés voir au désert ? Vous n'y êtes certainement pas allés pour voir seulement des roseaux ou d'autres objets de ce genre : vous avez voulu voir un prophète, et vous l'avez vu ; c'est même plus qu'un prophète, c'est l'Elie qui devait venir. Peut-être aussi le roseau et l'homme vêtu de vêtements se rapportaient-ils directement à Jean et étaient-ils une allusion à la fermeté de la foi et à la sévérité de sa vie. Quoi qu'il en soit, Jésus reproche à la foule d'avoir été seulement pour voir cet homme admirable, pour voir un prophète, comme s'il y avait là quelque chose à voir, et de n'avoir pas compris qu'il fallait surtout entendre, écouter ses exhortations, les mettre en pratique, et forcer le royaume des deux. Jean a été appelé par Jésus le plus grand des prophètes, et c'est lui aussi qui termine la longue liste des prophètes de l'ancienne alliance, en même temps qu'il sert de pas de départ au ministère de la nouvelle économie, Mal. i, 5. Luc 1, 17. Act I, 22. 10, 37. Mat 11, 11. 13., etc. Esaïe l'avait annoncé (40, 3.), de même que Malachie 3, 1., et ce dernier prophète (4, 5.) l'avait fait l'égal du plus grand des prophètes, Elie, le contemporain d'Achab. Jean-Baptiste a eu sur Elie l'avantage d'avoir vu sa mission couronnée d'un grand succès, et si le premier Elie a fui dans les déserts pour y

désespérer, le second a vécu dans les mêmes solitudes, mais pour accomplir son œuvre, prêcher et baptiser. — Heureux ceux qui croient, car le plus petit sous la nouvelle économie est plus grand encore que Jean-Baptiste, et les doutes du précurseur ne sont plus permis à ceux qui savent que le Christ est mort et qu'il est véritablement ressuscité.

2° Jean, l'apôtre, d'abord pêcheur de poissons, puis pêcheur d'hommes, était fils de Salomé et de Zébédée, cf. Mat 27, 56. Marc 15, 40. Ses parents paraissent avoir été du nombre de ceux qui attendaient la consolation d'Israël; aussi voyons-nous Zébédée laisser aller son fils au moment où Jésus l'appelle, et consentir aux sacrifices nombreux que Salomé fait pour Jésus. Ils étaient de Bethsaïda, ce que l'on conclut de leur association pour la pêche avec les familles de Pierre, d'André et de Philippe, qui appartenaient à ce village, cf. Mat 4, 18. 21. Jean 1, 44.21,3-7. ; peut-être étaient-ils comme eux domiciliés à Capernaiim, Luc 4, 31. 38. Marc 1, 21. 29. Quoi qu'il en soit, ils demeuraient au bord du lac de Génésa-reth, sur les rives duquel une école de prophètes avait écouté les enseignements d'un grand maître sous l'ancienne alliance ; la première école de la nouvelle économie devait partir des mêmes rivages. Quelques anciens auteurs ont cru que la famille de l'apôtre était pauvre : c'est l'opinion de Chrysostome, qui le conclut de ce que Zébédée élevait ses fils dans son propre métier, de ce qu'il rac-commode lui-même ses filets, de ce qu'ils pèchent non pas dans la mer mais dans un petil lac, enfin de ce que les pêcheurs sont ordinairement misérables. Cette dernière raison n'en est pas une : quant aux autres, elles sont bien faibles, et l'on peut supposer au contraire que Zébédée jouissait d'une honnête médiocrité, car le lac de Génésareth était fort poissonneux et fournissait à ses riverains une grande ressource commerciale. Zébédée a des ouvriers, Marc 1, 20., ce qui prouve tout au moins uue certaine extension dans l'ensemble de ses travaux; Salomé assiste Jésus de ses biens et achète de l'encens pour l'embaumer après sa mort; enfin Jean paraît avoir possédé une demeure à lui, Jean 19, 27.: tout cela marque suffisamment qu'il y avait plutôt de l'aisance dans cette famille, quoiqu'elle ne fût pas riche. Quant aux rapports de Jean avec Caïphe, Jean 18, 15., ils prouvent peu de chose sur celte terre où le riche et le pauvre se rencontrent.

Si Jean était un homme sans lettres, Act 4, 13., on ne peut douter qu'il n'ait été élevé dans la crainte de Dieu et dans l'attente du Messie ; il entendit les enseignements du précurseur, et fut baptisé par lui dans les eaux du Jourdain. Puis, lorsqu'il eut vu Jésus, ce disciple, avide de lumière, se tourna entièrement vers lui, l'accepta pour son maître, et fut si captivé par une première conversation qu'il resta avec lui depuis quatre heures du soir jusqu'à la nuit, Jean 1, 39. Néanmoins la sagesse de Jésus ne donnant jamais aux esprits au delà de ce qu'ils peu-vent porter, il se borna pour cette première fois à jeter la semence dans l'âme du disciple, et il l'y laissa germer ; ce ne fut que quelque temps après, que Jésus, sur les bords de la mer de Galilée, appela le jeune homme, qui le suivit aussitôt. Il jouit dès lors non seulement de ses enseignements, mais de son amitié toute spéciale, et J ésus, après lui avoir accordé la faveur d'assister à la guèrison de la belle-mère de Pierre, Marc 1,29., à la résurrection de la fille de Jaïrus,5, 37., à la transfiguration surleThabor, 9,2.,et àl'agonie de Gethsémané, 14, 33., lui légua encore sa mère en quittant la vie, Jean 19,26.11 a pu être appelé celui que Jésus aimait, comme Abraham avait été nommé l'ami de Dieu ; et dans les scènes du Calvaire, il lui fut seul fidèle. Sans doute il s'enfuit avec les autres au premier moment de l'arrestation, mais il revint plus tard (l'anecdote racontée Marc 14, 51. 52. se rapporte plus probablement à Marc lui-même qu'à Jean, quoique cette dernière opinion ait ses défenseurs), il entre dans la cour du palais de justice, il se montre au pied de la croix, lui seul entre les douze, il recueille l'héritage de son ami, il le voit expirer, il voit l'eau et le sang jaillir d'une blessure qui lui est faite d'un coup de lance, et il peut sceller le témoignage qu'il rend, de ces paroles : Celui qui le témoigne l'a vu, Jean 19, 35. Au troisième jour il arrive le premier au sépulcre, et il croit le premier à la résurrection de son maître, Jean 20. Pendant les quarante jours qui s'écoulent entre la résurrection et l'ascension, il demeure avec les autres apôtres, il fait avec eux le voyage de la Galilée, et lorsque Jésus se fait voir sur les rives du lac, c'est encore lui qui le reconnaît le,premier. Le même jour a lieu la réintégration de Pierre dans l'apostolat, et Jean, qui avait été le témoin du reniement, fut aussi le témoin du pardon. Apres l'ascension de Jésus et l'effusion du Saint-Esprit, il demeura à Jérusalem, probablement encore quelques années ; on le voit surtout avec Pierre, Act 3,1.4,13.8,14. Ensemble ils guérissent un impotent; ensemble ils sont accusés, détenus et relâchés ; ensemble ils vont bénir la Samarie et faire descendre le Saint-Esprit sur ces bourgades sur lesquelles Jean, dans le premier zèle de son ignorance, avait voulu faire tomber le feu du ciel, Luc 9, 34. Paul, lors de son premier voyage à Jérusalem, avant l'an 40, n'y trouve pas Jean, Gai. I, 18. 19., mais à son second ou troisième voyage, il l'y trouve fixé et établi, et l'appelle une des colonnes de l'Eglise, Gai. 2, 9. Dès lors le Nouveau Testament garde le silence sur la vie de cet apôtre, dont il ne mentionne plus que l'exil à Patmos. II paraîl qu'il resta à Jérusalem jusqu'à la mort de Marie, dont la date est incertaine, et que pendant quelques années il vécut missionnaire, évangélisant, à ce que l'on croit, le sud-est de la Palestine; mais il est probable que plus tard il alla vivre au milieu des Eglises de l'Asie Mineure, et qu'il fixa sa résidence à Ephèse (tîO—66). Il devint doublement nécessaire dans cette grande ville quand Paul, et après lui Timothée, eurent abandonné ce champ de travail si important, qui se trouvait placé comme un pas central entre l'Asie et l'Europe. On comprend qu'il ait exercé une suprématie de fait sur toutes les Eglises environnantes. C'est à Ephèse qu'une maison de bains a dû s'écrouler sur Cérinthe, et que Jean a dû ressusciter un mort, deux miracles qui n'ont rien de surprenant si l'on se rappelle que l'antiquité lui en attribue un grand nombre, et que la vertu des miracles résidait abondamment dans la personne des apôtres, si bien que leur ombre même guérissait les malades. On peut reléguer sans risque au nombre des légendes l'histoire de la coupe de ciguë qui lui fut donnée à boire; cette anecdote ne repose sur aucune preuve authentique, et nous ne la rappelons que parce que saint Jean est quelquefois représenté, dans les statues qu'on lui élève, tenant à la main une coupe au fond de laquelle se trouve un serpent.

Une violente persécution ayant éclaté en 93, sous le règne de Domitien, plusieurs Eglises furent privées de leurs chefs, et Jean fut envoyé en exil à Patmos, l'une des Sporades, non loin d'E-phèse (96). Cet exil est un fait constant et avéré ; il n'est sans doute pas en opposition directe avec la translation de Jean à Romesous Domitien, et son supplice dans l'huile bouillante, mais si Tertullien et Jérôme racontent ce dernier fait, le silence d'Eusèbe et d'Irénée semble le démentir. C'est pendant son séjour à Patmos que l'apôtre fut honoré de ces ma-gnifiques révélations qu'il écrivit plus tard pour l'édification et l'instruction des fidèles, v. Apocalypse. A son retour à Ephèse, Jean trouva l'Eglise en désordre et ses membres dispersés. C'est là que prend place l'histoire bien connue, racontée par Eusèbe, Chrysostome et Clément d'Alexandrie, du jeune homme qui s'est joint à une bande de voleurs et que Jean, déjà vieux, poursuit jusque dans les montagnes. A supposer qu'en passant de mains en mains, cette anecdote se soit revêtue d'ornements étrangers, comme tout ce qui passe par les mains de Rome, le fait lui-même n'en parait pas moins avoir eu lieu, et plusieurs témoignages respectables le confirment. Enfin, Jérôme nous a conservé un dernier trait qui clôt dignement la sainte carrière de l'ami de Jésus. Vers la fin de sa vie il était trop faible pour se rendre à pied aux assemblées des frères, il était trop faible même pour parler aux jeunes gens; mais il répétait cependant toujours : Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres ; et quand on lui demandait pourquoi il insistait sur ce devoir, il répondait : « C'est que c'est le commandement du Seigneur. » Les anciens sont unanimes àlui donner un grand âge; il a vu, selon Irénée, l'avènement de Trajan, en 98, et il est mort à Ephèse, où l'on a longtemps montré son tombeau; quoiqu'on l'ait appelé martyr, il ne paraît pas que sa mort ait été violente. Un malentendu sur les paroles de Christ, Jean 21, 22. 23., a accrédité parmi les anciens le bruit que Jean n'était pas mort, et qu'il ne mourrait pas jusqu'à la fin du monde, tandis que Jésus n'avait parlé que de la destruction de Jérusalem; on l'a en conséquence cherché longtemps sur la terre, tout en oubliant qu'il parle et qu'il vit encore dans ses écrits. Son grand âge est pour nous un précieux gage de la canonicité des écrits du Nouveau Testament, et l'on ne peut douter que ce té-moin, qui a vu l'Eglise se former, n'ait aussi eu ^influence d'un témoin sur les livres qu'on admettait comme authentiques, et dont on faisait usage dans l'Eglise, et que le témoignage qu'il a rendu à la vérité des autres Evangiles n'ait contribué à confirmer aux yeux de tous leur authenticité.

Quant au caractère de Jean, c'est un mélange admirable de force et de douceur; une espèce de charme l'entoure, c'est le charme des dons de l'esprit, la paix de Jésus, l'humilité, la charité, l'amour, la piété la plus profonde; c'est le charme d'un grand zèle et d'un grand sérieux, mêlé de douceur et de bonté. Si la paix est le trait saillant de son cœur et de son activité, ce n'est pas qu'il ait manqué d'énergie, au contraire; mais ses vertus douces nous font oublier ses vertus fortes, parce qu'il n'est pas dans notre nature de comprendre à la fois deux extrêmes, et les hommes sont rares qui, renommés pour leur douceur, eussent écrit ces paroles de 2 Jean 40. : « Si quelqu'un vient à vous et qu'il n'apporte pas cette doctrine, ne le recevez pas dans votre maison, et ne le saluez pas. » Plusieurs traits semblent montrer aussi que, dans sa jeunesse, et avant d'avoir eu la pleine connaissance de la vérité, Jean avait un caractère plus vif, plus impétueux, plus ardent qu'on ne se le figure d'ordinaire: cela se voit par son opposition au disciple qui faisait des miracles sans suivre Jésus, Marc 9, 38., par la demande qu'il fait à son maître d'appeler le feu du ciel sur une bourgade des Samaritains, qui avait refusé de les recevoir, Luc 9, 54., par la requête orgueilleuse de Salomé en sa faveur et en faveur de Jacques, son frère, Mat 20, 20., enfin par le nom de Boanergès, cf., qui fut donné à ces deux frères.

Evangile. Ce n'est pas une histoire proprement dite du ministère de notre Sauveur ; on pourrait l'appeler plutôt ses mémoires ou ses pensées. Il paraît supposer la connaissance des trois autres Evangiles, et passe sous silence plusieurs faits rapportés dans ces derniers, la naissance du précurseur, celle du Messie, son baptême, sa tentation, l'appel définitif de plusieurs des apôtres, le nom qu'il leur donne, leur mission, l'envoi des septante, un grand nombre de miracles et de paraboles, plusieurs des instructions de Jésus, et en particulier le sermon sur la montagne, la transfiguration, l'institution de la cène, les angoisses de Gethsémané, l'ascension ; il omet ou se borne à rappeler ce qui est connu, et se montre original dans toute son étendue. La plupart des faits qu'il rapporte ont eu lieu à Jérusalem ou dans les environs, et il désigne avec plus d'exactitude que les trois autres évangélistes (synoptiques) le lieu, le temps, les personnes, les circonstances, les usages. Les miracles qu'il raconte sont principalement ceux qui sont liés aux enseignements du Sauveur, ou qui ont fait quelque sensation publique. On ne peut nier qu'il n'y ait une grande différence, entre cet Evangile et les autres, mais encore ne faut-il pas exagérer cette différence, comme le fait très bien remarquer Tholuck ; et si l'image qu'il nous donne des discours, de la vie, de la personne de Christ, est plus grande, elle n'est cependant pas autre, et De Wette lui-mê-me, qui cherche plutôt les différences que les ressemblances, avoue que dans ce cas particulier les différences sont dans la forme plutôt que dans le fond, et qu'elles se comprennent facilement. Notre plan ne comporte pas un examen détaillé des rapports qui se trouvent entre Jean et les synoptiques : on les retrouvera dans les ouvrages spéciaux, parmi lesquels nous recommandons surtout Sander, traduit en français, avec une excellente préface de M. de Rougemontsur le même sujet (Neu-châtel).— Jean a écrit son Evangile à Ephèse, quoique plusieursauteurs prétendent qu'il l'a composé pendant les loisirs de Patmos. Irénée et Jérôme sont positifs dans leur témoignage, tandis qu'un écrit apocryphe ( les douze apôtres ) est la première source connue de la tradition en faveur de Patmos. Quant au temps, les uns (Basnage, Lampe, Wegscheider ) veulent que Jérusalem subsistât encore lorsque Jean a fait son travail, et ils mettent la composition de cet Evangile environ vers l'an 67, opinion qui ne peut guère se soutenir. D'autres pensent que Jean l'a écrit avant l'exil de Patmos, et par conséquent avant l'Apocalypse ; ils s'appuient sur ce que, Apoc. 1,5. 9., Jean dit qu'il a rendu témoignage à Jésus, paroles qu'ils estiment se rapporter nécessairement à son Evangile; mais cette preuve prouve peu. Reste enfin la troisième opinion, qui place la rédaction de l'Evangile après celle de l'Apocalypse ; elle est appuyée par Irénée, Jérôme, Epiphaneet Eusèbe; le style de l'Evangile a aussi quelque chose de plus soigné, de plus mûri, comme celui d'un homme plus habitué à écrire et plus versé dans le maniement de la langue grecque.

On comprend qu'un écrit aussi beau et aussi important ait trouvé de nombreux commentateurs; nous n'indiquerons, parmi ceux de la Réforme, que Zwingle, Luther, Mélanchthon, Calvin et Bèze ; puis, au siècle dernier, en 1724, Lampe d'U-trecht, plein d'érudition, de sagacité et de chaleur chrétienne. Parmi les auteurs plus récents, nommons Paulus dont la réputation comme orthodoxe moderne est faite et perdue depuis longtemps ; Kui-nœl, bon répertoire; Lucke; Clarke ; Ols-hausen(trad. en français); enfin Tholuck: ces deux derniers sont les plus connus, et peut-être aussi les plus dignes de l'être. Olshausen paraît avoir mieux senti, I Tholuck avoir mieux compris saint Jean ; mais tous les deuxl'ontcommenté en chrétiens, et leur travaux resteront. Tholuck réunit à la brièveté le mérite de fournir tous les moyens exégétiques de lire avec fruit cet Evangile, comme en général les autres écrits du Nouveau Testament qu'il a commentés. — En anglais, Leçons explicatives de Bird Summer.

Epltres de saint Jean. Elles sont au nombre de trois, et quoiqu'elles ne portent pas de nom d auteur, non plus que l'Evangile, elles ont été attribuées à cet apôtre, presque sans contestation, les té-moignagesanciens ne laissant aucun doute à ce sujet. La première porte le nom de catholique, parce qu'elle a été adressée à un ensemble de congrégations, et l'on pense généralement que saint Jean l'envoya de Patmos aux Eglises de l'Asie Mineur.e et à celle d'Ephèse en particulier, malgré certains témoignages apocryphes d'après lesquels l'apôtre l'aurait destinée aux Parthes ou aux Juijs convertis d'entre ceux qui étaient exilés parmi les Parthes, au delà de l'Euphrate. Jean y combat les mêmes erreurs que dans son Evangile; on y retrouve le même plan, le même style, le même vocabulaire peu riche, et dont le verbe aimer semble faire le fond. L'Homme-Dieu y est annoncé d'une manière éclatante; la manière claire et précise dont y est présentée la doctrine de Dieu a fait donner à Jean le nom de théologien par excellence ; il expose que la Parole était au commencement, qu'elle était avec Dieu, qu'elle était Dieu lui-même; il appelle antichrists, menteurs et faux prophètes ceux qui le nient, et comme ces séducteurs ennemis de la croix commençaient à mettre en avant leursdoc-trines déjà vers la fin du premier siècle, saint Jean, le dernier des écrivains du Nouveau Testament, a élevé ce boulevard inébranlable contre lequel se meurtrissent les faux théologues de nos jours.— La seconde et la troisième épître sont adressées à des particuliers ; on a voulu leur donner pour auteur un autre Jean, mais le témoignage d'irénée repousse cette supposition, et le style, comme aussi la pensée intime, affectueuse et dogmatique, rappelle la manière de saint Jean l'apôtre, celle de l'Evangile, celle de la première épître.

On a voulu entendre, par la dame élue, une Eglise particulière; d'autres même (comme Hammond) l'ont entendu de l'Eglise chrétienne tout entière. Ce sont des jeux d'esprit. Le plus simple est de prendre les mots pour ce qu'ils sont, et de voir dans cette dame une dame, et dans ses enfants des enfants; l'épithète élue se rapporte soit à quelque distinction terrestre, soit plutôt à l'élection du Sauveur. L'époque de la rédaction est incertaine, mais elle se place dans la vieillesse de l'apôtre.

La troisième épître enfin est adressée à un certain Gaïus, qui paraît avoir été converti par l'apôtre, v. 4., et qui est aussi différent du Gaïus dont il est parlé Rom. 16, 23. 1 Cor. 1,14., lequel était un enfant spirituel de Paul. Date incertaine; probablement contemporaine de la seconde. Jean loue Gaïus de l'accueil bienveillant et hospitalier qu'il accorde aux frères missionnaires, et il blâme la conduite d'un certain Diotrèphe, orateur, s'é-vaporant en mauvais discours, inhospitalier pour son compte, et cherchant à pro-pagersa présomptueuse intolérance, parce qu'il aime à être le premier. Apocalypse, v. cet article. 3° Jean, Act 4, 6., sacrificateur, peut-être le fils d'Anne, dont Josèphe parle à plusieurs reprises. 11 est nommé parmi ceux qui assistèrent à la comparution de Pierre et Jean devant le conseil, après la guérison de l'impotent. 4° Jean. v. Marc.

JEANNE, Luc 8, 3., épouse de Chuzas et l'une des pieuses femmes qui ont consacré, pendant plus de trois années, une partie de leur fortune à l'entretien du Christ et des douze missionnaires qui voyageaient avec lui. Fidèle au Sauveur jusqu'à sa mort, elle vint lui faire une visite au sépulcre avec Marie Madeleine et les autres amies de Jésus, et ne l'ayant pas trouvé, elles allèrent raconter en-sembleaux apôtres l'apparition des anges, les paroles qu'ils leur avaient dites, et la résurrection de leur maître, Luc 24,10.

JÉBUS, Jébusiens, Gen. 10,16., peuplade de la famille des Cananéens. Lors de l'entrée des Israélites en Palestine, ils occupaient, avec les Héthiens et les autres tribus de la même race, les montagnes situées entre le Jourdain et la Méditerranée, ÏN'omb. 13, 30. Jos. 9,1.11, 3. lisse gouvernaient monarchiquement, Jos. 10, 1. 23. Ils s'allièrent à Jabin, roi de Hat-sor, pour faire la guerre à Israël, mais Jo-sué les défit après plusieurs batailles, et les mit pour plusieurs années hors d'état de recommencer, Jos. 11, cf. 24,11. Quant à Jébus, leur ville principale, celle qui porta plus tard le nom de Jérusalem (cf.), il ne paraît pas que Josué ait entrepris de la réduire, et dans tous les cas elle resta au pouvoir des Jébusiens jusqu'aux jours de David, qui en fit la capitale de son royaume, Jos. 15, 8. 63. 18, 28.2 Sam. S, 6. 1 Chr. 11,4. Sous les juges, les Jébusiens apparaissent comme la plus forte des tribus cananéennes, Jug. 19,11.; un petit nombre d'Israélites seulement réussissent à s'établir dans leur ville, Jug. 1, 21. cf. 3, S. ; même lorsque Jébus est conquise, les Jébusiens ne peu-vent en être entièrement chassés, 2 Sam. 24,16.18.,etSalomon doit encore lutter avec eux pour achever de les soumettre au tribut, 1 Rois 9, 20. On retrouve des Jébusiens jusqu'après l'exil, Esd. 9,1.

JÉCHONIAS (que l'Eternel établit), fils de Jéhojakim et petit-fils de Josias, portait aussi les noms de Chonja et de Jého-jachin, 1 Chr. 3, 16. Mat1, 12. 2 Rois 24, 6. 2 Chr. 36, 8. 11 fut, dès l'âge de huit ans, associé au trône de son père, avec qui il régna dix ans, puis il lui succéda, mais seulement pour trois mois et dix jours. Il fit le mal comme son père et fut puni comme lui. Jérémie lui fil révéler par deux fois les malheurs qui devaient fondre sur lui (13, 18. 22, 24.) ; bientôt ces oracles s'accomplirent : Jéchonias fut assiégé par Nébucadnetsar, pris avec sa famille et les principaux d'entre les Juifs, et conduit à Babylone, où il demeura trente-six ans dans une dure captivité, jusqu'à ce qu'à la mort de Nébucadnetsar Evil-mérodac le sortit de sa prison, le traita avec honneur, et le mit au-dessus des autres rois qui étaient comme lui captifs à Babylone, 2 Rois 25, 27. Jér. 52, 31. On peut croire, par l'heureux changement qu'il éprouva dans son extérieur, que l'épreuve lui avait été salutaire, et qu'il s'est tourné vers Dieu en se repentant de ses fautes. Son nom se trouve encore Ez. 4, 2. Est. 2, 6. Jér. 24,1. 28, 4.29,2.37, 1. v. Jésus et Salathiel.

JÉDAHIA. v. Heldaï.

JEDDO. v. Hiddo.

JEDIDJA, 2 Sam. 12, 25., un desnoms de Salomon, cf. Il signifie aimé de Dieu. v. verset 24.

JÉDUTHUN. v. Asaph.

JÉHIEL, 1°Rubénite, 1 Chr. 5, 7.-2° Benjamite et fondateur de Gabaon. 1 Chr. 9, 35. 8, 29. Peut-être ne fut-il que le chef des Benjamites qui s'établirent dans cet endroit.

JËHOACHAZ (que l'Eternel possède), '1° v. Achazia. 2° Jéhoachaz ou Sallnm, 1 Bois 23, 30. 2 Chr. 36, 4. cf. 1 Chr. 3, 15. Jér. 22, I1., fils de Josias (probablement le second, mais en tout cas ni l'aîné ni le plus jeune), et son successeur au trône de Juda, fut le dix-septième roi de ce pays (611 av. C). Il fut appelé par le peuple à porter une couronne que sa naissance ne lui donnait pas ; il fut sacré à Jérusalem, mais il suivit les égarements de ses ancêtres, et rétablit les idoles que son père avait renversées. Son règne fut court ; au bout de trois mois il fut fait prisonnier, emprisonné d'abord à Ribla, en Syrie, puis emmené en Egypte par Pharaon iS'éco. Sophonie, contemporain de Jéhoachaz, fait de l'état moral de Juda un tableau qui laisse facilement comprendre comment, après les mesures pieuses et réformatrices de Josias, l'idolâtrie et l'impiété purent cependant éclater de nouveau avec tant de force dans ce malheureux pays. —C'est peut-être de Jéhoachaz qu'Ezéchiel a voulu parler, 19, 3., sous l'emblème d'un lionceau.

3° Jéhoachaz, 2 Chr. 25, 17., ou plus ordinairement Joachaz, onzième roi d'Israël, fils et successeur de Jéhu. 11 régna dix-sept ans (836-839), 2 Bois 13,1., et paraît, d'après le verset 10, avoir admis son fils à la régence dans les dernières années de sa vie. Le royaume eut beaucoup à souffrir des invasions des Syriens (Hazaël et Benhadad), et Joachaz fut réduit à la dernière extrémité ; il comprit alors qu'il s'était attiré ces malheurs par ses fautes, et parce qu'il avait suivi en toutes choses les traces de son père ; il s'humilia, il implora le pardon de l'Eternel, et quoique sa conversion fût bien imparfaite, Dieu daigna y avoir égard, et lui accorda quelque repos. Son fils Joas lui succéda et rétablit la prospérité du pays. cf. 2 iîois 14, I. 2 Chr. 25, 17.

JÉHOJADAH (que l'Eternel connaît), ou Joad, 2 Rois 11, 4. 2 Chr. 23, I., etc. souverain sacrificateur, successeurdeHa-zaria, époux de Jéhosébah, et père de Za-charie. H vécut aux jours d'Achazia et d'Hatalie, et put soustraire à leur fureur le jeune Joas, neveu de son épouse et dernier rejeton de la race royale de David. L'enfant, encore à la mamelle, fui caché dans le temple avec sa nourrice (884 av. C), et ce n'est que dans la septième année que Jéhojadah crut pouvoir le révéler à sa nation, et renverser ainsi du même coup l'usurpatrice et les idoles. La conjuration théocratique réussit, et le peuple retrouva son Dieu avec son roi. Le temple de Bahal fut démoli ; Jéhojadah rappela l'alliance de l'Eternel avec le roi et le peuple, et aussi longtemps qu'il vécut le royaume prospéra, parce que le peuple fut fidèle à son Dieu. Il résolut de faire au temple des réparations devenues nécessaires, par suite d'un long abandon, et il lit amasser pour cela des sommes considérables dans toutes les villes de Juda ; mais ce projet ne se réalisa entièrement que lorsque le roi, devenu majeur, put joindre son autorité à celle du souverain pontife, et presser les lévites trop indolents. La régence de Jéhojadah est justifiée et louée par ce qui est dit de Joas, qu'il fit ce qui est droit, devant l'Eternel pendant tout le temps que Jé-hojadah le sacrificateur l'enseigna : l'élève a fait 1 éloge du maître, et rien dans toute la conduite de Jéhojadah ne vient ternir la pureté de son désintéressement. Il mourut à l'âge de cent trente ans (834 av. C), et fut enseveli dans les tombeaux des rois à Jérusalem, « parce qu'il avait fait du bien en Israël envers Dieu et envers sa maison, » 2 Chr. 24,16. — Son nom ne se retrouve que Jér. 29, 26.

2° Jéhojadah ou Jojadah, Néli. 12, 10., grand sacrificateur, successeur d'Eliasib, contemporain de Néhémie. La date précise de son pontificat est inconnue comme l'année de sa mort.

JÉHOJAKIM ou Eliakim (que l'Eternel établit, ou ordonne), 1 Chr. 3, 15. 2 Rois 23, 34. 2 Chr. 36, 4., fils aîné de Josias et de Zébudda, ne monta sur le trône qu'après que son frère Jéhoachaz en eut été renversé. 11 régna onze ans (610-599) et fut d'abord tributaire du roi d'Egypte, Nécho, qui lui avait fait obtenir la couronne. Il marcha dans les voies de l'iniquité, comme faisait alors la nation toute entière. Au commencement de son règne il fit poursuivre le prophète Urie en Egypte où il s'était réfugié, il le fit périr par l'épée et refusa à son cadavre les honneurs de la sépulture, Jér. 26, 1. 21. 2 Rois 24,1. Plus tard, Jérémie remplit auprès de ce malheureux monarque les fonctions d'un fidèle interprète de la volonté divine, et n'échappa qu'avec peine et par la protection du Seigneur aux ordres donnés de l'arrêter, lui et Raruc, persécutions qui ne manquent jamais aux témoins de la vérité vis-à-vis d'une génération corrompue. Jéhojakim jette même au feu, après l'avoir déchiré avec un canif, le recueil des oracles célestes, comme l'autruche qui pense échapper aux coups du chasseur en cachant sa tête dans le buisson, comme aussi les hommes irrégénérés qui refusent de penser à la mort parce qu'elle leur fait peur. — En 606, Nébucadnetsar, corégent de son père Nabopolassar, bat les Egyptiens à Circé-sium à l'embouchure du Chaboras dans l'Euphrate, Jér. 46, 2.; il s'avance jusque près de la Méditerranée, menace Jéhojakim de l'emmener captif à Rabylone, et finit par lui laisser son trône moyennant un fort tribut ; il emporte en même temps les vases du temple, et prend en otages Daniel et ses amis. Trois ans après, en 603, Jéhojakim se révolte contre Nébu-cadnetsar, qui, trop occupé des guerres importantes qu'il livre en Orient, ne peut songer que plus tard (599) à punir la défection de son vassal. Jérusalem est prise, et son roi périt. On a, sur la mort de Jéhojakim, les quatre données suivantes, 2 I.

Rois 24, 6. 2 Chr. 36, 8. Jér. 22,19. 36, 30.; les deux dernières semblent contredire les premières; Prideaux, Jahn et Haevernick cherchent à concilier ces notices différentes, en supposant que Jéhojakim a péri pendant le siège dans une sortie dont il n'est pas parlé dans les livres historiques ; on peut cependant se passer de cette hypothèse, admettre que Jéhojakim est mort de mort naturelle à Jérusalem, et que Nébucadnetsar, à son arrivée trois mois après, irrité de ne plus pouvoir le punir vivant, l'aurait fait arracher à son tombeau et jeter hors de la ville. Le cadavre de ce roi portait la marque des incisions qu'il s'était faites en l'honneur des faux dieux ; on put lire sur son corps le sort des idolâtres. — Quant au caractère de Jéhojakim, voici le portrait qu'en fait Jérémie, 22,13-18. « Il bâtit sa maison par l'injustice, et ses étages sans droiture ; il se sert pour rien de son prochain et ne lui donne pas le salaire de son travail : tes yeux et ton cœur ne sont adonnés qu'à ton gain dés-honnête, qu'à répandre le sang innocent, qu'à faire tort et qu'à opprimer. » — Son nom se trouve encore, mais comme simple indication de date, ou accompagné du nom de son fils, Jér. 1, 3. 52, 2. 25,1. 27, 1. 24, 1.35,1.28, 4. C'est aussi lui qui est nommé Jakim, Mat 1,11., dans la seconde division de la liste généalogique du Sauveur ; l'existence de ce nom dans les premiers manuscrits n'est pas prouvée ; il est probable qu'il a été ajouté plus tard et qu'on doit le supprimer.

JÉHONADAB. o. Jonadab.

JÉHONATHAN, Jér. 37,15. 38, 26., peut-être le même que Jonathan fils de Karéah, 40, 8., un des secrétaires de Sé-décias ; il laissa changer sa maison en prison pour y retenir dans les fers Jérémie qu'il haïssait. Le prophète maltraité supplia le roi de lui donner un autre logement, soit que la prison fût malsaine, soit que Jérémie eût à se plaindre du geôlier; en tout cas il dit que s'il devait y rester ce serait pour y mourir.

JÉHOSËBAH, femme de Jéhojadah le souverain sacrificateur, cf., et tante du roi Joas ; fille de Joram, probablement par une autre femme que Hathalie, et sœur d'Achazia. On ignore l'époque de sa mort.

JÉHOSUAH. v. Jésuah.

JÉHOTSADAK ou Jotsadak, Lévite et membre de la famille sacerdotale, suivit à Ribla son père Séraja, le dernier des souverains sacrificateurs avant l'exil de Juda ; il ne paraît pas avoir lui-même exercé ces fonctions, à cause du malheur des temps où il vécut; mais Jésuah, son fils, qui survécut à la captivité, reprit avec ses droits l'exercice de ses devoirs, 1 Chr. 6, 15. Esd. 3, 2. 5, 2. Néh. 12, 26. Agg. 4,1. Zach. 6,11.

JÉHU. 1° Prophète, et fils de Hanani le prophète (953 av. C). On ne sait autre chose de lui sinon qu'il exerça son ministère au temps de Bahasa, roi d'Israël,

1 Rois 16,1. 7.12., et que Dieu l'employa encore un demi-siècle plus tard pour porter au roi de Juda, Josaphat, un message à la fois de reproche et de pardon,

2 Chr. 19, 2. Il est aussi nommé 2 Chr. 20, 34., comme auteur d'un ouvrage historique. Enfin, selon quelques personnes, il faudrait lire Jéhu au lieu d'Elie dans le passage 2 Chr. 21,12., parce que Elie était déjà monté au ciel avant le règne de Joram.

2° Jéhu, dixième roi d'Israël, occupa le trône pendant vingt-huit ans (884-856). D'abord simple officier de l'armée de Joram, il avait été désigné comme successeur de ce roi par l'onction sainte que le prophète Elisée lui avait administrée de la part de l'Eternel, 1 Rois 19, 16. Mais une impatience charnelle, et le manque de foi, le portèrent à presser l'exécution du décret divin qui le destinait à fonder une nouvelle dynastie, et il se fraya le chemin du trône par l'assassinat. 11 exécuta l'extirpation de la famille d'A-chab et de tous les serviteurs de Bahal avec une énergie foudroyante ; il fut dans la main de Dieu un instrument de destruction, mais lui-même éta>t loin d'être droit dans ses voies. Il abolit le cuite extérieur de Bahal, mais l'idolâtrie resta dans les cœurs, et lui-même adora les veaux d'or, comme firent aussi ses successeurs. Dieu donna en conséquence de mauvais jours à Israël, et pour déraciner l'idolâtrie par les tribulations et les calamités, il permit que les Syriens, conduits par Hazaël, inquiétassent les dernières années de ce règne, vainquissent les Israélites, et s'emparassent de tout le pays situé au delà du Jourdain. Quant aux détails de l'usurpation de Jéhu et à la manière dont elle s'accomplit, il faut lire 2 Rois 9 et 10,; aucun récit ne saurait être plus concis, plus énergique, plus rapide, que le récit de l'historien sacré. Le nom de Jéhu se retrouve 2 Rois 12, 1.13,1. 14, 8. 2 Chr. 23, 17. Os. 1,4.

JÉHUCAL ou Jucal, Jér. 37, 3. (587 ans av. C), un des officiers de Sédécias, fut envoyé par son maître auprès de Jé-rémie pour lui demander ses prières ; le prophète lui fit annoncer le retour des Caldéens et la prise de Jérusalem. Jucal se joignit alors à ceux qui demandèrent au roi la mort de Jérémie, parce que ses oracles tendaient à décourager le peuple, 38, 1. 4.

JÉHUDI, Jér. 36,14. 21., un des officiers de Jéhojakim, fut chargé par le roi d'aller demander à Baruch le terrible rouleau ; ce fut lui qui en commença la lecture, mais lorsque le roi osa porter sur le saint livre une main sacrilège, Jéhudi n'osa pas s'y opposer, il laissa faire.

JÉKABTSÉEL, Néh. 11, 25., ou simplement Kabtséei, Jos. 15, 21. 2 Sam. 23, 20., ville de ia tribu de Juda sur les frontières de l'idumée,

JÉKUTH1EL, 1 Chr. 4,18. Jos. 15,34., de la tribu de Auda, chef de Zanoah ; du reste, inconnu.

JÉM1MA, Ketsiha et Kéren-Happuch, Job 42, 14., noms ou surnoms des trois filles de Job; le premier signifie belle comme le jour, le second, la casse, cf., et le troisième, corne de parfums, v. Antimoine. Ces noms, tout à fait dans le goût oriental, indiquent la grande beauté des jeunes filles. Il est dit qu'elles eurent une part dans l'héritage de leur père, ce qui n'avait lieu que lorsque le père de famille était très riche. On remarque aussi avec surprise que les filles seules sont nommées, tandis que les fils de Job ne le sont pas ; il est difficile de se rendre compte de cette anomalie, dans l'archéologie du livre de Job. JËMLNI. v. Benjamin. JEPHTHÉ, Jug. 11,1. (1188 av. C.) Ce

neuvième juge d'Israël était l'enfant illégitime de Galaad et d'une de ses concubines. Repoussé de la famille par la flétrissure de sa naissance, il vécut longtemps en aventurier dans les solitudes de Tob en Syrie ; mais son pays eut besoin de lui, les Hammonites s'étaient avancés contre Galaad, et Jephthé consentit à les repousser, à condition que le pouvoir lui restât, s'il était vainqueur : il le fut; le guerrier devint juge du pays, mais le père dut offrir en sacrifice sa fille qu'il avait vouée aux dieux païens. Après cette victoire, si tristement couronnée, Jephthé fut appelé à une victoire également triste sur ses frères d'Ephraïm, qui s'élevèrent contre lui, redoutant sa supériorité ; les négociations qu'il entama avec eux, et les explications qu'il leur donna n'ayant amené aucun résultat, il dut prendre les armes, et les vainquit ; 42,000 hommes périrent dans cette guerre. Dès lors Jephthé jugea en paix Israël pendant six ans, puis il mourut et fut enseveli en Galaad. Son nom est rappelé dans un discours de Samuel, 1 Sam. 12, 11., et dans l'épître aux Hébreux, 11, 32. Les diverses questions que soulève l'histoire de ce chef célèbre sont examinées dans mes Juges d'Isr.,p. 86-95. On y trouvera aussi une poésie de M. le pasteur Fréd. Chavannes, le Dernier Chant de la fille de Jephthé.

JÉRAH, Gen. 10, 26., Joktanide nommé entre Hatsarmaveth et Hadoram ; inconnu. Jérah signifie, en hébreu, la lune, et se retrouve également dans le nom de Jérico, d'où quelques targums ont voulu induire que Jérah avait été le fondateur de cette ville, mais c'est une explication qui ne peut se soutenir. Michaélis, avec plus de raison, quoique l'on ne puisse rien décider, pense à la côte et à la montagne de la Lune, en Arabie, près la mer des Indes.

JÉRAHMÉEL. 1° Fils de Kis, 1 Chr. 24, 29. — 2° Fils aîné de Hetsron, frère de Ram et de Célubaï, de la tribu de Ju-da, I Chr. 2, 9. 25. 26.27. — 3° District de la partie méridionale de Juda; il fut occupé sans doute par les descendants du fils de Hetsron, 1 Sam. 27, 10. 30,29. JÉRED,1°v. Jared. 2° Jéred, père de

Guédor, de même que Pénuël, 1 Chr. 4, 18. 4. Ils étaient de,1a tribu de Juda, et paraissent avoir été fondateurs ou princes de la ville de Guédor, mais on ignore l'époque à laquelle ils vécurent.

JÉRÉMIE. 1”Prophète hébreu, fils de Hilkija, de la race sacerdotale, natif de Hanathoth, dans la tribu de Benjamin, Jér. 1, 1. 32, 8. Sa vocation était déjà annoncée avant sa naissance, et fort jeune encore, âgé de quatorze ans à peine.il commença l'exercice de son ministère dans la treizième année du roi Josias (628-627 av. C). Il demeura jusque près de sa fin à Jérusalem, seul, sans famille (16, 2.), presque sans amis, annonçant le malheur à ses concitoyens, qui ne s'en effrayaient pas; le bonheur, et ils refusaient d'y croire. Presque toujours menaçant dans ses prophéties, il vit presque toujours les hommes répondre à ses oracles par des menaces ou de mauvais traitements ; il dut pleurer sur lui-même en pleurant sur les autres, mais il ne sut jamais faiblir ni déguiser la vérité, quelles que fussent les prières ou les menaces. Il ne se laissa pas décourager par l'opiniâtre résistance, ni aigrir par la malveillante fureur de ses ennemis ; il les aimait, il les plaignait, et ne cessa de les conjurer de chercher leur bonheur dans l'accomplissement de la volonté divine ; dévoué à son pays, à cette Judée qui le persécutait, il resta le témoin infatigable de la vérité, l'ennemi, toujours ferme dans sa modération, de l'erreur, de l'incrédulité, de l'obstination ; il remplit dignement sa mission d'ambassadeur des cieux, et fut en Juda comme un homme d'un autre monde ou d'un autre temps. Sa vie a été remplie d'événements, et n'en est pas moins monotone, parce que ces événements se ressemblent tous, ils se passent tous dans la sphère de la fidélité d'une part, de la persécution de l'autre. Il commença sous le règne de Josias et continua sous Jéhoachaz, Jéhojakim, Jé-chonias et Sédécias. Après avoir prophétisé d'abord à Hanathoth, il se rendit à Jérusalem, 11, 21. 22. cf. 12, 5. 6., et l'on ne connaît aucun détail de son histoire jusqu'en la quatrième année de Jéhojakim, où il faillit périr pour avoir

annoncé la destruction de Jérusalem et du temple, Jér. 26. Sous Jéchonias il prophétise encore, 2 Chr. 36, 12., mais son ministère n'est interrompu, ni signalé par aucun événement. Enfin, sous Sédécias, à l'approche des grands malheurs de Jérusalem, il parle avec plus de force encore, avec plus de clarté, ses oracles sont plus effrayants, et les persécutions redoublent, Jér. 11 et 12. Ceux de Hanathoth même, sa ville natale, s'élèvent contre lui, 11, 21.; plus tard il est renfermé dans la maison de Jéhonathan, 37 et 38., parce qu'il a voulu quitter Jérusalem qui s'est rebellée contre le roi de Bab^lone, malgré les conseils et les oracles du prophète. Conduit devant Sé-décias, il lui réitère l'annonce des mêmes malheurs, et obtient une autre prison moins dure, un geôlier moins sévère, 37, 17. Ses ennemis, irrités du changement qui s'est opéré dans sa position, demandent sa mort à Sédécias; le prophète est jeté dans une fosse boueuse où il eût péri si Dieu n'eût veillé sur ses jours, et ne l'eût sauvé par le moyen d'Hébed-Melec, 39, 18. Enfin Jérusalem est prise, et Jérémie trouve dans le malheur public son entière liberté; le roi païen le sauve quand les rois juifs l'ont persécuté; et si Jérémie est un instant, par mégarde, chargé de chaînes et conduit à Rama, il est bientôt remis en liberté par ordre de JSébuzaradan, et pré-fère rester dans sa patrie que de suivre les vainqueurs à Babylone, où de grands honneurs lui sont promis. Un parti était resté en Judée, celui de Johannan, qui projetait d'aller chercher en Egypte une patrie nouvelle, un asile contre de nouvelles invasions ; ils s'adressent à Jérémie pour faire légitimer leur résolution par un oracle, mais le prophète cherche à le£ en dissuader, chap. 42 et 43. La foule se tourne également vers l'Egypte, on émigré en masse, et plutôt que d'abandonner ces malheureux, le prophète les accompagne et cherche, mais en vain, à les préserver de l'idolâtrie et surtout du culte des astres. Ici s'arrête son histoire; le lieu et l'époque de sa mort sont inconnus. Il est probable qu'il est mort à Taphnès; d'autres montrent son tombeau au Caire ; quelques-uns pensent qu'il est revenu en Judée ; quelques pères enfin, s'appuyant sur Mat 16, 14., pensent qu'il n'est pas mort, mais qu'il a été enlevé au ciel comme Elie.

Prophéties. Les oracles de Jérémie sont en général écrits dans un style large et abondant, moins obscur que celui de la plupart des autres prophètes. Les emblèmes y abondent, mais s'expliquent facilement: celui du potier qui, d'un vase brisé, en reforme un autre, annonce aux Juifs que Dieu peut détruire leur race perverse pour se faire un autre peuple obéissant et fidèle, 18, 2. ; ailleurs c'est un pot de terre que le prophète met lui-même en pièces dans la vallée de Hinnom, 19, 1. ; ailleurs, un joug chargé de liens, qu'il porte sur son cou, 27 et 28.; ou bien, l'achat d'une propriété, 32, 7.; ou encore, une ceinture de lin qu'il cache dans une des cavernes de l'Euphrate, 13, 1. C'est également comme symbole qu'il fait appeler devant lui les Récabites, 35,1. Les oracles de Jérémie ont été réunis sans égard à la chronologie, et il règne dans leur arrangement un pêle-mêle qu'il est plus facile d'apercevoir que de débrouiller. Abarbanel a dit que c'était un livre qu'il fallait lire sens devant derrière (priùs posteriùs et posteriùs priùs). On a fait beaucoup de travaux pour essayer de rétablir ces oracles dans l'ordre dans lequel ils ont été prononcés; le commentaire français de Dahler est à cet égard un des meilleurs, comme il est en général utile à consulter sur toutes les difficultés relatives aux temps et aux prophéties de Jérémie. En anglais, un des meilleurs ouvrages est celui du docteur Blayney. Voici comment il fixe la suite des chapitres : 1° les prophéties qui ont été prononcées sous le règne de Josias 4-12; 2° celles qui ont été prononcées sous Jéhojakim 13-20 ; 22; 23; 35; 36; 43-48; 49, 1-33; 3° sous Sédécias, 24 ; 24; 27-34; 37-39; 49, 34-39; 30; 31 ; 4° celles qui furent prononcées pendant le gouvernement de Guédalia, depuis la prise de Jérusalem jusqu'au départ du peuple pour l'Egypte, 40-44. On doit remarquer comme plus particulièrement messianiques les passages 23, 5. 6., où Christ est appelé l'Eternel notre Justice ; et 31, 31-36. 33, 8., qui annoncent l'efficace de l'expiation faite par la mort de Jésus, le caractère spirituel de la nouvelle alliance, et l'influence profonde et intérieure de l'Evangile, cf. Hébr. 8, 8-13. 10, 16.—Le prophète Jérémie est cité, Mat 27, 9., au lieu de Zacharie, 11,12., soit que Jérémie, étant l'un des plus importants des prophètes, eût donné son nom comme titre général au recueil de toutes les prophéties, soit qu'il y ait eu une faute ou une addition de copiste, ou un manque de mémoire chez saint Matthieu, soit enfin par une confusion (appelée synchyse) de deux passages en un seul, cf. le passage cité de Zacharie avec Jér. 32, qui n'est pas sans analogie matérielle avec Mat 27. On peut opter entre ces divers moyens de conciliation; il y en a encore treize autres à ma connaissance.

Lamentations. Recueil de cinq chapitres, contenant autant de chants ou élégies dans lesquels le prophète déplore les diverses calamités qui ont affligé sa patrie ; le cinquième est un épilogue ajouté aux quatre premiers chants. Jérémie est auprès de Dieu l'interprète du peuple qui demande le pardon de ses péchés et la restauration d'Israël. Quelques anciens auteurs pensent que c'est des Lamentations qu'il est parlé 2 Chr. 35, 25. (Josèphe, saint Jérôme, OEcolampade), mais il paraît évident que le chant funèbre prononcé sur la mort de Josias, est un autre ouvrage de Jérémie qui ne doit pas être confondu avec les Lamentations, et Calvin appelle ce sentiment une grossière erreur (crassum ; v. aussi Bullin-ger). Jarchi veut encore que les Lamentations soient le livre qui a été écrit par Baruc, sous la dictée de Jérémie, après que Jéhojakim dans sa stupide fureur en eut jeté au feu le premier rouleau ; mais le contenu des Lamentations n'est pas en accord avec ce qui est dit, Jér. 36, 2., des choses renfermées dans le livre dicté à Baruc ; peut-être y a-t-il une allusion à ce livre à la fin de 36, 32., mais on n'en sait rien. L'époque de la rédaction est inconnue ; les Septante et la version arabe disent que Jérémie l'écrivit pendant la captivité et sur les ruines de Jérusalem abandonnée. Les quatre premiers chapitres sont composés de strophes acrostiches suivant l'ordre alphabétique ; au chapitre 3 les strophes sont de trois versets : ce même genre de poésie se retrouve d'ans quelques psaumes et dans quelques chapitres des Proverbes ; l'auteur sacré, en y ayant égard, a consulté peut-être le goût de son temps, peut-être aussi la mémoire de ceux à qui s'adressaient ses chants. Pour un autre ordre on ne saurait en chercher; le prophète s'abandonne à ses sentiments douloureux plus qu'il ne s'attache à leur donner une forme, et ses plaintes ne sont pas un discours ; l'espérance qui le soutient au milieu de ses peines, c'est la pensée que lors même que la terre est déserte et le temple détruit, Dieu règne encore et peut contracter avec son peuple une alliance nouvelle, pleine de grâce, pourvu que le peuple retourne à Dieu par un repentir sincère et véritable.

Le nom et les prophéties de Jérémie sont rappelés, 2 Chr. 36, 21. Esd. 1,1. Dan. 9, 2. cf. Jér. 25,12. 29,10.

L'Ecriture sainte mentionne encore d'autres hommes de ce nom : le père de Hamutal, épouse de Josias, 2 Rois24,18.; un vaillant chef de la tribu de Manassé, 1 Chr. 5, 24.; enfin deux héros de l'armée de David, 1 Chr. 12, 4.10.13.

JÉRICO ou Jéricho, ville de la tribu de Benjamin sur les frontières d'Ephraïm, à 8 kilom. du Jourdain, et à 28 de Jérusalem, dont elle était séparée par une contrée rocheuse et déserte, Jos. 16,7.18, 21. C'est peut-être à cause de cette circonstance que Jésus a placé entre ces deux villes la scène du Samaritain miséricordieux, Luc 10, 30. Les environs de Jérico, véritable oasis au milieu des sa- . blés de la solitude, bornés à l'ouest comme en amphithéâtre par des montagnes 'calcaires, hautes et sans verdure, étaient fécondés par de riants cours d'eau, et extrêmement fertiles. Ils produisaient surtout des palmiers, dont la ville a pris son nom, Deu 34, 3. Jug. 1,16. 3, 13. On y trouvait également des rosiers et du baume odoriférant ; ( le nom de Jérico peut se dériver à cause de cela de l'hébreu riach, sentir, en allemand riechen ; d'autres le dérivent de yérach, v. Jérah; ce serait ville de la lune) : le miel y abondait et le climat était délicieux ; tout était réuni pour en faire un paradis terrestre, excepté les serpents venimeux qui y foisonnaient. Jérico, déjà construite et fortifiée lors de l'entrée des Israélites en Canaan, fut leur première conquête ; ils la détruisirent, et Josué la voua à l'interdit, défendit de la rebâtir, et annonça que celui qui braverait sur ce pas les menaces divines, y perdrait successivement l'aîné et le second de ses fils ; Hiel fut assez malheureux, 537 ans plus tard, pour oser s'exposer à cette terrible épreuve, et il y succomba, 1 Rois 16, 34. Entre ces deux époques cependant, le nom de Jérico n'est pas perdu : cette ville est nommée comme existant, Jos. 18,21. Hé-glon, roi de Moab, y possède un palais, Jug. 3, 20., et les ambassadeurs de David, outragés par Hanun, s'y retirent pour laisser croître leur barbe, 2 Sam. 10, 5. 1 Chr. 19, 5. On peut croire que dans le premier de ces passages, il ne s'agit que du territoire de la ville ; dans les autres, il s'agit plutôt d'un hameau reconstruit non loin de l'emplacement de la précédente Jérico, hameau qu'un roi païen aura pris comme un lieu de plaisance, où il se sera établi avec quelques sujets, et qu'on ne saurait confondre avec la ville proprement dite, dont le réta-blissement avait été défendu aux Israélites seulement. Josèphe distingue clairement les deux villes (Guer. des Juifs, 5, 4.). Depuis Hiel, l'ancienne Jérico rentra dans le domaine public, et personne ne craignit plus d'y demeurer ; Achab la fit fortifier; une école de prophètes s'y établit, 2 Rois 2, 4., et on la revoit encore après l'exil, Esd. 2, 34. Néh. 7, 36. Elle fut embellie par Hérode, qui y fit construire un magnifique palais, et l'éleva au-dessus des plus belles villes de son royaume ; il y fit noyer son beau-père le sacrificateur Aristobule, et lui-même y mourut. Notre Sauveur à fait quelques miracles à Jérico, et il y visita Zachée qui était à la tête des péages que les Romains avaient établis sur le commerce du baume, Luc 19,1. On trouve encore sous le nom de Richa les ruines de cette ancienne ville, mais ce n'est plus qu'un méchant village ; au douzième siècle déjà, Phocas dit qu'il en restait à peine quelques traces. — Quant*à l'assainissement des eaux de Jérico, 2 Rois 2,19., on ne peut y voir qu'un miracle. Ces eaux étaient rendues amères, salées, peut-être par le voisinage de la mer Morte, et le prophète les rendit saines et potables en jetant du sel sur la source, et en annonçant de la part de Dieu qu'elles cesseraient d'être insalubres, bénédiction que Dieu seul pouvait donner, secret que les hommes n'ont jamais connu.

JÉROBOAM (dont le peuple est nombreux). 1° Jéroboam I, fondateur du royaume des dix tribus, sur lequel il ré-gna vingt-deux ans, 975-954. Fils de Né-bat et de Tséruha, il appartenait par sa naissance à la grosse et jalouse tribu d'E-phraïm ; il remplit sous Salomon, les fonctions d'inspecteur des travaux publics dans la tribu de Joseph, (Ephraïm et Ma-nassé); nul doute que pendant ce temps, et grâce à sa position, il n'ait eu souvent l'occasion de prêter l'oreille aux mécontents et de leur servir d'appui et de centre de ralliement. Dieu qui avait annoncé à Salomon la division de son royaume comme châtiment de ses péchés, et qui voulait se servir de Jéroboam pour accomplir cette révolution, lui fit révéler par le prophète Ahija les hautes dignités qui lui étaient réservées. Jéroboam, pressé de jouir du trône, conspire, mais ses complots sont découverts, et pour éviter le ressentiment du roi, il doit s'enfuir en Egypte à la cour de Sisak ; après la mort de Salomon il ne tarde pas à être rappelé par son parti, et comme Roboam refuse de supprimer ou de diminuer les impôts, et d'alléger les charges du peuple, Jéro-boam est proclamé roi des dix tribus, et le schisme s'opère. Jéroboam choisit pour capitale de son royaume Sichem d'abord, puis Tirtsa ; pour consolider sa puissance il commence par faire fortifier plusieurs villes, Sichem et Pénuel, et craignant l'influence des souvenirs religieux, il change par politique la religion de son peuple, brise les liens religieux si forts qui unissent encore ses nouveaux sujets à Jérusalem la capitale du royaume rival : les grandes fêtes les y appelaient trois fois l'an, ces voyages eussent pu tôt ou tard les rattacher à la dynastie légitime, il faut à tout prix les prévenir. C'est à quoi il parvint en établissant aux deux extrémités de son royaume, à Dan et à Béthel, le culte du veau d'or, prodigieux acheminement à l'idolâtrie, et en faisant desservir ce nouveau culte par des personnes qui n'appartenaient pas à la tribu de Lévi ; il maintint ces mesures impies, ces innovations antithéocratiques, malgré les avertissements des prophètes, malgré leurs miracles, 1 Rois 13, et ne se laissa pas même toucher par la mort prématurée de son fils Abija, bien qu'à cette occasion il eût paru vouloir se rapprocher un instant du vrai Dieu, 14,1. Enfin, comme il était assez naturel de s'y attendre, il ne donna pas la paix à son pays, et fut, pendant tout le temps de son règne, en guerre avec Roboam, roi de Juda, et avec son successeur, 1 Rois 11 -15,2 Chr. 10-13. Son histoire à été écrite par le prophète Jiddo, 2 Chr. 9, 29.

2° Jéroboam II, treizième roi d'Israël, fils de Joas, régna sur Israël pendant cinquante etun ans, 825-784. Par ses richesses et de nouvelles conquêtes qu'il fit sur les Syriens, auxquels il reprit Damas et Hamath, il éleva au plushaut degré de puissance et de splendeur le royaume que son père avait déjà laissé dans la plus florissante prospérité ; il lui rendit ses anciennes limites orientales, et parut béni de Dieu. Mais en même temps le luxe et la corruption des mœurs firent de nouveaux progrès, et le culte du veau d'or fut maintenu comme sous le premier Jéroboam, ainsi qu'on peut le voir par la lecture des prophètes contemporains Amos et Osée. Après lui, Israël ne fit quedécliner, 2Rois

13, 13. 14,23-29.

JÉRUBBAHAL et Jérubbéseth. v. Gédéon.

JÉRUSALEM. Cette ville célèbre a porté différents noms, d'abord Jébus, Jug. 19, 10.1 Chr. 41,4., puis, poétiquement, Salem, Ps. 76, 2., et dans le sens religieux ville sainte, ville de Dieu (Hiéropolis), Néh. 11, 1. 18. Mat 4, 5., ou ville de justice (Sédec), et enfin Jérusalem, qui est

son nom le plus ordinaire, celui qu'elle porta depuis que David en eut fait la capitale de son royaume. Elle était située à 8 milles de Joppe et à 5 du Jourdain, sur un plateau assez élevé au-dessus du reste du pays, ce qui explique la locution monter à Jérusalem, employée par les Juifs de toutes les tribus. Son sol était pierreux et calcaire, mais très fertile.

Primitivement, et lorsqu'elle appartenait encore aux rois de Canaan, Jos. 10, 1. 23., elle n'occupait que la colline de Sion, et se composait de la citadelle très forte de ce nom, 2 Sam. 5, 7., et de la ville proprement dite. Cette dernière avait déjà été prise et habitée, concurremment avec les Jébusiens, par les hommes de Juda et de Benjamin, à l'époque des Juges, Jos. 15, 63. Jug. 1,21. cf. 1 Sam. 17, 34.; mais la forteresse opposa toujours aux Israélites, jusqu'aux jours de David, la plus vigoureuse résistance. David réussit enfin à s'en emparer, 2 Sam. 5, 6.; il y fixa sa résidence, et la nomma de son nom, cité de David, 2 Sam. S, 7. 9. 6, 12. 16. 1 Rois 3,1. 8, 1. 2 Rois 9, 28. 14, 20. cf. Néh. 12, 37. Dès lors Jérusalem fut le centre politique et religieux du royaume; elle prit un accroissement considérable. Salomon la fortifia, I Rois 3, 1. 9, 15.; il y fit élever le temple sur la colline deMo-rija, I Rois 6, et se construisit à lui-même un palais magnifique, 1 Rois 3, t. 9, 15. Hosias, Jotbam, Ezéchias et Manassé l'agrandirent encore et continuèrent de la fortifier, 2 Chr. 26,9. 27, 3. 32,5. 33, 14. Elle n'en succomba pas moins dans plusieurs sièges, 1 Rois 14, 26. 2 Rois I 4, 13., et finit par tomber entre les mains des Caldéens, qui la démolirent, 2 Rois 24, 25, (588 av. C). La Bible ne donne pas beaucoup de détails sur le genre d'ar-chitecture et le mode de construction des maisons de Jérusalem : on voit seulement que les murailles étaient garnies de tours et de créneaux, 2 Chr. 26, 9. 15. 32, 5.; l'une de ces tours est spécialement désignée, Jér. 31, 38. Zach. 14,10. Hophel et Millo paraissent avoir été comme deux forts détachés, 2 Sam. 5, 9.1 Rois 9, 24. 11,27. 2 Chr. 32, 5.27, 3. 33,14. 11 est parlé des portes delà ville Jér. 39, 4. 2 Chr. 32, 6., et les auteurs sacrés nomment la porte des poissons, 2 Chr.33,14.; cellerfucoin, 2Rois 1 4, 1 3. Zach. 44,10.; celle de Benjamin, Jér. 37, 13. 38, 7. Zach. 44, 10. ; celle A'Ephraim, 2 Rois 14,43.; la première porte, Zach. 14,10.; celle de la vallée, 2 Chr. 26, 9.; celle des chevaux, Jér. 31, 39. ; celle du potier, vers la vallée de Hinnom, Jér. 19, 2.; enfin la porte du milieu, Jér. 39, 3. Quant à leur position présumée, v. plus bas.— La haute porte de Ez. 9, 2. était, selon toute apparence, une des portes du temple. Comme places publiques, on remarque celle de la porte et celle des boulangers, 2 Chr. 32, 6. Jér. 37,21. Autour de la ville étaient deux étangs provenant de la source de Siloé, Es. 7, 3. 36, 2., et les jardins royaux qui étaient arrosés et fécondés par ces étangs, Jér. 39, 4. 32, 7. Néh. 2,14.

Une question qui ne peut se résoudre complètement est celle de savoir à laquelle des deux tribus de Juda ou de Benjamin a appartenu Jérusalem avant le temps de l'exil. D'après Jos. 18, 28. cf. 15, 8., elle a été donnée en partage aux Benjamites, et bien qu'ils soient mêlés aux Jébusiens, c'est eux que l'on y voit demeurer, Jug. 1, 21.; le passage Jér. 6, 1. confirme la même opinion. D'un autre côté, d'après Jug. 1, 8,, cesontceuxde Juda qui s'em-parent de la ville ; ce sont eux encore qui s'y mêlent aux Jébusiens, Jos. 15, 63., et le Ps.78,68. semble donner Jérusalem à cette tribu. On peut concilier ces deux versions en admettant que si les hommes de Juda ont en effet occupé la plus grande partie de Jérusalem, la ville cependant et son territoire appartenait réellement aux Benjamites, et qu'elle était située en dedans des frontières de cette tribu.

Après l'exil, et dans les premiers temps de la reconstruction de Jérusalem (536 av. C.), on trouve d'autres détails, Néh. 3, et 8. On mit sans doute à profit, pour ce nouveau travail, ce qui subsistait encore des anciens fondements et des anciennes fortifications, et l'on rebâtit les murs et les portes autant que possible sur leur emplacement primitif, cependant avec des différences amenées soit par des besoins d'agrandissement, soit par les corrections jugées bonnes, soit par la disparition des premiers tracés. Le nom des portes fut changé, et l'on en trouve douze nouvelles, mentionnées Néh. 3 et 8, : celle des eaux, des chevaux, du bercail, des poissons (Soph. 1,10.); la porte vieille (probablement la même que la première porte, Zach. 14, 10.) ; celle d'Ephraïm, Néh. 8,4 6.; celle de la vallée, Néh. 2,13. 15.; celle de la fiente, Néh. 2,13. ; celle de la fontaine, Néh. 2,14.; la porte orientale, celle de Miphkad (du conseil), et celle de la prison. Il n'est plus parlé de celles du coin, du potier et de Benjamin. (Quant aux portes mentionnées Ez. 48, 31., elles appartiennent à une vision, et sont prophétiques). On ne peut guère préciser la position de ces différentes portes; lechap. 12 de Néhémie ne donne même à cet égard que de vagues indications. Au nord-ouest, la porte du coin et celle d'Ephraïm (qui était peut-être la même que celle de Benjamin, 2 Rois 14,13. cf. Zach. 14,10.); du nord-ouest au sud-est, la vieille porte, celle des poissons et celle du bercail, Néh. 3, 1-6. 12, 39. ; entre elles étaient celle des chevaux, et celle de l'eau ; celle d'Ephraïm et la vieille porte étaient voisines, sans qu'il y en eût aucune autre entre elles, Néh. 12, 39.; du sud-ouest au nord-ouest, la porte de la fontaine (Siloé) ; celle de la fiente et celle de la vallée (Guihon) ; la porte du potier était peut-être la même que celle de la fontaine; quant à la porte du milieu, on ne la connaît pas; s'il y a eu avant l'exil une ville inférieure, on peut croire que c'est la porte qui joignait les deux villes. Les portes nommées 2 Bois 11,6.15,35. 1 Chr. 11, 18. 26, 16. 2 Chr, 23, 5. Jér. 36, 10. cf. 26,10., appartenaient au temple ou à des villes voisines.

Il n'est parlé que de deux tours sur les murailles de la ville, celle de Hananéel, et celle de Méah, Néh. 3,1. 12, 39. Zach. 14,10., toutes les deux proche de la porte du bercail, du côté de celle des poissons, vers l'est. — On ne trouve dans cette période le nom d'aucune place et d'aucune rue. La partie la plus forte de Jérusalem parait avoir été alors la cité de Sion, nommée aussi ville de David, qui avait été fortifiée par les Syriens, et que l'on regardait comme imprenable, I Macc. I, 3-5, 3, 45.

4, 2. 9, 52. 10, 6., jusqu'au moment où le prince Simon réussit à s'en emparer, 1 Macc. 14, 37.

La troisième époque est celle de Jésus et des apôtres jusqu'à Josèphe : cet historien lui-même est une source précieuse de renseignements de tous genres sur la topographie de Jérusalem aux temps qui précédèrent la conquête des Romains, et par conséquent aux temps de Jésus, puisque la ville resta à peu près la même jusqu'à sa destruction, sauf l'achèvement et la mise en état de défense de la nouvelle ville. D'après Josèphe, Jérusalem était bâtie sur quatre collines, et se composait de trois parties principales : la ville d'en haut, située vers le midi sur la colline de Sion, la plus élevée de toutes; la ville d'en bas, sur la colline d'Acra, au nord de Sion et de Morija ; la nouvelle ville, au nord, sur une colline qui était primitivement plus basse, et qui fut élevée par des travaux et des terrassements subséquents : c'est cette ville neuve que Hérode Agrippa chercha à réunir à la vieille ville. Entre la haute et la basse ville passait du nord-ouest au sud-est, jusqu'à la source de Siloé, la vallée des faiseurs de fromage (Tyropéens), devenue peu à peu une rue par les nombreuses constructions qui y furent faites. Au sud-est s'élevait le temple sur la montagne de Morija, qui touchait au nord-ouest, par la forteresse Antonia, à la ville inférieure, et communiquait par des ponts avec la ville d'en haut : cette dernière était fortifiée par une muraille garnie de soixante tours ou tourelles, dont les trois plus importantes (Hippique, Phasaël et, Marianne) avaient été élevées par Hérode le Grand, et qui formaient comme une couronne autour de la colline ; la ville d'en bas, qui touchait au sud à la ville d'en haut, était garnie d'une muraille avec quatorze tours à sa partie septentrionale ; enfin la muraille de la nouvelle ville était la plus forte et la plus solide de toutes, ayant 20 coudées ( 11 mètres) de haut, ou 23 (11m, 50) en comptant les créneaux et les parapets, et construite probablement en zigzag, puisque Josèphe lui donne quatre-vingt-dix tours, dont la principale, au nord-ouest, avait 70 coudées de haut. Vers le nord, Jérusalem avait trois rangs de murailles; le sud (Sion et Morija) n'en avait qu'un seul, ces collines étant suffisamment protégées, à l'est, au sud, et au sud-ouest, par les rapides vallées qui étaient à leur pied. On voit que Jérusalem pouvait à juste titre passer pour une forte citadelle. Josèphe lui donne une lieue et demie de tour (33 stades) Hécatée lui donne 50 stades, et une population de 120,000 âmes, chiffre bien peu élevé en comparaison de l'évaluation de Josèphe, qui porte à 2,700,000 le nombre des hommes qui se trouvaient dans la sainte cité les jours des fêtes solennelles.

Outre le temple, dont nous reparlerons en son lieu, il faut nommer parmi les édifices les plus remarquables de Jérusalem : a) La citadelle Antonia, bâtie par Jean Hyrcan, qui lui donna d'abord le nom de Baris, puis fortifiée et embellie par Hérode en l'honneur de Marc Antoine. Elle était située sur un rocher escarpé de 50 coudées de hauteur, au nord-ouest du temple, avec lequel elle communiquait par des passages dérobés ; elle présentait dans son intérieur toute l'apparence d'une ville, des places, des allées, des statues, et un grand nombre de bâtiments. Aux quatre coins étaient des tours, dont celle du sud-ouest, qui était la plus rapprochée du temple, avait 70 coudées de haut ; elle dominait ainsi non seulement le temple, mais la ville toute entière, et les Romains y entretinrent longtemps une garnison ; c'est là que Paul fut conduit et détenu, Act 21, 34.37. 22, 24.23, 10.

6) Le palais d'Hérode. magnifique bâtiment de marbre, entouré de murs de 30 coudées de hauteur, non loin des trois tours septentrionales de la ville supérieure.

c) le Xyste, grande place publique entourée d'allées et de galeries vers la partie est-nord-est de la ville d'en haut, communiquant par un pont avec le temple.

d) La tour d'Ophel, cf., vers la muraille orientale de la ville supérieure.

e) Le prétoire, v. cet article et Procurateurs.

Hérode Agrippa II semble avoir le premier imaginé le pavage des rues. Les environs de la ville, surtout vers

le nord, étaient riches en jardins et en maisons de plaisance, 2 Rois, 25, 4. Jér. 39, 4. Néh. 3, 45. : on y trouvait aussi cpielques lieux de sépulture; quant aux étangs et rivières, v. Roguel et Siloé.

Depuis l'exil, Jérusalem a été la proie des nations ; son histoire est celle de tout Israël.

Elle fut prise successivement, en 320 (ou 323), par le roi d'Egypte Ptolémée Lagus ; en 161, par Antiochus Epiphanes de Syrie; en 36 (l'an 717 de Rome), par Hérode le Grand, devenu roi des Juifs ; enfin, l'an 70 ap. C, par Titus, fils de Vespasien : massacre effroyable dans lequel périrent plus d'un million de Juifs, et dans lequel la plus belle des villes devint en peu de jours la plus mémorable des ruines. Titus laissa subsister les trois tours du nord, la muraille occidentale et quelques maisons ; mais ces débris eux-mêmes furent démolis en 136, quand Adrien eut résolu de faire construire sur l'emplacement de l'ancienne Jérusalem, une nouvelle ville sous le nom de Mlia Capitolina, et à la place du temple de Jé-hovah un temple de Jupiter; mais cette colonie militaire n'occupa jamais tout l'emplacement qu'embrassait le centre de l'israélitisme. Aujourd'hui Jérusalem n'est plus rien, c'est une ville de 4630 pas de tour, un évêché anglo-prussien, le rendez-vous de 25,000 habitants de toutes les nations et de tous les cultes; seuls ses anciens maîtres, les Juifs, y marchent en courbant la tête, honteux de s'y trouver, triste monument de la vérité des prophéties et de la ferme exécution des menaces divines.

Nommons parmi les ouvrages bons à lire pour compléter les secs et incomplets détails qui précèdent, Schubert, Chateaubriand, Lamartine, Ackermann, Keith (les Juifs d'Eur. et de Palest.), le Journ. d'un Voyage au Levant, t. III; en allemand, une intéressante monographie de Joh. Bail, Strauss (Sinai und Golgatha) ; et la thèse de M. A. Coquerel fils, qui se recommande à plus d'un titre. Il serait facile d'en ajouter d'autres, peut-être de meilleurs, mais ceux-là suffisent, et touchent, par leur diversité de but et de plan, aux divers points qui peuvent intéresser I

le géographe et le chrétien biblique.

Que sera la nouvelle Jérusalem de l'Apocalypse 21, 2. ? Cette question ne peut se traiter ici ; mais comme on ne la traite presque nulle part, il importe de la rappeler : Jérusalem sera restaurée, et deviendra de nouveau le centre du peuple de Dieu, la capitale du monde, et la résidence de celui qui aura vaincu l'Anti-christ.

JÉSABEL 1° La plus méchante peut-être de toutes les femmes qui ont jamais occupé un trône. Païenne de naissance, fille d'Ethbahal, roi de Tyr et de Sidon, elle était la sœur de Badezorin, le grand-père de Pygmalion et de Didon. Toujours adoratrice des dieux païens, dont le patronage favorisait ses voluptés et ses cruautés, elle épousa sans crainte un Juif de nom, Achab, qui lui apportait un trône et une grande tolérance pour le crime : elle sut rendre son époux plus idolâtre et plus sanguinaire encore (918 av. C). Elle jura l'extermination d'un culte qui ne pouvait être exterminé, et la mort d'un prophète, Elie, qui ne devait pas mourir. Elie réussit mieux avec Na-both, qu'elle fit tuer pour avoir sa vigne ; mais ce crime envers un homme du commun peuple ne fut pas moins enregistré devant Dieu, et Elie lui annonça que les chiens dévoreraient son corps. Achab mourut, et Jésabel vit le règne de ses deux fils, Achazia et Joram; puis vint Jéhu, l'exterminateur de sa dynastie. Le palais d'Achab était probablement près des murs de la ville, non loin du champ de Naboth : Jésabel, voyant arriver l'usurpateur, se montra tout ornée à l'une des fenêtres du palais, peut-être pour voir Jéhu, peut-être pour le braver, le séduire ou le menacer ; mais Jéhu parla, et cette odieuse femme fut précipitée dans la rue, où les chiens la dévorèrent et la firent disparaître en peu d'heures. 1 Rois 16,31. 18, 4. 19, 1. 21, 5. 2 Rois 3, 2. 9, 7. — Son nom signifie, selon les uns, l'insulaire; selon les autres, intacte, pure, une Agnès : on l'a conservé dans l'Isabelle moderne.

2° Femme de l'église de Thyatire, qui n'est connue que par la mention de l'Apoc. 2, 20. L'Esprit lui reproche ses impudici-

tés et ses doctrines idolâtres ; le nom qui lui est donné n'est probablement qu'une épithète, un souvenir de l'ancienne Jésa-bel, qu'elle rappelait par sa scandaleuse conduite. On pense que c'est une femme de haut rang, que Jean n'a pas voulu nommer.

JESSÉ. v. Isaï.

JÉSUA.B, ou Jéhosuah, Esd. 2, 2. 3, 2. i, 3. 5,2. Néh. 7, 7. 12, 1. (o36 av. C), tils de Jéhotsadak, exerça, sous Zoroba-bel, les fonctions de souverain sacrificateur, auxquelles il avait droit quoique son père n'eût pu les exercer ; il se montra digne de sa tâche, combattit les machinations des Samaritains, et travailla sans relâche à la reconstruction de Jérusalem et du temple. Son nom se retrouve Agg. 4, 1.2, 2. Zach. 3, i. 6,11. Dans ces deux derniers passages, il est nommé comme emblème du peuple, d'abord opprimé puis restauré, et il rappelle, par sa lutte avec Satan, que le véritable empire et la véritable sacriftcature d'Israël ne trouveront leur réalité qu'en Christ.

JÉSUS

Sauveur. Heb. Josuah, Yéhôshuah

1°) Jésus, fils de Sirach : Auteur du livre de l'Ecclésiastique. Il vécu sous le pharaon Grec de la dynastie des Lagides, Ptolémée Evergète.

2°)  Jésus Josué : Ce nom glorieux fait du premier Josué qui a introduit la race élue dans la Canaan terrestre, une image de Celui qui a ouvert la Canaan céleste à ceux qui croiront en Lui.

3°) Jésus-Christ : Devant ce Nom, qui est à la fois celui d'un homme et celui de Dieu manifesté en chair ; ce Nom, le seul qui ait été donné aux hommes par lequel nous puissions être sauvés; ce Nom devant lequel tout genou se plie, dans le ciel et sur la terre. Devant ce Nom la raison s'humilie dans le sentiment profond de son impuissance, et la foi, posant son doigt divin sur nos lèvres, nous invite à adorer en silence ces choses que l'oeil n'a pas vues, que l'oreille n'a pas entendues, qui ne sont pas montées au cœur de l'homme, et dans lesquelles les anges eux-mêmes désirent de regarder jusqu'au fond.

La nature de Christ et les caractères de sa mission, sa présence et son oeuvre, son apparition dans l'histoire et son rôle en dehors du temps, tout est pour la pensée une source de questions pleines d'intérêt sans doute, mais aussi pleines de mystère. Comment concevoir et définir la personnalité du Fils, ses rapports avec le Père et le Saint-Esprit, l'union de la divinité et de l'humanité dans sa personne; son œuvre de roi, de prêtre et de prophète; son origine, sa naissance, sa vie, sa mort, sa résurrection, son action dans l'Eglise et auprès du Père ; son second avènement, son règne futur ?

Que peuvent dire et la physiologie et la psychologie pour expliquer son corps et son âme ! — Ce corps formé tout à la fois et par l'influence du Saint-Esprit et dans le sein de la chair, cette âme douée de toutes les facultés, accessible à toutes les émotions humaines, et empreinte de toutes les perfections, de toute la majesté divine ; — ce corps qui, en forme de chair de péché, naît débile, croît, se développe, ressent la fatigue et la souffrance, subit la mort, mais ne peut être retenu par elle, sort du sépulcre, encore susceptible d'accomplir les fonctions animales, et pourtant échappe aux lois de la matière, et s'élève d'une manière visible vers ce royaume où la chair et le sang ne peuvent entrer; — Cette âme qui, elle aussi, se développe, croît en sagesse, souffre, se réjouit, s'attache, ressent la tentation, s'abat dans la tristesse, puis se relève triomphante au milieu de toutes les faiblesses, pure de toute souillure, et ferme, sereine, sainte, radieuse, révèle au monde l'idéal d'une grandeur humaine qui se confond avec la grandeur même de Dieu ! —Tous ces problèmes peuvent à peine être indiqués ici. Nous ne saurions songer, nous ne disons pas à les résoudre, la science de l'homme n'y suffirait pas, mais même à les examiner dans leurs détails. Ils sont d'ailleurs du ressort de la dogmatique, de la psychologie et de la philosophie, et ne sauraient être abordés dans ce travail.

Ecrire une biographie de Jésus est au dessus des force humaines. Par des motifs de convenance, plusieurs auteurs ont cru bien faire que de supprimer l'article entier ; une telle vie est trop haute, disaient-ils, et trop riche, pour qu'une plume purement humaine réussisse à en tracer un tableau satisfaisant : la main des évangélistes, guidée par l'esprit même de Christ, a pu seule se charger de ce soin. Si nous pouvons comprendre ce scrupule, nous ne pouvons le partager entièrement c'est moins cette pensée, que la considération même de l'étendue du sujet, et les développements considérables qu'il exige pour être traité d'une manière convenable. Tout l'Evangile, d'ailleurs, se résume en Jésus; en lui se résume aussi l'histoire de ceux qui l'ont vu, annoncé, accompagné et prêché; sa vie se rattache à une foule d'hommes et de faits qui trouvent déjà leur place ailleurs, et qui, se reproduisant ici, feraient nécessairement double emploi.

1° Le nom de Jésus signifie Sauveur; le nom de Christ signifie oint : ce sont à la fois des noms propres et des noms d'attributs. Le dernier est la traduction grecque de l'hébreu Messie ou Mashiach. Jésus s'appelle encore Emmanuel, cf., le dernier Adam, Scilo, David, Os. 3, S. Jér. 30, 9., germe, Jér. 23, 5. Zach. 3, 8., Micaël, Dan. 12,1., roi, prophète, avocat, Nazarien, roi des rois, pâque, défenseur, souverain sacrificateur, etc. La Concord. de M. Mackenzie, p. 734, sq., compte près de deux cents noms et titres donnés à Jésus, dans l'Ecriture.

2° La venue de Jésus est supposée d'un bout à l'autre de l'Ancien Testament, depuis l'instant de la chute, Gen. 3, 15. Les cérémonies du culte lévitique, le mosaïsme tout entier, le sacerdoce et les prophètes l'annoncent et lui rendent d'avance témoignage; Jésus a mis le sceau à leurs visions, cf. Dan. 9, 24. Les types et les prophéties messianiques abondent. Les faits principaux de la vie de Jésus sont annoncés clairement : l'époque de sa naissance, Dan. 9, 25.; le lieu, Mich. 5, 2.; sa naissance d'une vierge, Es. 7,14.; son nom, ibid.; son surnom (Nazarien, rejeton) Es. 11, 1.; son retour d'Egypte, Os. 11,1.; le massacre des innocents, Jér. 31, 15.; l'œuvre du précurseur, Es. 40, 3. Mal. 3, 1.4, 5.; la mission de Christ, Es. 53; son entrée dans Jérusalem, Zach. 9, 9.; son humiliation, ses souffrances, sa mort expiatoire, le prix auquel il serait livré, les méchants qui seraient mis à mort avec lui, sa glorieuse sépulture, sa résurrection, Ps. 22, Es. 52,13.-53, 12. Zach. 11, 13. cf. Jér. 18, 1. sq.; l'Eglise enfin qui naîtrait de son travail, de sa doctrine, et de son sang, Zach. 6,12., etc. Il est beaucoup d'autres prophéties immédiatement et exclusivement applicables à Christ ; nous avons indiqué les principales. On peut voir encore Agg. 2, 6-9. Zach. 12, 10. Dan. 2, 44. 7, 13. Ps. 2, 45, 102, 110, etc.

3° L'année de la naissance de Jésus ne peut pas être déterminée d'une manière exacte; mais ce qui paraît prouvé, et assez généralement admis, c'est qu'elle se situe aux environs de l'an -10 de l'ère chrétienne. On voit, en effet, par Mat 2,1-6., que Jésus est né du vivant d'Hérode le Grand, mais peu de temps avant sa mort. Or Hérode mourut l'an 750 de Rome, un peu avant Pâque (Jos. Ant. 17, 8, 1.-14, 14,5.-17,9,3.). Si, de cette date, nous défalquons les jours de la purification, le temps de la visite des mages, le voyage en Egypte, le séjour dans ce pays jusqu'au moment de la mort d'Hérode (et six mois ne seront pas un chiffre exagéré), il en résulte que le Christ est né au plus tôt dans l'automne de l'an 749 de Rome, quatre ans avant notre ère. — Une seconde donnée historique nous apprend, Luc 3, 1. 2., que Jean-Baptiste commença son ministère en la 15e année de Tibère ; Jésus au moment de son baptême avait trente ans, Luc 3, 23. L'un et l'autre étaient sans doute entrés en fonctions au même âge, conformément à l'usage lévitique, Nomb. 4, 3. 35. sq. Si nous reculons de trente ans en arrière, nous arriverons à connaître l'année de la naissance des deux cousins. Auguste était mort le 29 août 767 ; il fut immédiatement remplacé par Tibère, qui était déjà son associé sur le trône depuis deux ou trois ans. Ces années de corégence comptent habituellement dans la vie des rois : Tibère serait donc monté sur le trône en 765 ou même en 764 ; sa 15e année tomberait sur l'an 773, d'où il suivrait que Jean, né trente ans auparavant, serait né en 748, et notre Seigneur en 749. (Si cependant on ne date les années du règne de Tibère que depuis la mort d'Auguste, la naissance du Seigneur tombe sur l'an 752, résultat sensiblement différent de celui que donne Matthieu ). — On trouve un troisième indice, mais également sujet à incertitude, dans Jean 2, 20. : « On a été quarànte-six ans à bâtir ce temple. » Josèphe dit qu'Hérode a commencé la restauration de cet édifice la 18e année de son règne, mais ailleurs il nomme la 10e (Ant. 15, 11,1. Guer. d. J. 1, 21, <.), comme il donne aussi tantôt trente-sept, tantôt trente-quatre ans au règne de ce monarque, suivant qu'il le fait commencer à la mort d'Antigone, ou à sa confirmation par les Romains. Ce n'est qu'en 714 qu'il fut proclamé roi ; la 18e année de son règne tomberait donc sur l'an 732, et la première Pâque de notre Sauveur, dans la 47e année du temple restauré, sur l'an 779. Jésus avait alors trente ans et quelques mois, et sa naissance remonterait à l'automne 748. — Notons enfin une tradition conservée par les pères latins (Tertullien, Lactance, Augustin), portant que la mort de notre Seigneur eut lieu sous le consulat de Rubellius et de Fuflus, c'est-à-dire l'an de Rome 782. Si, comme on le suppose ordinairement, la vie de Jésus a été de trente-trois ans et demi, sa naissance tomberait encore sur l'an 748 ; mais c'est une question à part. — Quelques écrivains modernes se fondant sur Mat 2,16., et prolongeant le séjour d'Egypte, pensent que Jésus avait déjà deux ou trois ans à la mort d'Hérode, et le font naître par conséquent déjà en 747 (Miinter, etc.). C'est la même année que fixent également eux qui, avec Keppler et Ideler, voient dans l'étoile des mages la conjonction de Jupiter et de Saturne qui eut lieu cette année-là. — Il résulte de ce qui précède que Jésus a dû naître au minimum quatre à cinq ans au moins avant l'ère vulgaire, et qu'il a probablement du naître quelques années plus tôt encore. L'ère vulgaire a été fixée au 5ème siècle, par l'abbé Denys (Dionysius) Exiguus qui lui a donné son nom ; elle a été employée par Bède le Vénérable (première partie duvni6 siècle) dans ses ouvrages historiques, et bientôt après dans des actes publics, par les rois francs Pépin et Charlemagne. — Le moment de l'année en laquelle Jésus naquit est plus difficile encore à déterminer; ce qu'il y a de sur, c'est que ce ne fut pas en hiver, puisque les bergers gardaient les brebis dans les champs. Selon Lardner, ce serait entre la mi-août et la mi-novembre ; selon l'archevêque Newcome qui prend la moyenne, ce serait le 1er octobre; Winer donne une marge plus grande, et n'exclut que la saison froide. En fait, il n'y a aucune donnée positive ; le 2o décembre commença à prévaloir au 4 ème siècle, comme jour de la nativité, et si l'on en croit Léon le Grand, qui mourut en 461, il y avait bon nombre de gens à Rome qui célébraient ce jour bien moins à cause de la naissance du Sauveur qu'en l'honneur du soleil renaissant (Serm. XXI, ch. 6.).

4° Les généalogies. Matthieu 1, 1-16. et Luc 3, 23-38., donnent l'un et l'autre la généalogie de Jésus ; l'un, écrivant pour les Juifs, prend Abraham pour pas de départ; le second, écrivant pour les nations, remonte jusqu'au chef de l'humanité, Adam, et jusqu'à Dieu. Matthieu divise ses générations en trois groupes de quatorze membres chacun ; le premier groupe, période de la promesse, va d'Abraham à David ; il y manque plusieurs anneaux, notamment entre Salmon et Jes-sé. — David, qui est le dernier terme de la première division, compte aussi comme le premier de la seconde ; il est deux fois compris dans les quatorze ; cette seconde période, celle des types rois, s'éttnl jusqu'aux jours de la transportation ; au verset 8., entre Joram et Hozias, il manque trois anneaux, Achazia, Joas, Amatsia; au verset 11., les meilleures autorités portent simplement : « Et Josias engendra Jéchonias, etc. », en omettant la mention de Jakim, qui n'est qu'une glose, mais la glose bien naturelle d'un copiste qui avait remarqué une lacune, et qui voulait la combler ; seulement elle a été maladroitement comblée. Historiquement, Josias engendra Jéhojakim et ses frères ; Jého-jakim n'engendra que Jéchonias, et peut-être un Sédécias mort bientôt, 2 Rois 23, 34. 2 Chr. 36. 4. cf. 1 Chr. 3,15.16. Les frères de Jéhojakim sont donc les oncles de Jéchonias, et le verset 11 doit se traduire, quant au sens du moins : « Josias engendra (fut le père ou grand-père de) Jéchonias, et ses oncles. » II manque doue à cette division quatre noms au moins, et au lieu de quatorze on en devrait compter dix-huit, ce qui a fait supposer à quelques commentateurs que le v. 17. n'était qu'une note qu'un copiste aurait plus tard fait passer dans le texte; mais l'accord des manuscrits s'y oppose. Il est plus probable que ces quatre noms étaient habituellement omis dans les tables généalogiques, sans qu'il y ait pour cela de motif à nous appréciable (on peut voir une omission semblable dans la généalogie d'Esdras, 7, 1-5. cf. 1 Chr. 6, 3-15.). Dans le troisième groupe (abolition de la royauté et des types rois), Salathiel est noté comme père de Zorobabel (Mat et Luc), tandis que, d'après 1 Chr. 3,19., Zorobabel était fils de Pédaja, son frère ; il faut donc supposer, avec Hug (11,269), que Zorobabel était le fils aîné de Pédaja et de la veuve de Salathiel, qui était mort sans enfants, et que pour cela il fut inscrit sur les registres de Salathiel, conformément à la loi du lévirat, Deu 2î>, 6. Au verset 13, Abiud, et Luc 3, 27., Résa, sont nommés comme fils de Zorobabel ; leurs noms ne se trouvent pas 1 Chr. 3,19., mais cela n'a guère d'importance. Enfin, verset 16., nous voyons en quelque sorte l'esprit de cette généalogie; elle est légale : Jésus descend de David légalement, par Joseph, le mari de Marie ; la formule « engendra » disparaît entre Joseph et Jésus ; après avoir suivi la filiation officielle de Joseph, Matthieu constate que, si Jésus appartient à la famille de Joseph, il ne lui appartient que légalement, civilement, et non selon la chair. Jésus était l'héritier naturel, légitime, de Joseph, puisque Joseph, qui avait d'abord voulu renvoyer Marie, l'avait, sur l'ordre de Dieu, épousée avant la naissance de Jésus, verset 18.; ses droits au trône de David passaient ainsi à celui qui légalement était son fils aîné ; en même temps il doit rester établi pour les lecteurs que Joseph n'était pas le père de Jésus, mais seulement le mari de sa mère.

En comparant les deux généalogies, nous trouvons dans chacune une partie qui commence à David et se termine à Salathiel, mais par deux filiations différentes : Matthieu 1. David Luc 3.S alomon, Nathan Jéchonias Néri Salathiel Zorobabel, etc.

Ainsi, Matthieu désigne Salathiel comme fils ou descendant de Jéchonias et de Salomon, tandis que Luc le désigne comme fils de Néri et de Nathan. L'hypothèse de Paulus qui, pour écarter la difficulté, suppose deux Salathiel, est trop hardie. On peut voir ailleurs l'explication que nous avons donnée de cette espèce de divergence; Salathiel est fils d'Assir, de fait et de droit, et petit-fils de Néri selon la chair, de Jéchonias selon la loi. v. Salathiel.

On est assez généralement d'accord à supposer, quoique rien ne le dise positivement, que Luc a donné la généalogie de Marie ; les rapports de Joseph à Iléli, verset 23, seraient ceux de gendre à beau-père, relation légale d'ascendance et de descendance, que le texte ne contredit pas, puisque les relations de parenté ne sont indiquées que par la juxtaposition des noms dont l'un régit l'autre, sans indication du degré; le génitif peut sous-entendre père, fils, etc.; le texte porte littéralement : « Fils, comme on l'estimait, de Joseph d'Héli », ces deux noms n'étant pas unis par le mol fils. Il serait étonnant, d'ailleurs, que la descen-

dance directe de Joseph fut indiquée dans la branche de Nathan, lorsqu'on pouvait le rattacher directement à la branche beaucoup plus glorieuse de Salomon. S'il s'agissait, en effet, delà généalogie de Marie, fille d'Héli, Luc l'aurait donnée pour établir que Jésus descendait de David, non seulement selon la loi, mais aussi selon la chair. Marie était réellement de la famille royale, ce qui nous paraît ressortir de Luc 1, 27. (“qui était de la maison de David», se rapporte à « une vierge «); de 2,5., où l'enregistrement de Joseph et de Marie dans le même endroit suppose une même origine et une proche parenté ; enfin etsurtout deRom. 1,3. (Hébr.7,14.), où Jésus est appelé fils de David selon la chair, v. Orig. cont. Celse, et S. Basnage, Ans. I, 88. — Ceux qui pensent que Luc donne, comme Matthieu, la filiation de Joseph, font d'Héli et de Jacob deux frères, dont l'un serait mort sans enfants ; Joseph, le fils aîné du survivant, serait légalement attribué au défunt. — Sur l'ensemble de cet article, dont nous n'avons pu qu'effleurer les difficultés, v. les commentaires, et spécialement en anglais Robinson.

5° Parents de Jésus, a) Marie, sœur de la mère de Jésus, Jean 19, 25., femme de Cléopas ou Alphée. b) Elisabeth, cousine de Marie, Luc1, 36. c) Jacques, Joses, Simon et Judas, frères de Jésus, Jean 7,3. 5.10.1 Cor. 9, S. Mat 12, 46.13. 55. Marc 3, 32. Luc 8,19. Jean 2,12.Act 1, 14. On a voulu donner au mot xfc).?oi le sens de cousins, pour concilier ces nombreux passages avec la soi-disant virginité perpétuelle de Marie ; ce sens est possible, mais il est forcé : on ne comprend pas, en effet, l'affectation avec laquelle les évangélistes emploieraient continuelle-ment le mot frères dans un sens qui n'est pas ordinaire, pour éviter le mot propre, qui ne se prête à aucune équivoque. Plus la chose était importante, plus il importait aussi de la dire de manière à éviter tout malentendu;les apôtres ont employé une expression qui laisse des doutes sur le degré de cette parenté, et il en résulte au moins ceci, qu'ils n'attachaient aucune importance au fait, en effet bien indifférent, de la virginité de Marie. Mais si, à cette régulière répétition du même mot, qui finit par signifier quelque chose, qui n'est plus un accident, mais une intention, nous ajoutons le nom de premier-né donné à Jésus, Mat 1,25., dans un passage où il est parlé des relations de Joseph et de Marie (cf. aussi verset 18., avant qu'ils fussent ensemble), on doit convenir que la probabilité prend un caractère plus déterminé, plus positif. Le fait que ces frères et sœurs sont constamment avec la mère de Jésus, est également caractéristique : ce cortège s'explique s'il s'agit d'enfants, il ne s'explique pas s'il s'agit de neveux et de nièces. On l'a si bien compris, que plusieurs auteurs ont fini par reconnaître qu'il s'agissait là des frères de Jésus, mais frères selon la loi, fils de Joseph, et non de Marie : cette explication lève quelques difficultés, mais elle en laisse subsister d'autres, notamment Mat 1,18.25. Le passage Jean 19, 26., qu'on a parfois invoqué pour prouver que Marie n'avait pas d'enfants, prouve seulement que Jean était plus digne de recueillir la vieillesse de Marie, alors presque sexagénaire, que des frères qui n'avaient pas cru en lui, et qui même une fois avaient voulu faire arrêter Jésus comme aliéné, Marc 3, 21.; il paraît qu'ils furent convertis par la résurrection du Seigneur, Act 1, 14., et que ce fait merveilleux les décida de se joindre à l'Eglise. Les sœurs de Jésus sont mentionnées Mat 13, 56. cf. Marc 6, 3. — d) La tradition fait de Salomé, femme de Zébédée, la sœur de Joseph, père de Jésus ; mais le Nouveau Testament se tait sur cette parenté.

6° Jésus fut élevé à Nazareth, et l'on conclut de Jean 7, 15., qu'il ne fréquenta pas l'école publique (rabbinique) de la ville. Il apprit l'état de son père, suivant l'usage de ce temps, et l'on croit qu'il continua, même pendant sa carrière évan-gélique, d'y chercher, comme les rabbins, une partie de sa subsistance. Une variante assez recommandable de Marc 6, 3. appuierait cette opinion. Ses amis et disciples pourvoyaient du reste à tout ce qui pouvait lui manquer, Luc 8, 3. Marc 15, 41., et dans ses voyages il trouvait une hospitalité distinguée, et des soins qu'il devait aux mœurs de l'Orient, et à la notoriété de ses miracles, Jean 4, 45. 12, 2. Le collège apostolique avait un petit fonds commun, destiné aux besoins les plus urgents, Mat 14, 17. Luc 9, 13. Jean 12, 6. 13, 29. Si Jésus n'était pas riche, Luc 2, 24. Mat 8, 20. 2 Cor. 8, 9. cf. Lév. 12, 8., on ne saurait non plus se le représenter comme pauvre et misérable, cf. Jean 19, 23. Ce serait même contraire à l'analogie de la foi, cf. Ps. 37, 25.

On a fait de nombreuses tentatives pour réunir en une seule biographie tous les détails que les Evangélistes donnent sur la vie de Jésus, mais ces Harmonies ont l'inconvénient d'être fort arbitraires, car il n'y a pas de fil directeur pour guider dans un travail de ce genre. Les Evangiles sont de simples recueils de faits, qui ne ne tiennent que peu ou pas de compte de l'ordre chronologique. Il en résulte que tous les essais qui ont été faits dans ce sens, et celui de Calvin est certainement le plus remarquable, ne peuvent être considérés que comme des présomptions. L'Evangile de Jean donne seul quelques dates, mais peu de faits ; et c'est à ces dates qu'il faut rattacher les faits racontés dans les synoptiques.

Jésus demeurait habituellement à Ca-pernaiim ; il fit son premier miracle à Cana. De là, par Nazareth et Capernaum, il va célébrer à Jérusalem sa première Pâque, Jean 2, 13. C'est après cela qu'il appelle ses apôtres sur les rives du lac de Géné-sareth, Luc 5 ; il visite Gadara et retourne à Capernaum ; appel de Lévi ; fille de Jaï-rus ; sermon sur la montagne ; serviteur du centenier; envoi des douze apôtres; retour à Jérusalem par Béthanie. Seconde ou troisième Pâque. Lavoir de Béthesda, retour à Capernaum, multiplication des pains ; voyage à Tyr et Sidon, Mat 15 ; à Jérusalem par la Pérée ; retour en Galilée; voyage à Césarée de Philippe, et peut-être au mont Hermon où eut lieu la transfiguration (et non sur le Tabor?) Mat 16 et 17, Marc 9, Luc 9; retour à Capernaum, en Pérée, à Béthanie, Luc 9 et 10, Mat 19; il passe le Jourdain et revient à Béthanie, Jean 10 et 11 ; en Ephraïm, à Béthel et Bethsan: à Jé-rico, Luc 19 ; entrée à Jérusalem ; dernière Pâque. —Celui qui voudra se donner la peine d'essayer pour son compte une harmonie des quatre Evangiles, en comprendra tout ensemble les difficultés et l'utilité. L'esquisse que nous en donnons fera comprendre l'une, le travail seul fera comprendre l'autre. On trouvera un plan approximatif des voyages de Jésus, dans le Bibel-Atlas de Weiland et Acker-mann ; c'est une carte qui manque au Scripture-Atlas de Bagster.

La liste complète des miracles, et celle des paraboles du Sauveur, se trouve dans Bickersteth, Considérations sur l'Ecriture sainte, p. 98 et 108.

7° La durée de son ministère ne peut être déterminée d'une manière exacte et sûre. On trouverait les éléments de cette recherche dans le nombre des Pâques que Jésus a célébrées, mais les trois premiers evangélistes ne mentionnent que la dernière, et Jean qui parle de cinq fêtes juives que Jésus aurait faites à Jérusalem, outre une Pâque qu'il a passée en Galilée, ne les détermine pas assez nettement pour qu'on en puisse rien conclure à coup sûr. Trois Pâques au moins sont cependant indiquées : la première, Jean 2, 13., peu après le baptême de Jésus, ainsi presque au commencement de son ministère; la seconde, Jean 6, 4., Jésus est en Galilée; la troisième et dans tous les cas la dernière, Jean 12 et 13. Le ministère de Jésus aurait ainsi duré un peu plus de deux ans. Mais si la fête des Juifs, Jean 5, 1., doit être entendue de la Pâque, ce serait une année de plus qu'il faudrait ajouter à la durée de sa carrière publique. Sans entrer dans des détails qui sont du ressort des commentaires, on peut dire que le mot fête, même sans article, désigne souvent la Pâque, Mat 27, 15. Marc 15, 6. Luc 23, 17. cf. Jean 18, 39.; que Jean, qui a l'habitude de mesurer le temps par les fêtes, n'a pas voulu dire simplement qu'il y avait une fête, mais la fête, ce qui semble se rapporter plus spécialement à la Pâque; qu'il ne peut guère être question ici, ni de la fête de Pentecôte, ni de celle des Tabernacles, ni de celle de Purim, quoique ce soit l'opinion de Keppler, proposée pour la première fois en 1615, et adoptée aujourd'hui par Hug, Neander,

Olshausen, Tholuck, Meyer, Wieseler; que la plupart des auteurs anciens et modernes se prononcent pour la Pâque ; ainsi Irénée : « Et posthac iterum secundâ vice adscendit (Jésus) in diem Paschse in Hie-rusalem, quando paralyticum, quijuxta natatoriam jacebat xxxvm annos, cura-vit, etc. ; » c'est l'opinion d'Eusèbe et de Théodoret, de Luther, Scaliger, Grotius, Lightfoot, Leclerc, Lampe, Hengstenberg, Greswell, etc. Cyrille et Chrysostome, Erasme, Calvin, Bèze et Bengel, pensent qu'il s'agit de la Pentecôte. Lucke et De Wette laissent la question indécise.

On voit que les limites de la vie publique de Jésus sont entre deux ans et demi et trois ans et demi. D'après ce que nous avons dit de l'époque de sa naissance, et en se rappelant qu'il commença son ministère à l'âge d'environ trente ans, il serait mort à l'âge de trente-deux ou trente-trois ans, et vers l'an 28 ou 29 de 1ère chrétienne ; les termes extrêmes sont l'an 781 et l'an 783 de Rome, quoique plusieurs pères de l'Eglise le fassent mourir à un âge beaucoup plus avancé, quarante ou cinquante ans, et ne lui donnent en outre qu'une carrière publique de huit à dix mois, d'un an au plus. v. Winer, Realw.

8°. Calme et tranquille dans la pacifique révolution qu'il apporte au monde, Jésus ne veut pas démolir le judaïsme avant d'avoir établi le christianisme. Il continue d'observer lui-même les prescriptions de la loi, et s'il les maintient dans toute leur sévérité, en opposition à la lâche tolérance des prêtres d'alors, c'est peut-être pour constater une dernière fois qu'il est impossible à l'homme d'être sauvé par les œuvres. En observant la loi il en détermine l'esprit. Il fait du bien à tous, aux païens comme aux Juifs, au centenier de Capernaum, à la syrophénicienne, comme à Jaïrus, le chef de la synagogue ; il supporte les intolérants Samaritains, et les protège contre l'intolérance de ses disciples; il ne craint pas de s'entretenir publiquement avec une femme de cette nation détestée des Juifs; peu soucieux de l'opinion publique, et la bravant, il s'établit en Galilée, et choisit ses amis et ses disciples parmi les humbles et méprisés Galiléens, protestant ainsi de diverses manières contre les préjugés de l'orgueil humain,de l'orgueil national, de l'orgueil hiérarchique, et de l'orgueil personnel. Il pardonne aux pécheurs, il est l'ami des pauvres, des péa-gers, des gens de mauvaise vie ; il habite avec eux, et les reprend avec douceur, les relevant au lieu de les abaisser; il semble n'avoir de paroles sévères que pour les grands de ce monde et les dignitaires du temple ; Hérode est un renard, les prêtres et tout ce qui est à leur dévotion, une race de vipères. On le voit pleurer avec ceux qui pleurent, avec la veuve de Nain, avec la famille de Lazare; l'amour est le fond de son caractère ; il embrasse tout, il supporte tout ; il aime tout ce qui a un cœur d'homme, il aime surtout les faibles et les chétifs ; c'est aux pauvres que l'Evangile est annoncé ; il représente l'humanité dans le sens le plus large ; il prêche la fraternité universelle. On ne doit donc pas s'étonner de voir son nom devenir si populaire, de son vivant encore, et servir aux générations de dix-huit siècles, comme unsym-bole de ce qu'il y a de plus divin dans l'humanité ; là même où l'Eglise l'a méconnu, le peuple l'a reconnu et revendiqué, souvent mal à propos et dans l'ignorance, mais cette ignorance est la faute de ceux qui ne l'ont pas compris eux-mêmes, lorsqu'ils étaient chargés de l'ex-pliquer. Aux jours de Jésus le peuple attendait le libérateur d'Israël, mais un libérateur terrestre; et dans tous les temps Jésus a été considéré par les peuples comme le représentant d'un libéralisme politique; c'est une erreur qu'il faut imputer avant tout à ceux qui ont voulu faire du christianisme un moyen de régner, et qui n'ont pas voulu comprendre que son règne n'est pas de ce monde.— v. Bastie, Démocratie et Religion, p. 29. 9°. Les ouvrages les plus importants à consulter sont, outre les commentaires : la Vie de Jésus par Hess, écrite surtout en vue de l'édification; la”Vie de Jésus, par Néander, écrite davantage au pas de vue scientifique et dogmatique; divers fragments de Herder dans ses Œuvres mêlées, et la plupart des voyages en Palestine. En français nous n'avons presque rien ; aucune vie de Jésus proprement dite ; quelques travaux spéciaux seulement, et limités dans leur but; quelques traductions de l'allemand, Sander, Olshausen ; puis, sur l'Oraison dominicale, Bonnet, les Discours du pasteur Bri-del, de Lausanne, et les Conférences de J. Martin, de Genève; la Famille de Bé-thanie, par Bonnet; quelques travauxdog-matiquesdeMalan, Gaussen, Roussel; sur son Procès, l'ouvrage de M. Dupin; sur sa Passion, un grand nombre de discours (Saurin, Ad. Monod, H. Monod, Grand-pierre), et de recueils, parmi lesquels nous citerons Francillon, Galland, Dar-dier, les Homélies du R. P. Innocent, trad. du russe par A. de Stourdza, les Conférences de J. Martin, etc. Nous rappelons aussi pour mémoire l'ouvrage fabuleux du docteur Strauss, et les nombreuses réfutations dont il a été l'objet.

10”On ne possède aucune donnée authentique sur la figure et la taille du Christ; les représentations et portraits les plus anciens qu'on en a faits, n'ont aucune valeur historique : ainsi, la statue d'airain que lui érigea, dit-on, à Panéas (Césarée), l'hémorrhoïsse qu'il avait guérie, monument qui fut détruit par ordre de l'empereur Julien; ainsi, le portrait que Jésus aurait lui-même envoyé à Abgare, roi d'Edesse; ainsi, le saint mouchoir qui aurait servi à essuyer sa sueur, et aurait reçu miraculeusement l'empreinte de sa ligure (le même qui a dernièrement pâli à Rome, et dont les yeux ont lancé des éclairs d'indignation à propos de la ruine commencée de la papauté); ainsi, les portraits que Luc aurait faits de Jésus, de Marie et de plusieurs apôtres ; ainsi encore, la description qu'en a donnée un employé romain, Publius Lentulus, et dont les textes varient considérablement : « Capillosverô circinos et crispos,

barbam habens copiosam et rubram, .... bifurcatam, etc. » Ce que l'on peut dire, c'est que, selon toute probabilité, Jésus n'avait pas de défauts corporels, qu'il n'avait rien non plus de bien saillant dans son extérieur, puisque Marie l'a pu prendre d'abord pour le jardinier, que les disciples d'Emmaus, et une autre fois les apôtres, au bord du lac de Tibériade, sont restés quelques moments avant de le reconnaître. Sa physionomie devait refléter la grandeur de son âme, et cet amour de l'humanité qui était le fond de son caractère et le mobile de sa mission; il devait enfin porter l'empreinte de la souffrance. Son regard et sa voix paraissent avoir eu quelque chose de particulièrement puissant. Quelques pères, Clément d'Alexandrie, Origène, ont cru, mais à tort, pouvoir conclure de Es. 53, 2. que l'extérieur du Seigneur était méprisable et repoussant, mais ce v. se rapporte plutôt à sa mission et à sa condition qu'à son corps et à sa figure. —On peut voir dans Calvin quelques détails de plus sur ce sujet, et la nomenclature des reliques nombreuses qu'on prétend avoir conservées de Jésus, depuis le jour de sa naissance et de sa circoncision jusqu'au jour de son ascension.

JÉSUS-CHRIST. Devant ce nom, qui est à la fois celui d'un homme et celui de Dieu manifesté en chair ; ce nom, le seul qui ait été donné aux hommes par lequel nous puissions être sauvés; ce nom à l'ouïe duquel tout genou se ploie, dans le ciel et sur la terre ; devant ce nom la raison s'humilie dans le sentiment profond de son impuissance, et la foi, posant son doigt divin sur nos lèvres, nous invite à adorer en silence ces choses que l'oeil n'a pas vues, que l'oreille n'a pas entendues, qui ne sont pas montées au cœur de l'homme, et dans lesquelles les anges eux-mêmes désirent de regarder jusqu'au fond.

La nature de Christ et les caractères de sa mission, sa présence et son oeuvre, son apparition dans l'histoire et son rôle en dehors du temps, tout est pour la pensée une source de questions pleines d'intérêt sans doute, mais aussi pleines d'obscurité. Comment concevoir et définir la personnalité du Fils, ses rapports avec le Père et le Saint-Esprit, l'union de la divinité et de l'humanité dans sa personne; son œuvre de roi, de sacrificateur et de prophète; son origine, sa naissance, sa vie, sa mort, sa résurrection, son action dans l'Eglise et auprès du Père ; son second avènement, son règne futur ?

Que peuvent dire et la physiologie et la psychologie pour expliquer son corps et son âme P — ce corps formé tout à la fois et par l'influence du Saint-Esprit et dans le sein de la chair, cette âme douée de toutes les facultés, accessible à toutes les émotions humaines, et empreinte de toutes les perfections, de toute la majesté divine ; — ce corps qui, en forme de chair de péché, naît débile, croît, se développe, ressent la fatigue et la souffrance, subit la mort, mais ne peut être retenu par elle, sort du sépulcre, encore susceptible d'accomplir les fonctions animales, et pourtant échappe aux lois de la matière, et s'élève d'une manière visible vers ce royaume où la chair et le sang ne peuvent entrer; — Cette âme qui, elle aussi, se développe, croît en sagesse, souffre, se réjouit, s'attache, ressent la tentation, s'abat dans la tristesse, puis se relève triomphante au milieu de toutes les faiblesses, pure de toute souillure, et ferme, sereine, sainte, radieuse, révèle au monde l'idéal d'une grandeur humaine qui se confond avec la grandeur même de Dieu P—Tous ces problèmes peuvent à peine être indiqués ici. Nous ne saurions songer, nous ne disons pas à les résoudre, la science de l'homme n'y suffirait pas, mais même à les examiner dans leurs détails. Ils sont d'ailleurs du ressort de la dogmatique, de la psychologie et de la philosophie, et ne sauraient être abordés dans ce travail.

Nous n'avons pas davantage la prétention d'écrire une biographie de Jésus. Par des motifs de convenance, plusieurs auteurs ont cru bien faire que de supprimer l'article entier ; une telle vie est trop haute, disaient-ils, et trop riche, pour qu'une plume purement humaine réussisse à en tracer un tableau satisfaisant : la main des évangélistes, guidée par l'esprit même de Christ, a pu seule se charger de ce soin. Nous comprenons ce scrupule, mais sans le partager entièrement, et ce qui nous arrête, c'est moins cette pensée, que la considération même de l'étendue du sujet, et les développements considérables qu'il exige pour être traité d'une manière convenable. Tout l'Evangile, d'ailleurs, se résume en Jésus; en lui se résume aussi l'histoire de ceux qui l'ont vu, annoncé, accompagné et prêché; sa vie se rattache à une foule d'hommes et de faits qui trouvent déjà leur place ailleurs, et qui, se reproduisant ici, feraient nécessairement double emploi.

Nous nous bornons donc à donner quelques explications sur les points suivants.

1° Le nom de Jésus signifie Sauveur; le nom de Christ signifie oint : ce sont à la fois des noms propres et des noms d'attributs. Le dernier est la traduction grecque de l'hébreu Messie ou Mashiach. Jésus s'appelle encore Emmanuel, cf., le dernier Adam, Scilo, David, Os. 3, S. Jér. 30, 9., germe, Jér. 23, 5. Zach. 3, 8., Micaël, Dan. 12,1., roi, prophète, avocat, Nazarien, roi des rois, pâque, défenseur, souverain sacrificateur, etc. La Concord. de M. Mackenzie, p. 734, sq., compte près de deux cents noms et titres donnés à Jésus, dans l'Ecriture.

2° La venue de Jésus est supposée d'un bout à l'autre de l'Ancien Testament, depuis l'instant de la chute, Gen. 3, 15. Les cérémonies du culte lévitique, le mo-saïsme tout entier, le sacerdoce et les prophètes l'annoncent et lui rendent d'avance témoignage; Jésus a mis le sceau à leurs visions, cf. Dan. 9, 24. Les types et les prophéties messianiques abondent ; il faut se tenir en garde toutefois contre l'imagination qui pourrait en faire voir partout. Girard des Bergeries a peut-être exagéré les types, Hengstenberg, dans sa Christologie, a été préoccupé outre me-sure de son sujet, et a multiplié le nombre des oracles relatifs au Messie. Ces deux ouvrages n'en ont pas moins une grande valeur, et méritent d'être étudiés. Les faits principaux de la vie de Jésus sont annoncés clairement : l'époque de sa naissance, Dan. 9, 25.; le lieu, Mich. 5, 2.; sa naissance d'une vierge, Es. 7,14.; son nom, ibid.; son surnom (Nazarien, rejeton) Es. 11, 1.; son retour d'Egypte, Os. 11,1.; le massacre des innocents, Jér. 31, 15.; l'œuvre du précurseur, Es. 40, 3. Mal. 3, 1.4, 5.; la mission de Christ, Es. 53; son entrée dans Jérusalem, Zach. 9, 9.; son humiliation, ses souffrances, sa mort expiatoire, le prix auquel il serait livré, les méchants qui seraient mis à mort avec lui, sa glorieuse sépulture, sa résurrection, Ps. 22, Es. 52,13.-53, 12. Zach. 11, 13. cf. Jér. 18, 1. sq.; l'Eglise enfin qui naîtrait de son travail, de sa doctrine, et de son sang, Zach. 6,12., etc. Il est beaucoup d'autres prophéties immédiatement et exclusivement applicables à Christ ; nous avons indiqué les principales. On peut voir encore Agg. 2, 6-9. Zach. 12, 10. Dan. 2, 44. 7, 13. Ps. 2, 45, 102, 110, etc.

3° L'année de la naissance de Jésus ne peut pas être déterminée d'une manière exacte; mais ce qui paraît prouvé, et assez généralement admis, c'est qu'elle est de quelques années antérieure à l'an 1 de l'ère chrétienne. On voit, en effet, par Mat 2, 1-6., que Jésus est né du vivant d'Hérode le Grand, mais peu de temps avant sa mort. Or Hérode mourut l'an 750 de Rome, un peu avant Pâque (Jos. Ant. 17, 8, 1.-14, 14,5.-17,9,3.). Si, de cette date, nous défalquons les jours de la purification, le temps de la visite des mages, le voyage en Egypte, le séjour dans ce pays jusqu'au moment de la mort d'Hérode (et six mois ne seront pas un chiffre exagéré), il en résulte que le Christ est né au plus tôt dans l'automne de l'an 749 de Rome, quatre ans avant notre ère. — Une seconde donnée historique nous apprend, Luc 3, 1. 2., que Jean-Baptiste commença son ministère en la 15e année de Tibère ; Jésus au moment de son baptême avait trente ans, Luc 3, 23. L'un et l'autre étaient sans doute entrés en fonctions au même âge, conformément à l'usage lévitique, Nomb. 4, 3. 35. sq. Si nous reculons de trente ans en arrière, nous arriverons à connaître l'année de la naissance des deux cousins. Auguste était mort le 29 août 767 ; il fut immédiatement remplacé par Tibère, qui était déjà son associé sur le trône depuis deux ou trois ans. Ces années de corégence comptent habituellement dans la vie des rois : Tibère serait donc monté sur le trône en 765 ou même en 764 ; sa 15e année tomberait sur l'an 773, d'où il suivrait que Jean, né trente ans auparavant, serait né en 748, et notre Seigneur en 749. (Si cependant on ne date les années du règne de Tibère que depuis la mort d'Auguste, la naissance du Seigneur tombe sur l'an 752, résultat sensiblement différent de celui que donne Matthieu ). — On trouve un troisième indice, mais également sujet à incertitude, dans Jean 2, 20. : « On a été quarànte-six ans à bâtir ce temple. » Josè-phe dit qu'Hérode a commencé la restauration de cet édifice la 18e année de son règne, mais ailleurs il nomme la 1oe (Ant. 15, 11,1. Guer. d. J. 1, 21, <.), comme il donne aussi tantôt trente-sept, tantôt trente-quatre ans au règne de ce monarque, suivant qu'il le fait commencer à la mort d'Antigone, ou à sa confirmation par les Romains. Ce n'est qu'en 714 qu'il fut proclamé roi ; la 18e année de son règne tomberait donc sur l'an 732, et la première Pâque de notre Sauveur, dans la 47e année du temple restauré, sur l'an 779. Jésus avait alors trente ans et quelques mois, et sa naissance remonterait à l'automne 748. — Notons enfin une tradition conservée par les pères latins (Tertullien, Lactance, Augustin), portant que la mort de notre Seigneur eut lieu sous le consulat de Rubellius et de Fuflus, c'est-à-dire l'an de Rome 782. Si, comme on le suppose ordinairement, la vie de Jésus a été de trente-trois ans et demi, sa naissance tomberait encore sur l'an 748 ; mais c'est une question à part. — Quelques écrivains modernes se fondant sur Mat 2,16., et prolongeant le séjour d'Egypte, pensent que Jésus avait déjà deux ou trois ans à la mort d'Hérode, et le font naître par conséquent déjà en 747 (Miinter, etc.). C'est la même année que fixent également

ceux qui, avec Keppler et Ideler, voient dans l'étoile des mages la conjonction de Jupiter et de Saturne qui eut lieu cette année-là. — Il résulte de ce qui précède que Jésus a dû naître quatre à cinq ans au moins avant l'ère vulgaire, et qu'il a pu naître quelques années plus tôt encore. L'ère vulgaire a été fixée au vie siècle, par l'abbé Denys (Dionysius) Exiguus qui lui a donné son nom ; elle a été employée par Bède le Vénérable (première partie duvni6 siècle) dans ses ouvrages historiques, et bientôt après dans des actes publics, par les rois francs Pépin et Charlemagne. — L'époque de l'année en laquelle Jésus naquit est plus difficile encore à déterminer; ce qu'il y a de sur, c'est que ce ne fut pas en hiver, puisque les bergers gardaient les brebis dans les champs. Selon Lard-ner, ce serait entre la mi-août et la mi-novembre ; selon l'archevêque Newcome qui prend la moyenne, ce serait le 1er octobre; Winer donne une marge plus grande, et n'exclut que la saison froide. En fait, il n'y a aucune donnée positive ; le 2o décembre commença à prévaloir au ive siècle, comme jour de la nativité, et si l'on en croit Léon le Grand, qui mourut en 461, il y avait bon nombre de gens à Rome qui célébraient ce jour bien moins à cause de la naissance du Sauveur qu'en l'honneur du soleil renaissant (Serm. xxi, ch. 6.).

4° Les généalogies. Matthieu 1, 1-16. et Luc 3, 23-38., donnent l'un et l'autre la généalogie de Jésus ; l'un, écrivant pour les Juifs, prend Abraham pour pas de départ; le second, écrivant pour les nations, remonte jusqu'au chef de l'humanité, Adam, et jusqu'à Dieu. Matthieu divise ses générations en trois groupes de quatorze membres chacun ; le premier groupe, période de la promesse, va d'Abraham à David ; il y manque plusieurs anneaux, notamment entre Salmon et Jes-sé. — David, qui est le dernier terme de la première division, compte aussi comme le premier de la seconde ; il est deux fois compris dans les quatorze ; cette seconde période, celle des types rois, s'éttnl jusqu'aux jours de la transportation ; au verset 8., entre Joram et Hozias, il manque trois anneaux, Achazia, Joas, Amatsia;

au verset 11., les meilleures autorités portent simplement : « Et Josias engendra Jéchonias, etc. », en omettant la mention de Jakim, qui n'est qu'une glose, mais la glose bien naturelle d'un copiste qui avait remarqué une lacune, et qui voulait la combler ; seulement elle a été maladroitement comblée. Historiquement, Josias engendra Jéhojakim et ses frères ; Jého-jakim n'engendra que Jéchonias, et peut-être un Sédécias mort bientôt, 2 Rois 23, 34. 2 Chr. 36. 4. cf. 1 Chr. 3,15.16. Les frères de Jéhojakim sont donc les oncles de Jéchonias, et le verset 11 doit se traduire, quant au sens du moins : « Josias engendra (fut le père ou grand-père de) Jéchonias, et ses oncles. » II manque doue à cette division quatre noms au moins, et au lieu de quatorze on en devrait compter dix-huit, ce qui a fait supposer à quelques commentateurs que le v. 17. n'était qu'une note qu'un copiste aurait plus tard fait passer dans le texte; mais l'accord des manuscrits s'y oppose. Il est plus probable que ces quatre noms étaient habituellement omis dans les tables généalogiques, sans qu'il y ait pour cela de motif à nous appréciable (on peut voir une omission semblable dans la généalogie d'Esdras, 7, 1-5. cf. 1 Chr. 6, 3-15.). Dans le troisième groupe (abolition de la royauté et des types rois), Salathiel est noté comme père de Zorobabel (Mat et Luc), tandis que, d'après 1 Chr. 3,19., Zorobabel était fils de Pédaja, son frère ; il faut donc supposer, avec Hug (11,269), que Zorobabel était le fils aîné de Pédaja et de la veuve de Salathiel, qui était mort sans enfants, et que pour cela il fut inscrit sur les registres de Salathiel, conformément à la loi du lévirat, Deu 2î>, 6. Au verset 13, Abiud, et Luc 3, 27., Résa, sont nommés comme fils de Zorobabel ; leurs noms ne se trouvent pas 1 Chr. 3,19., mais cela n'a guère d'importance. Enfin, verset 16., nous voyons en quelque sorte l'esprit de cette généalogie; elle est légale : Jésus descend de David légalement, par Joseph, le mari de Marie ; la formule « engendra » disparaît entre Joseph et Jésus ; après avoir suivi la filiation officielle de Joseph, Matthieu constate que, si Jésus appartient à la famille de Joseph, il ne lui appartient que légalement, civilement, et non selon la chair. Jésus était l'héritier naturel, légitime, de Joseph, puisque Joseph, qui avait d'abord voulu renvoyer Marie, l'avait, sur l'ordre de Dieu, épousée avant la naissance de Jésus, verset 18.; ses droits au trône de David passaient ainsi à celui qui légalement était son fils aîné ; en même temps il doit rester établi pour les lecteurs que Joseph n'était pas le père de Jésus, mais seulement le mari de sa mère.

En comparant les deux généalogies, nous trouvons dans chacune une partie qui commence à David et se termine à Salathiel, mais par deux filiations différentes : Matthieu 1. David Luc 3.S alomon, Nathan

Jéchonias Néri Salathiel Zorobabel, etc.

Ainsi, Matthieu désigne Salathiel comme fils ou descendant de Jéchonias et de Salomon, tandis que Luc le désigne comme fils de Néri et de Nathan. L'hypothèse de Paulus qui, pour écarter la difficulté, suppose deux Salathiel, est trop hardie. On peut voir ailleurs l'explication que nous avons donnée de cette espèce de divergence; Salathiel est fils d'Assir, de fait et de droit, et petit-fils de Néri selon la chair, de Jéchonias selon la loi. v. Salathiel.

On est assez généralement d'accord à supposer, quoique rien ne le dise positivement, que Luc a donné la généalogie de Marie ; les rapports de Joseph à Iléli, verset 23, seraient ceux de gendre à beau-père, relation légale d'ascendance et de descendance, que le texte ne contredit pas, puisque les relations de parenté ne sont indiquées que par la juxtaposition des noms dont l'un régit l'autre, sans indication du degré; le génitif peut sous-entendre père, fils, etc.; le texte porte littéralement : « Fils, comme on l'estimait, de Joseph d'Héli », ces deux noms n'étant pas unis par le mol fils. Il serait étonnant, d'ailleurs, que la descen-

dance directe de Joseph fut indiquée dans la branche de Nathan, lorsqu'on pouvait le rattacher directement à la branche beaucoup plus glorieuse de Salomon. S'il s'agissait, en effet, delà généalogie de Marie, fille d'Héli, Luc l'aurait donnée pour établir que Jésus descendait de David, non seulement selon la loi, mais aussi selon la chair. Marie était réellement de la famille royale, ce qui nous paraît ressortir de Luc 1, 27. (“qui était de la maison de David», se rapporte à « une vierge «); de 2,5., où l'enregistrement de Joseph et de Marie dans le même endroit suppose une même origine et une proche parenté ; enfin etsurtout deRom. 1,3. (Hébr.7,14.), où Jésus est appelé fils de David selon la chair, v. Orig. cont. Celse, et S. Basnage, Ans. I, 88. — Ceux qui pensent que Luc donne, comme Matthieu, la filiation de Joseph, font d'Héli et de Jacob deux frères, dont l'un serait mort sans enfants ; Joseph, le fils aîné du survivant, serait légalement attribué au défunt. — Sur l'ensemble de cet article, dont nous n'avons pu qu'effleurer les difficultés, v. les commentaires, et spécialement en anglais Robinson.

5° Parents de Jésus, a) Marie, sœur de la mère de Jésus, Jean 19, 25., femme de Cléopas ou Alphée. b) Elisabeth, cousine de Marie, Luc1, 36. c) Jacques, Joses, Simon et Judas, frères de Jésus, Jean 7,3. 5.10.1 Cor. 9, S. Mat 12, 46.13. 55. Marc 3, 32. Luc 8,19. Jean 2,12.Act 1, 14. On a voulu donner au mot xfc).?oi le sens de cousins, pour concilier ces nombreux passages avec la soi-disant virginité perpétuelle de Marie ; ce sens est possible, mais il est forcé : on ne comprend pas, en effet, l'affectation avec laquelle les évangélistes emploieraient continuelle-ment le mot frères dans un sens qui n'est pas ordinaire, pour éviter le mot propre, qui ne se prête à aucune équivoque. Plus la chose était importante, plus il importait aussi de la dire de manière à éviter tout malentendu;les apôtres ont employé une expression qui laisse des doutes sur le degré de cette parenté, et il en résulte au moins ceci, qu'ils n'attachaient aucune importance au fait, en effet bien indifférent, de la virginité de Marie. Mais si, à cette régulière répétition du même mot, qui finit par signifier quelque chose, qui n'est plus un accident, mais une intention, nous ajoutons le nom de premier-né donné à Jésus, Mat 1,25., dans un passage où il est parlé des relations de Joseph et de Marie (cf. aussi verset 18., avant qu'ils fussent ensemble), on doit convenir que la probabilité prend un caractère plus déterminé, plus positif. Le fait que ces frères et sœurs sont constamment avec la mère de Jésus, est également caractéristique : ce cortège s'explique s'il s'agit d'enfants, il ne s'explique pas s'il s'agit de neveux et de nièces. On l'a si bien compris, que plusieurs auteurs ont fini par reconnaître qu'il s'agissait là des frères de Jésus, mais frères selon la loi, fils de Joseph, et non de Marie : cette explication lève quelques difficultés, mais elle en laisse subsister d'autres, notamment Mat 1,18.25. Le passage Jean 19, 26., qu'on a parfois invoqué pour prouver que Marie n'avait pas d'enfants, prouve seulement que Jean était plus digne de recueillir la vieillesse de Marie, alors presque sexagénaire, que des frères qui n'avaient pas cru en lui, et qui même une fois avaient voulu faire arrêter Jésus comme aliéné, Marc 3, 21.; il paraît qu'ils furent convertis par la résurrection du Seigneur, Act 1, 14., et que ce fait merveilleux les décida de se joindre à l'Eglise. Les sœurs de Jésus sont mentionnées Mat 13, 56. cf. Marc 6, 3. — d) La tradition fait de Salomé, femme de Zébédée, la sœur de Joseph, père de Jésus ; mais le Nouveau Testament se tait sur cette parenté.

6° Jésus fut élevé à Nazareth, et l'on conclut de Jean 7, 15., qu'il ne fréquenta pas l'école publique (rabbinique) de la ville. Il apprit l'état de son père, suivant l'usage de ce temps, et l'on croit qu'il continua, même pendant sa carrière évan-gélique, d'y chercher, comme les rabbins, une partie de sa subsistance. Une variante assez recommandable de Marc 6, 3. appuierait cette opinion. Ses amis et disciples pourvoyaient du reste à tout ce qui pouvait lui manquer, Luc 8, 3. Marc 15, 41., et dans ses voyages il trouvait une hospitalité distinguée, et des soins qu'il devait aux mœurs de l'Orient, et à la notoriété de ses miracles, Jean 4, 45. 12, 2. Le collège apostolique avait un petit fonds commun, destiné aux besoins les plus urgents, Mat 14, 17. Luc 9, 13. Jean 12, 6. 13, 29. Si Jésus n'était pas riche, Luc 2, 24. Mat 8, 20. 2 Cor. 8, 9. cf. Lév. 12, 8., on ne saurait non plus se le représenter comme pauvre et misérable, cf. Jean 19, 23. Ce serait même contraire à l'analogie de la foi, cf. Ps. 37, 25.

On a fait de nombreuses tentatives pour réunir en une seule biographie tous les détails que les Evangélistes donnent sur la vie de Jésus, mais ces Harmonies ont l'inconvénient d'être fort arbitraires, car il n'y a pas de fil directeur pour guider dans un travail de ce genre. Les Evangiles sont de simples recueils de faits, qui ne ne tiennent que peu ou pas de compte de l'ordre chronologique. Il en résulte que tous les essais qui ont été faits dans ce sens, et celui de Calvin est certainement le plus remarquable, ne peuvent être considérés que comme des présomptions. L'Evangile de Jean donne seul quelques dates, mais peu de faits ; et c'est à ces dates qu'il faut rattacher les faits racontés dans les synoptiques.

Jésus demeurait habituellement à Ca-pernaiim ; il fit son premier miracle à Cana. De là, par Nazareth et Capernaum, il va célébrer à Jérusalem sa première Pâque, Jean 2, 13. C'est après cela qu'il appelle ses apôtres sur les rives du lac de Géné-sareth, Luc 5 ; il visite Gadara et retourne à Capernaum ; appel de Lévi ; fille de Jaï-rus ; sermon sur la montagne ; serviteur du centenier; envoi des douze apôtres; retour à Jérusalem par Béthanie. Seconde ou troisième Pâque. Lavoir de Béthesda, retour à Capernaum, multiplication des pains ; voyage à Tyr et Sidon, Mat 15 ; à Jérusalem par la Pérée ; retour en Galilée; voyage à Césarée de Philippe, et peut-être au mont Hermon où eut lieu la transfiguration (et non sur le Tabor?) Mat 16 et 17, Marc 9, Luc 9; retour à Capernaum, en Pérée, à Béthanie, Luc 9 et 10, Mat 19; il passe le Jourdain et revient à Béthanie, Jean 10 et 11 ; en Ephraïm, à Béthel et Bethsan: à Jé-rico, Luc 19 ; entrée à Jérusalem ; dernière Pâque. —Celui qui voudra se donner la peine d'essayer pour son compte une harmonie des quatre Evangiles, en comprendra tout ensemble les difficultés et l'utilité. L'esquisse que nous en donnons fera comprendre l'une, le travail seul fera comprendre l'autre. On trouvera un plan approximatif des voyages de Jésus, dans le Bibel-Atlas de Weiland et Acker-mann ; c'est une carte qui manque au Scripture-Atlas de Bagster.

La liste complète des miracles, et celle des paraboles du Sauveur, se trouve dans Bickersteth, Considérations sur l'Ecriture sainte, p. 98 et 108.

7° La durée de son ministère ne peut être déterminée d'une manière exacte et sûre. On trouverait les éléments de cette recherche dans le nombre des Pâques que Jésus a célébrées, mais les trois premiers evangélistes ne mentionnent que la dernière, et Jean qui parle de cinq fêtes juives que Jésus aurait faites à Jérusalem, outre une Pâque qu'il a passée en Galilée, ne les détermine pas assez nettement pour qu'on en puisse rien conclure à coup sûr. Trois Pâques au moins sont cependant indiquées : la première, Jean 2, 13., peu après le baptême de Jésus, ainsi presque au commencement de son ministère; la seconde, Jean 6, 4., Jésus est en Galilée; la troisième et dans tous les cas la dernière, Jean 12 et 13. Le ministère de Jésus aurait ainsi duré un peu plus de deux ans. Mais si la fête des Juifs, Jean 5, 1., doit être entendue de la Pâque, ce serait une année de plus qu'il faudrait ajouter à la durée de sa carrière publique. Sans entrer dans des détails qui sont du ressort des commentaires, on peut dire que le mot fête, même sans article, désigne souvent la Pâque, Mat 27, 15. Marc 15, 6. Luc 23, 17. cf. Jean 18, 39.; que Jean, qui a l'habitude de mesurer le temps par les fêtes, n'a pas voulu dire simplement qu'il y avait une fête, mais la fête, ce qui semble se rapporter plus spécialement à la Pâque; qu'il ne peut guère être question ici, ni de la fête de Pentecôte, ni de celle des Tabernacles, ni de celle de Purim, quoique ce soit l'opinion de Keppler, proposée pour la première fois en 1615, et adoptée aujourd'hui par Hug, Neander,

Olshausen, Tholuck, Meyer, Wieseler; que la plupart des auteurs anciens et modernes se prononcent pour la Pâque ; ainsi Irénée : « Et posthac iterum secundâ vice adscendit (Jésus) in diem Paschse in Hie-rusalem, quando paralyticum, quijuxta natatoriam jacebat xxxvm annos, cura-vit, etc. ; » c'est l'opinion d'Eusèbe et de Théodoret, de Luther, Scaliger, Grotius, Lightfoot, Leclerc, Lampe, Hengstenberg, Greswell, etc. Cyrille et Chrysostome, Erasme, Calvin, Bèze et Bengel, pensent qu'il s'agit de la Pentecôte. Lucke et De Wette laissent la question indécise.

On voit que les limites de la vie publique de Jésus sont entre deux ans et demi et trois ans et demi. D'après ce que nous avons dit de l'époque de sa naissance, et en se rappelant qu'il commença son ministère à l'âge d'environ trente ans, il serait mort à l'âge de trente-deux ou trente-trois ans, et vers l'an 28 ou 29 de 1ère chrétienne ; les termes extrêmes sont l'an 781 et l'an 783 de Rome, quoique plusieurs pères de l'Eglise le fassent mourir à un âge beaucoup plus avancé, quarante ou cinquante ans, et ne lui donnent en outre qu'une carrière publique de huit à dix mois, d'un an au plus. v. Winer, Realw.

8°. Calme et tranquille dans la pacifique révolution qu'il apporte au monde, Jésus ne veut pas démolir le judaïsme avant d'avoir établi le christianisme. Il continue d'observer lui-même les prescriptions de la loi, et s'il les maintient dans toute leur sévérité, en opposition à la lâche tolérance des prêtres d'alors, c'est peut-être pour constater une dernière fois qu'il est impossible à l'homme d'être sauvé par les œuvres. En observant la loi il en détermine l'esprit. Il fait du bien à tous, aux païens comme aux Juifs, au centenier de Capernaum, à la syrophénicienne, comme à Jaïrus, le chef de la synagogue ; il supporte les intolérants Samaritains, et les protège contre l'intolérance de ses disciples; il ne craint pas de s'entretenir publiquement avec une femme de cette nation détestée des Juifs; peu soucieux de l'opinion publique, et la bravant, il s'établit en Galilée, et choisit ses amis et ses disciples parmi les humbles et méprisés Galiléens, protestant ainsi de diverses manières contre les préjugés de l'orgueil humain,de l'orgueil national, de l'orgueil hiérarchique, et de l'orgueil personnel. Il pardonne aux pécheurs, il est l'ami des pauvres, des péa-gers, des gens de mauvaise vie ; il habite avec eux, et les reprend avec douceur, les relevant au lieu de les abaisser; il semble n'avoir de paroles sévères que pour les grands de ce monde et les dignitaires du temple ; Hérode est un renard, les prêtres et tout ce qui est à leur dévotion, une race de vipères. On le voit pleurer avec ceux qui pleurent, avec la veuve de Nain, avec la famille de Lazare; l'amour est le fond de son caractère ; il embrasse tout, il supporte tout ; il aime tout ce qui a un cœur d'homme, il aime surtout les faibles et les chétifs ; c'est aux pauvres que l'Evangile est annoncé ; il représente l'humanité dans le sens le plus large ; il prêche la fraternité universelle. On ne doit donc pas s'étonner de voir son nom devenir si populaire, de son vivant encore, et servir aux générations de dix-huit siècles, comme unsym-bole de ce qu'il y a de plus divin dans l'humanité ; là même où l'Eglise l'a méconnu, le peuple l'a reconnu et revendiqué, souvent mal à propos et dans l'ignorance, mais cette ignorance est la faute de ceux qui ne l'ont pas compris eux-mêmes, lorsqu'ils étaient chargés de l'ex-pliquer. Aux jours de Jésus le peuple attendait le libérateur d'Israël, mais un libérateur terrestre; et dans tous les temps Jésus a été considéré par les peuples comme le représentant d'un libéralisme politique; c'est une erreur qu'il faut imputer avant tout à ceux qui ont voulu faire du christianisme un moyen de régner, et qui n'ont pas voulu comprendre que son règne n'est pas de ce monde.— v. Bastie, Démocratie et Religion, p. 29. 9°. Les ouvrages les plus importants à consulter sont, outre les commentaires : la Vie de Jésus par Hess, écrite surtout en vue de l'édification; la”Vie de Jésus, par Néander, écrite davantage au pas de vue scientifique et dogmatique; divers fragments de Herder dans ses Œuvres mêlées, et la plupart des voyages en Palestine. En français nous n'avons presque rien ; aucune vie de Jésus proprement dite ; quelques travaux spéciaux seulement, et limités dans leur but; quelques traductions de l'allemand, Sander, Olshausen ; puis, sur l'Oraison dominicale, Bonnet, les Discours du pasteur Bri-del, de Lausanne, et les Conférences de J. Martin, de Genève; la Famille de Bé-thanie, par Bonnet; quelques travauxdog-matiquesdeMalan, Gaussen, Roussel; sur son Procès, l'ouvrage de M. Dupin; sur sa Passion, un grand nombre de discours (Saurin, Ad. Monod, H. Monod, Grand-pierre), et de recueils, parmi lesquels nous citerons Francillon, Galland, Dar-dier, les Homélies du R. P. Innocent, trad. du russe par A. de Stourdza, les Conférences de J. Martin, etc. Nous rappelons aussi pour mémoire l'ouvrage fabuleux du docteur Strauss, et les nombreuses réfutations dont il a été l'objet.

10”On ne possède aucune donnée authentique sur la figure et la taille du Christ; les représentations et portraits les plus anciens qu'on en a faits, n'ont aucune valeur historique : ainsi, la statue d'airain que lui érigea, dit-on, à Panéas (Césarée), l'hémorrhoïsse qu'il avait guérie, monument qui fut détruit par ordre de l'empereur Julien; ainsi, le portrait que Jésus aurait lui-même envoyé à Abgare, roi d'Edesse; ainsi, le saint mouchoir qui aurait servi à essuyer sa sueur, et aurait reçu miraculeusement l'empreinte de sa ligure (le même qui a dernièrement pâli à Rome, et dont les yeux ont lancé des éclairs d'indignation à propos de la ruine commencée de la papauté); ainsi, les portraits que Luc aurait faits de Jésus, de Marie et de plusieurs apôtres ; ainsi encore, la description qu'en a donnée un employé romain, Publius Lentulus, et dont les textes varient considérablement : « Capillosverô circinos et crispos,

barbam habens copiosam et rubram, .... bifurcatam, etc. » Ce que l'on peut dire, c'est que, selon toute probabilité, Jésus n'avait pas de défauts corporels, qu'il n'avait rien non plus de bien saillant dans son extérieur, puisque Marie l'a pu prendre d'abord pour le jardinier, que les disciples d'Emmaus, et une autre fois les apôtres, au bord du lac de Tibériade, sont restés quelques moments avant de le reconnaître. Sa physionomie devait refléter la grandeur de son âme, et cet amour de l'humanité qui était le fond de son caractère et le mobile de sa mission; il devait enfin porter l'empreinte de la souffrance. Son regard et sa voix paraissent avoir eu quelque chose de particulièrement puissant. Quelques pères, Clément d'Alexandrie, Origène, ont cru, mais à tort, pouvoir conclure de Es. 53, 2. que l'extérieur du Seigneur était méprisable et repoussant, mais ce v. se rapporte plutôt à sa mission et à sa condition qu'à son corps et à sa figure. —On peut voir dans Calvin quelques détails de plus sur ce sujet, et la nomenclature des reliques nombreuses qu'on prétend avoir conservées de Jésus, depuis le jour de sa naissance et de sa circoncision jusqu'au jour de son ascension.

JÉTHER, Jug. 8, 20. (1245 av. C), fils aîné de Gédéon, refusa de mettre à mort Zébah et Tsalmunah chefs de Madian, parce qu'il était trop jeune. — 2° Israélite d'après 2 Sam. 17, 23., Ismaélite d'après 4 Chr. 2, M. (Ce dernier est le plus probable, mais en tout cas il était prosélyte). Il épousa Abigaïl sœur de David, et fut père d'Hamasa, I Rois 2, 5.; il portait aussi le nom de Jilhra.

JÉTHRO, ou Réhuel, Ex. 2,18. (1534 av. C), prince et sacrificateur de Madian, devait ces titres peut-être à ses richesses ou à sa grande sagesse ; il donna une de ses filles en mariage à Moïse, qui les avait protégées contre les attaques de bergers avides et paresseux, et retint son gendre auprès de lui, lui confiant la garde de ses troupeaux. Ils durent cependant bientôt se séparer, et Jéthro ne revit Moïse que lorsque celui-ci était à la tète de toute la multitude d'Israël, dans le désert au pied du Sinaï. Jéthro, par ses conseils, compléta ce qui pouvait manquer encore à la paix et au bonheur matériel du peuple et de Moïse, en suggérant à ce dernier l'idée de se faire soulager dans ses fonctions de juge, par des juges inférieurs établis sur cinquante, sur cent, sur mille Israélites, et qui ne feraient remonter jusqu'à lui que les causes difficiles. Lorsque Jéthro retourna dans son pays, il laissa auprès de Moïse Hobab, son fils, qui l'avait accompagné, et qui devait servir de guide aux Israélites dans les solitudes qu'ils traversaient. Ex. 3, 1. 18, 1.

Jéthro descendait d'Abraham par Ké-turah ; quoique placé en dehors du peuple béni, il avait conservé quelque connaissance du vrai Dieu, sa foi avait pu être éclairée et fortifiée par ce qu'il avait vu et entendu précédemment ; elle le fut davantage encore par les récits de Moïse, et par l'ouïe de toutes les délivrances mer-veilleuses que Dieu avait accordées à son peuple, et il n'hésita pas à se joindre à Moïse et aux anciens pour offrir un sacrifice en l'honneur de l'Eternel, grand pardessus tous les dieux.

JÉTUR, Naphis et Nodab, 1 Chr. 5, 19., Hagaréniens, chefs de tribus ismaélites ; les deux premiers descendaient d'Ismaël, Gen. 28, 15., mais Nodab était d'une autre famille, à moins qu'il ne soit le même que Kedma ou tel autre des fils d'Ismaël nommés dans ce passage.

JEUNE, exercice d'abstinence qui a été dans tous les temps et dans tous les pays une marque de deuil et d'affliction, parce qu'il en est la manifestation naturelle. En Orient surtout, et les mahométansont encore leur ramadan, ou jeûne d'un mois, le jeune a joué un grand rôle dans les cérémonies religieuses, et l'on peut dire qu'il est plus qu'une cérémonie ; c'est un acte, mais individuel, recommandé même par l'exemple et par les préceptes de Jésus et de ses apôtres. On peut le considérer comme acte de pénitence, eu comme préparation de fait à une vie moins charnelle, moins terrestre, plus pure. Les anciens le considéraient davantage sous le premier pas de vue, les chrétiens doivent s'attacher davantage au second. Chez les Juifs comme chez tous les Orientaux, le jeûne était l'expiation des fautes passées, le moyeu de prévenir les châtiments divins, cf. Jon. 3, 5., une espèce de sacrifice, surtout le sacrifice des pauvres. Pour le chrétien ce doit être un préservatif contre les passions, un moyen presque naturel de les amortir et de les mater, une sorte de crucifixion de la chair, un protecteur, trop négligé des chrétiens, contre l'influence d'un corps de péché qui devrait être dompté et soumis à l'esprit.

La loi de Moïse était du reste bien sobre en préceptes relatifs au jeûne ; une seule fois dans tout le cours de l'année, dans le jour solennel des expiations, le jeûne le plus sévère était ordonné aux Hébreux, Lév. 4 6, 29. 23, 27. cf. Act 27, 9.; ils devaient alors s'abstenir non seulement du manger et du boire, mais encore de toutes les autres jouissances matérielles qui les auraient éloignés des préoccupations sérieuses auxquelles ils devaient, se livrer. D'autres jeûnes, mais spéciaux, individuels ou facultatifs, sont mentionnés dans l'histoire sacrée, celui de Josué, 7, 6., celui des onze tribus, Jug. 20, 26., celui des Juifs en Mitspa, 1 Sam. 7, 6., celui de David, 2 Sam. 12, 16.; v. encore Jon. 3, 5. Joël 2, 12. Jér. 36, 9. I Rois 21, 12. 2 Chr. 20, 3. 1 Sam. 31, 13. — Après l'exil, des jeûnes furent établis régulièrement : en mémoire de la ruine de Jérusalem et du temple au cinquième mois, Zach. 7, 5. cf. 2 Rois 23, 8. Jér. 52, 12.; de la mort de Guédalia et des Juifs qui étaient avec lui, 2 Rois 25, 25. Jér. 41, 1.; de la première invasion des Caldéens à Jérusalem, au quatrième mois, Jér. 52, 6.; du commencement du siège au dixième mois, 2 Rois 25,1. Zach. 8, 19., et d'autres événements plus ou moins affligeants de l'histoire nationale juive ; et la passion des jeûnes vint au pas qu'ils en établirent un au huitième jour du quatrième mois contre la traduction des Septante. Le sanhédrin en prescrivait aussi quelquefois d'extraordinaires, lorsque la terre était menacée de sécheresse, ou dans l'attente de toute autre calamité publique ; alors les animaux eux-mêmes pouvaient être obligés de jeûner, Jon. 3, 5. 7., et Virgile fait dire à un berger déplorant la mort de César, que les animaux eux-mêmes jeûnèrent en cette occasion :

Non ulli pastos illis egere diebus Frigida, Daphoi, boves adflumina; nulla neque amnem Libavit quadrupes, nec graminis attigit herbam. (EGLOG. 5, 24.)

On voit des jeûnes de famille ( dans les mêmes circonstances où nous les trouverions chez nous, si cette coutume avait su s'établir dans nos mœurs faibles et sensuelles), 1 Sam. i, 7. 20, 34. 31, 13. 2 Sam. 1,12.1 Rois 22,27. Esd. 10, 6. Néh. I, 4., et quelquefois dans l'attente d'un malheur prochain, et pour le détourner, 2 Sam. 12,16. Est. 4, 16. Tob. 1,12.

Au temps de Christ, le jeûne avait at-teint en importance des proportions un peu trop colossales : à défaut de piété on avait cherché la religion dans les pratiques et dans le jeûne; les personnes pieuses savaient jeûner et se réjouir dans l'attente d'un Sauveur, Luc 2, 37.; les autres ne savaient que jeûner ; pour eux jeûner c'était tout ; les disciples de Jean-Baptiste, qui n'étaient pas encore entrés dans la vive lumière de l'Evangile, partageaient les préjugés des mérites du jeûne, Mat 9, 14.; les pharisiens étaient dévoués à cette idée, etils se montraient jeùnantdeux fois par semaine, Mat 9, 14. Luc 18, 12., le cinquième jour de la semaine auquel Moïse monta sur le Sinaï, et le second auquel.il en descendit. Les esséens et les thérapeutes jeûnaient aussi beau-coup, et si plusieurs d'entre eux étaient animés de sentiments pieux et vraiment israélitiques, plusieurs aussi ne voyaient non plus dans leur jeûne qu'un mérite dont ils s'enorgueillissaient.

On voit que Daniel se préparait par le jeûne aux révélations divines, 10, 3. 9, 3. C'est aussi par le jeûne que se préparait l'exorcisme de ceux qui étaient possédés de mauvais esprits, Mat 17, 21., et les apôtres n'imposaient les mains aux anciens qu'après avoir jeûné avec prières, Act 13, 3. 14, 23., toujours afin de diminuer les forces de la chair et de dégager l'esprit de son enveloppe.

Les Israélites jeûnaient ordinairement d'un soir à l'autre, mais jamais aux jours de sabbat ou de fête, et cette longue abstinence leur était plus facile qu'à nous à cause de l'ardeur de leur climat. Quelquefois le jeûne se prolongeait de plusieurs jours, et alors l'abstinence ne portait que sur les aliments les plus substantiels, Dan. 10, 3. On voit cependant, Est. 4, 4 6., l'exemple d'un jeûn e entier de trois jours. Quant aux deux jeûnes de quarante jours, celui de Moïse et celui de Jésus, ils sortent de la règle et des moyens ordinaires, et on ne peut pas mieux les expliquer que les nier, Ex. 24. 18. Deu 9, 9. 18. Mat 4, 2.

Jésus ne prescrivit aucun jeûne à ses apôtres, Mat 9, 14., cependant ils continuèrent longtemps d'observer les jeûnes judaïques, Act 13, 2. 14, 23. 2 Cor. 11, 27., et les premiers chrétiens jeûnaient, soit seuls, soit ensemble, mais volontairement.

Voici quelques paroles de l'abbé Fleury sur le jeûne; il regrette les anciens temps, et après avoir cité pour modèles les Juifs, les apôtres et les premiers chrétiens, il ajoute : « Je sais que l'on est aujourd'hui peu touché de ces exemples. On croit que ces anciennes austérités ne sont plus praticables. La nature, dit-on, est affaiblie depuis tant de siècles. On ne vit plus si longtemps. Les corps ne sont plus si robustes. Mais je demanderais volontiers des preuves de ce changement ; car il n'est pas ici question des temps héroïques de la Grèce, ni de la vie des patriarches ou des hommes avant le déluge : il s'agit du temps des premiers empereurs romains, et des auteurs grecs et latins les plus connus. Que l'on y cherche tant que l'on voudra, on ne trouvera pas que la vie des hommes soit accourcie depuis seize cents ans. Dès lors, et longtemps devant, elle était bornée à soixante-dix ou quatre-vingts ans. Dans les premiers siècles du christianisme, quoiqu'il y eût encore quelques Grecs et quelques Romains qui pratiquassent les exercices de la gymnastique pour se faire de bons corps, il y en avait encore plus qui s'affaiblissaient par les débauches, particulièrement par celles qui minent le plus la santé, et qui font qu'aujourd'hui plusieurs d'entre les Levantins (Orientaux) vieillissent de bonne heure. Cependant de ces débauchés d'Egypte et de Syrie sont venus les plus grands jeûneurs, et ces grands jeûneurs ont vécu plus longtems que les autres hommes. »

JEUX. Les Hébreux n'étaient riches en divertissements d'aucun genre ; leur caractère était trop sérieux, leur éducation trop sévère, leur religion trop pure, même dans son formalisme. Les vers de Racine le font admirablement sentir :

Quels sont donc vos plaisirs ? — Quelquefois à l'autel Je présente au grand prêtre ou l'encens ou le sel : J'entends chanter de Dieu les grandeurs infinies ; Je vois l'ordre pompeux de ses cérémonies.

Sans doute, les enfants s'amusaient quelquefois ; on les voit jouer dans les rues, Zach.8, 5. Mat 11, 16.; Job 40, 24. semble indiquer qu'ils aimaient à apprivoiser des oiseaux, et Zacharie, 12, 3. qu'ils connaissaient le jeu du disque ou un exercice gymnastique de ce genre, comme le jet de la pierre des montagnards suisses. Ce sont les seules traces qui nous soient laissées de divertissements quelconques; et du reste, on ne trouve chez eux aucune sorte de jeux particuliers, pas même le jeu de dés si usité chez les anciens, ni jeux de hasard, ni jeux de représentations, ni théâtres, ni courses de chevaux, ni combats d'hommes ou d'animaux. Et Salomon, qui avoue qu'il ne s'est refusé aucun plaisir, ne parle de rien de semblable (Calmet) ; il ne parle que de beaux bâtiments, de jardins, de vignes, de vergers, de réservoirs d'eau, de bonne chère, d'amas d'or et d'argent, de musiciens et de musiciennes. Dans le passage 2 Sam. 2, 14., il n'est pas question d'un jeu, mais d'un véritable combat. La musique, Lam. 5, 14., le chant et la conversation aux portes de la ville étaient les seuls délassements des Hé-breux, leurs seules distractions. Plus tard, après l'exil, lorsqu'ils se corrompirent par le contact des Grecs, ils acceptèrent leurs jeux, et les pontifes eux-mêmes introduisirent dans les écoles publiques et dans les gymnases la lutte, la course, le palet, 2Macc. 4,12. cf. 1 Macc. 1,15.; puis quandà la domination grecque eut succédé la domination romaine, les Hérodes firent construire des théâtres et des amphithéâtres en plusieurs villes de la Palestine, et y firent représenter des pièces et des jeux de tous genres, divertissement fort honnête, fort innocent en lui-même, qui tendait seulement à faire aimer les choses visibles au détriment des choses invisibles, et qui ne prépara pas les cœurs à recevoir le roi humble et débonnaire qui allait venir. — Saint Paul fait quelques allusions aux jeux et aux combats des Grecs: 1 Cor. 9, 24. 27. 2 Tim. 2, 1.5.; peut-être aussi 1 Cor. 1S, 32. cf. 4, 9., quoiqu'il ne soit pas très sûr(Ruckert) que les bêtes féroces dont il est parlé dans ce passage, soient de celles auxquelles on livrait quelquefois les malfaiteurs pour satisfaire la curiosité théâtrale du public ; une des principales objections, c'est que Paul était citoyen romain, et que cette qualité devait le soustraire au supplice, mais son titre n'a pas toujours été connu ou respecté, cf. Act 16, et dans un mouvement de cruauté populaire l'on aura pu n'y pas avoir égard et le méconnaître. JÉZANIA. v. Hazaria 7°.

JIBLÉBAM, ville de la tribu de Ma-nassé en deçà du Jourdain, Jos. 17, 11. 2 Rois 9, 27. Elle fut longtemps habitée par les Cananéens, Jug. 1, 27. C'est la même que Bilham, I Chr. 6, 70.

JIGDALIA, fils de Hanan, Jér. 35, 4., homme de Dieu ou prophète, entièrement inconnu.

JIRÉIJA, Jér. 37, 13 (587 av. C), officier de Sédécias; il arrêta, à la porte de Benjamin, le prophète Jérémie qui voulait quitter Jérusalem, dont il attendait la destruction, et se retirer en Benjamin. Tu vas te rendre aux Caldéens, lui dit-il, et il le conduisit devant les chefs ses ennemis, qui le firent battre de verges et jeter en prison.

JISBAH, fils de Méred et père ou chef d'Estemoah, ville de Juda, 1 Chr. 4, 17. Jos. 1o, 50 (P).

JISCA, Gen 11, 29., fille de Haran le frère d'Abraham, et par conséquent nièce de ce dernier ; elle était sœur de Milca, qui épousa son oncle Nacor, aussi frère d'Abraham. Quelques-uns pensent que c'est la même qui prit plus tard le nom de Saraï et devint épouse d'Abraham ; cependant cela est peu probable à cause de Gen. 20, 12.

JITHNAN, ville de Juda sur la frontière de l'Idumée, Jos. 15, 23., à 6 milles d'E-Ieuthéropolis du côté d'Hébron, d'après Eusèbe. JITHRA. v. Jéther 2°. JIZRAB1A, 1 Chr. 7, 3., arrière-petit-fils d'issacar, eut quatre enfants, et sa postérité sous David comptait déjà 36,000 hommes en état de porter les armes ; l'historien sacré explique par la polygamie ce prodigieux accroissement.

JIZRÉEL, Jesréel, ou Esdraelon, était une ville de la tribu d'Issacar, Jos. 19, 18.; elle fut longtemps la résidence du roi Achab, 1 Rois 18, 45. 21, 1., et après lui de sa veuve Jésabel, 2 Rois 9, 30., qui l'a rendue célèbre par l'histoire de la vigne de Naboth, 1 Rois 21,1. 2 Rois 9,10. D'après Eusèbe, elle était située entre Scy-thopolis et Légion, à 12 milles de la première selon Jérôme, et à 10 de la dernière, non loin de Dothaïn, Judith, 3, 11. La source qui se trouve dans son voisinage, 1 Sam. 29, I., porta plus tard le nom de Tubania, et allait jeter ses eaux dans le Jourdain du côté de Scythopolis. La plaine de Jizréel, Jos. 17,16. Jug. 6,33. Os. 1, S., s'étendait de tous les côtés à l'eutour de la ville, depuis le Carmel jusqu'au Jourdain à la sortie du lac de Génésareth ; elle touchait, au nord, aux montagnes de la Galilée, vers le pied du mont Thabor, au sud aux montagnes d'Ephraïm ; le Kison la traversait dans presque toute son étendue, et lui donnait une richesse de fertilité qui n'est pas perdue de nos jours, quoiqu'elle ait considérablement diminué. Un grand nombre de batailles s'y sont livrées, car la plaine de Jizréel était bien faite pour séduire ceux qui aiment à étendre de longues colonnes d'armées : outre les combats rapportés dans l'Ecriture, Jug. 4, 13. 6. 33. 1 Sam. 29, 1. 31,4. 1 Rois 20, 26. 2 Rois 23, 29. 1 Macc. 12, 49., il faut compter encore la sanglante bataille des Juifs contre Ves-pasien, la rencontre des croisés et de Sa-ladin, la défaite des Turcs par Ronaparte en 1799, et un combat plus sanglant, plus acharne, définitif, que l'Ecriture semble annoncer comme devant se livrer dans cette célèbre plaine à la fin des temps.

C'est par la plaine de Jizréel que passait la grande route de Samarie à Jérusalem. Les voyageurs qui l'ont parcourue ne sont pas d'accord sur son étendue, et varient entre 10 et 20 milles de longueur et 7 à 12 de largeur.

2° Ville de Juda, Jos. 15, 86.

3° Un fils de Hétham, de la tribu de Juda, i Chr. 4, 3.

4”Fils d'Osée et de Gomer la femme

débauchée, Os. 1, 4.

JOAB, 1°, 1 Chr. 4, 14., fils de Séraja, fonda une colonie d'ouvriers à Ono, dans une vallée de Benjamin voisine du Jourdain, cf. Néh. 11, 35.11 était petit-fils de Kénaz et neveu de Hothniel, le premier des juges, Jug. 1, 13. A cette époque, qui n'était pas fort éloignée du séjour de l'Egypte, les Israélites avaient, comme on voit, conservé la connaissance des arts et métiers que leurs pères avaient appris pendant la servitude, et qu'ils avaient eu l'occasion d'exercer encore pendant le voyage du désert.

2° Joab, neveu de David par Tséruïa fille d'Isaï, 1 Sam. 26, 6. 2 Sam. 8, 16. 17, 25. 23,18.1 Chr. 2,16.18,15.27, 7. (1053 av. C). Il devint général en chef des troupes de son oncle, et fut redevable de son avancement aussi bien à ses grands talents militaires qu'à ses liens de parenté avec le roi. Il commanda, avec ses frères Hazaël et Abisaï, les troupes de David contre Abner, lorsque David n'avait encore pour lui que la tribu de Juda; vainqueur, il vengea la mortd'Hazaël en tuant Abner dans un guet-apens. Puis lorsque David eut été reconnu roi de tout le pays et qu'il eut transporté sa résidence de Hé-bron à Jérusalem, Joab ayant enlevé aux Jébusiens la colline de Sion qu'ils occupaient encore, il fut nommé chef suprême de l'armée, 2 Sam. 10, 7.11,1.1 Rois 11, 15., et on ne le voit qu'une seule fois à la tète d'une division sous les ordres de David, 2 Sam. 18,2. Il fit ensuite la guerre d'Idumée, Ps. 60,1., et le siège de Rab-bath-Hammon où périt Urie, qu'il exposa lui-même sur l'ordre de David.

Pendant l'exil d'Absalon, Joab le servit auprès de son père et réussit à opérer un rapprochement momentané, qu'il ne voulut ou n'osa pas même solliciter complet; cependant Absalon ayant fait incendier les champs de Joab, celui-ci, fatigué des importunes instances d'Absalon, finit par intercéder pour lui auprès du roi, et obtint qu'il pût rentrer à la cour. Mais, soit qu'il en voulût à Absalon pour le procédé dont il s'était servi, soit qu'à tout prendre il préférât le roi légitime à un usurpateur dont il était peut-être jaloux, il ne s'associa pointa la conjuration, resta fidèle à David, battit Âbsalonà la bataille d'Ephraïm et le tua malgré les ordres exprès du roi, 2 Sam. 18. Ce meurtre resta impuni devant la loi, mais David remplaça Joab par Hamasa, et le favori disgracié ne put reprendre sa place que par un nouveau meurtre, celui de son rival, 2 Sam. 20, 7. Il continue alors le siège d'Abel, où s'était réfugié Sébah, et ne se retire qu'après la mort du rebelle. De retour auprès de David, il entreprend mal-gré lui le dénombrement du peuple, qu'il déconseille, 1 Chr. 21 ; puis, ne pouvant oublier l'affront qu'il a reçu, toujours irrité contre David, voyant ce roi devenir vieux, il cherche à se mettre dans la faveur d'Adonija, qui aspire à la couronne; mais, au milieu d'un banquet des conjurés, arrive le bruit du sacre de Salomon et des mesures royales qui sont prises pour prévenir la réussite du complot. Joab s'enfuit à Gabaon, le sort d'Abia-thar l'effraye, celui d'Adonija, frère de Salomon, l'effraye plus encore;ilse cramponne à l'autel, mais Bénaja se jette sur lui, et, malgré la sainteté du lieu, le met à mort sur l'ordre réitéré de Salomon, à qui David avait laissé l'ordre de ne pas l'épargner, 1 Rois f, S. sq.

Ainsi .mourut ce grand et sanguinaire capitaine, expiant à la fois quatre grands crimes qui, tous les quatre, avaient eu leurs excuses ( quel crime n'en a pas ! ), le meurtre d'Abner qui avait tué Hazaël, le meurtre d'Absalon qui avait été rebelle, celui d'Hamasa qui avait aussi commencé par la révolte, enfin la conjuration d'Adonija, qui se présentait comme l'aîné des fils et le prétendant légitime. Ambitieux, mais sage et prudent, il a su toute sa vie détruire ou ménager, selon que cela lui était avantageux. Il a attendu la vieillesse pour commettre une imprudence, et elle lui a coûté cher ; il tenait à la vie et n'a pu la sauver, malgré sa passive résistance. Son nom est rappelé, 1 Chr. 26, 28., parmi ceux qui consacrèrent à Dieu les dépouilles des vaincus.

JOACHAZ. v. Jèhoachaz 3°.

JOAD. v. Jéhojadah.

JOAS. 1° Père de Gédéon, de la tribu de Manassé (1245 av. C), Jug. 6,11. 7, 14. 8, 13. Longtemps idolâtre, il avait chez lui un autel de Bahal, et un bocage près de sa demeure, mais lorsque son fils eut porté la main sur ces tristes objets d'un faux culte, il comprit lui-même la grandeur de son péché, et n'hésita pas à se joindre à Gédéon contre ceux qui venaient lui demander raison de sa conduite ; il eut le bonheur d'être plus ferme dans le bien qu'il ne l'avait été dans le mal.

2° Joas, 1 Rois 22, 26. 2 Chr. 18, 25., appelé fils du roi (d'Achab, peut-être, par une femme de second rang), ou filsd'Ham-mélec (inconnu). C'est à lui que fut confiée la garde du prophète Michée pendant l'expédition d'Achab contre le roi de Syrie.

3° Joas, huitième roi de Juda, occupa le trône pendant quarante ans (878-838). Il était le seul des fils d'Achazia qui eut échappé à la cruauté de sa grand'mère, l'usurpatrice Hathalie. Elevé sur le trône à l'âge de sept ans, par les soins du souverain sacrificateur Jéhojadah, qui lui avait conservé la vie et la couronne, il marcha dans les voies de la piété aussi longtemps qu'il fut sous la direction de ce cher et vénérable parent, et son royaume prospéra ; il s'occupa entre autres, avec beaucoup de zèle, de la restauration du temple. Mais après la mort de Jéhojadah, il paraît qu'il tomba sous l'influence des grands du royaume, qui, enclins au vice et à l'idolâtrie, supportaient avec impatience le joug de la religion, et qui l'entraînèrent même à faire mourir le prophète Zacbarie, fils de f en bienfaiteur Jébojadah, dont les reproches irritaient leurs consciences. Dès lors son histoire ne présente plus qu'une suite de malheurs. Sa noire et honteuse ingratitude envers son frère adoptif fift punie, et ceux qui la lui avaient suggérée n'échappèrent pas au malheur commun ; il se vit menacé d'une invasion des Syriens, ses armées furent défaites par des ennemis bien moins nombreux, et il dut racheter sa couronne et son indépendance au prix des trésors du temple ; enfin il se forma une conjuration contre lui, et il périt sous le fer des assassins, 2 Rois 11 et 12, 2 Chr. 23 et 24. Il fit le bien ou le mal, suivant qu'il fut bien ou mal conseillé ; il ne manqua pas d'énergie, mais de volonté, et ce qu'on lui lit vouloir, il sut l'exécuter avec résolution ; triste résolution qui a imprimé à sa mémoire une tache ineffaçable. S'il devait mal finir il eût mieux valu pour lui qu'il n'eût pas bien commencé.

4° Joas, fils et successeur de Joachaz, fut le douzième roi d'Israël, et régna seize ans (840-823). Ce que l'histoire sacrée nous dit de lui nous donne l'idée d'un caractère assez mélangé. D'un côté l'on voit chez lui un certain courage, un certain degré de foi, quelque confiance, et beaucoup d'estime pour le prophète Elisée ; de l'autre, il paraît avoir suivi les égarements de ses prédécesseurs, et être resté fidèle au culte du veau d'or. Il pleura quand il apprit que le prophète était près de sa fin; il vint le voir et frappa trois fois la terre de ses flèches ; c'était un oracle, et Elisée lui dit qu'au lieu d'exterminer les Syriens il ne les frapperait qu'en trois rencontres ; il réussit en effet à reprendre aux Syriens quelques villes situées sur la rive droite du Jourdain, que son père avait perdues, mais il ne poussa pas plus loin ses avantages. Il fut également heureux contre Amatsia, roi de Juda. Malgré ses efforts pour maintenir la paix, il dut prendre les armes et pénétra jusque dans Jérusalem, qu'il rançonna, et qu'il laissa ainsi appauvrie et ruinée à son roi naturel, dédaignant de le détrôner, 2 Rois 13, 9-25. U, 1-18. 2 Chr. 25. — A tout prendre, pour un roi d'Israël, il n'a pas été un mauvais roi, et sa mémoire ne doit pas être sans estime. Son nom est rappelé Os. 1,1. Am. 1,1.

JOB. L'idée principale de tout le livre qui porte le nom de Job, revient à cette question dont plusieurs autres documents de la littérature hébraïque se sont aussi occupés, l'Ecclésiaste par exemple : Pour quoi l'homme le plus pieux est-il souvent le plus souffrant, tandis que les plus méchants peuvent se réjouir dans l'abondance du bonheur? L'auteur répond à cette question, non par le raisonnement, mais par une résignation pieuse ; il n'en sait rien : c'est une hardiesse coupable de se permettre des jugements sur les intentions cachées de Dieu, parce que l'expérience montre toujours que si Dieu impose des souffrances aux hommes pieux, ces souffrances servent à leur véritable bien, et seront pour eux la source de joies d'autant plus grandes, d'autant plus excellentes ; il y aurait, par conséquent, de l'injustice à tirer du bonheur ou du malheur d'un homme des conclusions à l'égard de ses dispositions morales.

Cette idée n'est pas développée seulement par une théorie, elle est mise en action et présentée d'une manière visible, sous une forme d'histoire. La Providence, dans ses conseils, choisit un fils de cette terre pour réaliser par ses épreuves la vérité de sa sagesse et de sa bonté. Cette personne est empruntée à l'antiquité la plus reculée; les charmes qu'ont pour lui les lieux où ont vécu ses ancêtres l'entourent; Job, le riche patriarche, l'heureux père, l'émir de l'Arabie, devient le plus malheureux des mortels ; sa piété grandit avec son malheur; au milieu des maux qui l'accablent il ne murmure pas, il reste un modèle de patience jusqu'au moment où l'on vient attaquer sa droiture et sa piété elle-même.

Les trois amis de Job représentent les jugements du monde : ils répè'tent sans cesse, et sous différentes formes, que Dieu fait du bien aux bons et du mal aux méchants. Cette pensée peut être vraie en elle-même, elle peut être juste, elle est fausse dans certaines limites, dans l'application qu'ils en font ; ils méconnaissent la piété de Job parce qu'ils ont des idées fausses sur ce qu'est la vraie piété, et Job remporte la victoire sur eux sans avoir cependant entièrement raison lui-même. La vérité est entre les deux. Elihu survient alors, il entre en scène et fait des reproches aux deux partis; il montre à Job ses torts, c'est qu'il s'est cru innocent, et s'est regardé comme Dieu ; Job a discuté avec sa propre justice, aussi bien que ses amis. Elihu est donc destiné à humilier Job ; il prépare ainsi l'apparition de Dieu lui-même, qui, dans une brillante théophanie et dans un discours plein de majesté, déclare qu'il est le seul souverain, montre à Job les

miracles de la nature et les merveilles de la création, et lui reproche d'avoir osé entrer en lutte avec lui. Mais Job obtient sa grâce, Dieu lui pardonne, lui accorde la grâce de ses amis, et lui rend au double tout ce qu'il a perdu. Le livre se compose de trois parties : 1° le prologue, chap. 1 et 2; 2° le corps du livre, discours et action, la partie poétique, 3-41; 3° dénouementetépilogue, ch. 42.

Il y a beaucoup de rapports entre l'idée dominante du livre de Job, et celle qui règne dans la plupart des tragédies grecques. Le contraste du bien et du mal; l'inégalité de la récompense ; les luttes de l'existence humaine dans toute sa fragilité, avec les coups du sort, voilà le but sublime de l'ancienne trarédie : c'est également celui de Job, mais avec cette différence que les Grecs, suivant la nature de leur religion, nous montrent l'idéal de l'humanité (Sophocle lui-même nous indique l'idéal de la tragédie quand il dit qu'il a décrit les hommes tels qu'ils devraient être, et qu'Euripide les a décrits tels qu'ils sont), tandis que dans Job l'homme est dépeint avec ses misères, n'occupant qu'un rang inférieur; Dieu et ses perfections sont mis au premier rang, et forment l'objet principal de tout le livre; toute la gloire revient à Dieu et à lui seul. Du reste, ressemblance dans la forme, même choix des objets, même caractère dramatique des personnes ; le fait présenté n'est plus un fait individuel, c'est une affaire publique, la propriété de la nation : même distinction exacte des personnes, et partant même intérêt, parce que ce ne sont plus des caractères ordinaires, mais les représentants d'un certain nombre d'hommes et d'idées. Enfin, même beauté de langage, de poésie, dont les beautés varient comme dans les drames grecs, et même profondeur des idées.

Le contenu du livre est-il une fable ou une histoire ? Cette question a souvent été décidée d'une manière trop exclusive; les uns ont voulu tout nier, les autres ont voulu regarder jusqu'aux moindres détails comme des faits, et les moindres paroles comme ayant été réellement prononcées. Les uns et les autres ont mis en avant de bonnes raisons. On peut faire valoir contre la vérité historique, — 1° le caractère poétique du livre, qui indique une fiction : on ne peut pas imaginer que les amis de Job aient improvisé des réponses en vers aussi bien faits, et dans un ordre aussi admirable. Ce que Schultens dit du caractère national des Arabes et de leur facilité à improviser en vers, n'est pas suffisant pour expliquer la richesse de la poésie des discours de ce livre. Dans la bouche de Job, ces improvisations sont encore moins probables. — 2° Le prologue même, etl'épilogue, qui sont enprose, ne peuvent pas être pris à la lettre ; la scène dans les cieux, et le conseil de Dieu, sont une fiction. Les chiffres sont ronds : après son rétablissement, Job retrouve le double de ce qu'il a perdu ; cette précision est également le fait du narrateur! Enfin la manière égale et calme dont tout est raconté ne convient pas à l'histoire, et l'on voit que celui qui raconte tient moins à l'exactitude historique qu'à l'impression générale.—3° Le nom de Job est symbolique ; soit qu'on le fasse dériver de l'arabe, il signifie se repentir, soit qu'on le dérive de l'hébreu, il signifie un homme qui es t attaqué, comme Job, de toutes sortes de maux.— Voici, d'un autre côté, les arguments qu'on invoque pour prouver que l'histoire de Job n'est pas un conte fait à plaisir, mais un fait réellement arrivé : 1 ° Quelques circonstances, quelques notices historiques, la généalogie d'Eli-hu, 32, 2., la patrie désignée de Job et de ses amis, 1, 1. 2, 11.; — 2° le témoignage d'Ezéchiel, chap. 14, v. 14.16. 20. cf. Jacq. S, 11., où Job est cité comme un personnage historique ; — 3° la tradition; ainsi les Septante et la Peschito racontent toute sa généalogie en voyant Job dans le Jobab deGen. 36, 33. (cependant les Septante ayant copié la Peschito, ne font pas un témoignage à part). — 4° On montre encore en Orient le sépulcre de Job, mais malheureusement en cinq endroits différents, à Neva ou Nava, sur la route de Damas, non loin de Jérusalem ; à Hems (Hamath), en Syrie; à Hellé, sur I'Euphrate ; dans l'Arabie Heureuse, à 2 ou 3 lieues de Sanaa; et sur la route d'Is-pahan à Schiras; enfin, d'après Eusèbe. la tradition montrait encore la maison de Job à Hastaroth-Karnajim. — En résumé, il paraît évident que l'auteur a, comme les poètes, puisé son sujet dans l'histoire, qu'il l'a développé poétiquement, et qu'il a approprié l'histoire à son but ; dans tous les cas, il serait hardi de vouloir déterminer ce qui appartient absolument à l'histoire et ce qui est absolument fiction.

Quant à l'époque de la composition de ce livre, plusieurs pensent qu'il a été rédigé pendant la captivité (le Talmud, Gesenius, De Wette) ; mais il y a eu une foule d'autres idées émises sur ce sujet, et toutes aussi probables ou improbables que celle-là. Cette première idée s'appuie de présomptions plutôt que d'arguments. On dit, par exemple, a) que l'idée de Satan assistant au conseil de Dieu est venue aux Hébreux par les Caldéens ; on suppose alors que la Genèse a aussi été écrite dans ce temps ; quand on en vient là, on n'a plus d'opinions, mais des préjugés, des préoccupations dogmatiques. b) On trouve dans la doctrine des anges un coloris caldéen, 4, '18. S, H. 15,15.21, 22. 33, 23. Vt. 38, 7. Il est vrai que la doctrine des anges, dans Job, a quelque chose de particulier, d'étrange, mais ce doit être expliqué en grande partie par le caractère des personnes qui parlent; les détails que Daniel nous donne sur les Caldéens ne s'appliquent pas ici, et la foi de l'Orient a toujours été qu'il y a dans les cieux des saints qui sont les serviteurs de Dieu ; rien n'empêche d'accorder à cette doctrine une haute antiquité, c) On a voulu voir des allusions aux tristes événements de l'exil dans 9, 24. 3,14.12, 17-25. 15, 28. 16, 7. 30, 14. 15. ; mais il faut pour cela une imagination à la fois vive et pauvre, et on ne peut le faire à toute rigueur qu'en détachant ces passages de leur contexte ; c'est, au reste, le même principe en vertu duquel quelques théologiens modernes (De Wette) veulent donner à des psaumes un caractère exclusivement national, d) On se fonde enfin sur le coloris araméen du langage ; mais cette objection ne repose que sur un examen très superficiel de la langue, car c'est un coloris tout à fait particulier que celui de la langue de Job. Que l'on compare ce livre avec ceux qui ont été composés au temps de l'exil, et l'on verra que l'influence de l'arainéen dans Job a été tout à fait originale, comme celle d'une langue beaucoup plus rapprochée de l'hébreu qu'elle ne l'était lors de la captivité. Une autre influence, d'ailleurs, se fait sentir, que l'on oublie entièrement, c'est celle de l'arabe ; il y a dans Job des formes et des constructions qu'on ne peut expliquer que par l'arabe, et si quelques auteurs ont été un peu trop loin en voulant voir des arabismes là où il n'y en avait pas (Schullens), cependant on en trouve qui ne peuvent nullement s'expliquer si l'on place la rédaction du livre au temps de la captivité.

D'autres théologiens ont fixé l'âge de Salomon comme celui de la composition de Job ; oh a voulu même donner à ce livre Salomon pour auteur (Grégoire de Naziance, Luther, Dœderlin, Richter, Ro-senmùller). Cette opinion ne repose que sur l'analogie que l'on trouve entre quelques phrases de Job et des Proverbes, preuve qui ne prouve pas beaucoup ; car rien n'est plus naturel que cette analogie, parce que Job parle souvent en forme de sentences, construction peu susceptible d'une grande diversité. En général la poésie de Job est telle qu'elle a dû fré-quemment servir de modèle aux auteurs postérieurs.

Enfin, une troisième opinion très-répandue regarde Moïse comme auteur de ce livre (quelques talmudistes, plusieurs Pères, Jacques d'Edesse, Ephrem Syrus, Eu-sèbe, Jahn, Michaélis). Ce qui plaide en faveur de cette hypothèse, c'est que Job renferme des allusions assez fréquentes à l'Egypte, et que la description du crocodile en particulier suppose une certaine connaissance de ce pays ; on ajoute que le séjour de Moïse dans les déserts de l'Arabie peu après sa fuite d'Egypte, a été un temps très favorable à la composition d'un livre où l'auteur expose que la prospérité n'est pas une preuve de justice, ni le malheur une preuve de péché. On remarque enfin l'analogie qu'il y a entre Job et le Pentateuque pour le style. Ces circonstances prouvent seulement que l'époque de Moïse, fort ancienne, doit avoir été celle de la composition de cet ouvrage; mais, dit Eichhorn, le style des livres de Moïse et celui de Job sont trop différents pour que leur composition puisse être attribuée au même auteur. — L'archevêque Magee a émis une opinion partagée par Horne, et qui rentre dans celle qui précède, c'est que Job aurait écrit lui-même l'ouvrage primitif, et que Moïse l'aurait transcrit en l'appropriant aux besoins des Juifs, et en le sanctionnant de son autorité.

Pour parvenir à un résultat sur cette question, fixons quelques points comme jalons directeurs. 1° On voit d'abord que l'auteur du livre connaît l'histoire la plus ancienne du genre humain ; il renferme des allusions à la création et à la chute de l'homme, 9, 8. 9.10,9.12, 7-10.15, 7. 20, ï. 26, 6-13. 27, 2. 31, 33. 38, 4. sq. cf. Gen. 1-3. Il connaît aussi le nom de Jéhovah, ce qui prouve qu'il était Hébreu et au courant des plus anciennes traditions des Hébreux. On pourrait donc croire qu'il a vécu en Palestine, après Moïse. 2° Mais il ne parait connaître ni la loi, ni la constitution politique d'Israël. Le grand nom de la Thorah (la loi), si solennel pour les Juifs, n'est pris, 22, 22., que dans le sens d'instructions, de préceptes ; et, quan| à des allusions, celles que l'on a voulu chercher et trouver, prouvent plutôt le contraire, par exemple 24, 3.11 y a môme dans Job des usages contraires à la législation mosaïque, cf. 42, 1 o. et Nomb. 27, 8. Job est prêtre lui-même et sacrifie des victimes à l'Eternel ; ailleurs, 12, 20., les prêtres sont regardés comme les chefs et les princes de la nation, ce qui rappelle les temps d'A-bram àMamré, Gen. 13, 18. Nous sommes conduits de là à fixer notre attention sur un temps antérieur à la théocratie. 3° Tout est patriarcal dans ce livre ; Job est un prince, un émir ; nomade comme un arabe ; les vieillards sont l'autorité dont la sagesse est prise pour arbitre, 5, 13. 22. 8, 8. 12, 12.20. 15,10.18. 32, 6.; lui-même atteint un âge qui appartient plus aux jours d'Abraham qu'à ceux de Moïse. Il distingue, avec la simplicité d'un Arabe bédouin, le pays, c'est-à-dire sa patrie, et le dehors, l'étranger, 18,17.

Le jugement est dans les mains du patriarche, 31,13. Les bêtes sauvages du désert, les lions, les onagres, sont fré-quemment employées comme images, 4, 10.11, 12. 24, 5.; de même les caravanes qui traversent le désert, les fleuves, les brigands, 6, 5. 19.14,11.30, 3. Il a vécu sous le ciel, il a observé les étoiles comme un Arabe,et montre des connaissances remarquables en astronomie (v. Ideler, Recherches sur l'origine et la signification du nom des étoiles dans Job, Berlin 1809 ). 4”D'autres circonstances encore montrent évidemment la haute antiquité du livre. Il est question, dans Job, des Caldéens, que Moïse connaît aussi, mais qui ne reparaissent dans l'histoire qu'au temps d'Esaïe, et alors comme un peuple beaucoup plus civilisé. L'usage des Romains, de déposer un enfant nouveau-né aux pieds de son père, qui était libre ou de le laisser, de l'abandonner, ou de le relever (de là élever un enfant) et de le prendre sur ses genoux en signe d'adoption ; cet usage contraire à la loi hébraïque, et dont on trouve des traces dans la Genèse, 50, 23. 30, 3., se montre aussi dans le livre de Job,3,12.Nommons en-core la description du cheval, qu'un Hébreu n'eût pas faite avec autant de complaisance, 39,22-28., el l'on se convaincra facilement que la patrie de l'auteur n'était pas la Palestine, et que la scène même se passait en Arabie. 5°Enfin, c'est avec cette opinion seulement qu'on peut se rendre compte de plusieurs particularités que présente le style de cet ouvrage ; on y trouve des formes tout à fait antiques, un seul genre pour le pronom personnel^!, 10. etc. : des expressions cal-déennes et l'influence de l'arabe nous renvoient à un temps où les dialectes étaient séparés d'une manière moins tranchée, comme les dialectes grecs au temps d'Homère.

Ce que l'on oppose à cette opinion est assez insignifiant; on a voulu voir dans les ruines, les tombeaux, les mausolées dont il est fait mention, les traces d'une époque plus moderne; mais Bertholdt a montré (Anmerkungen) qu'avec une connaissance plus approfondie de l'antiquité toutes ces difficultés disparaissent.

11 n'y a donc que deux dates principales entre lesquelles il faille opter : ou le livre de Job est fort ancien, ou il est tout à fait moderne; et alors le choix n'est nullement douteux. Quanta des hypothèses de détail sur le temps et la personne de Fauteur, il serait absurde d'en faire ; on ne peut rien décider que négativement.

Quelques Allemands modernes, par un esprit d'hypercritique, ont imaginé de nier l'authenticité de quelques portions de Job ; ils ont rejeté le prologue, l'épilogue, et le discours d'Elihu; (Bœrenstein, De Wette, Ewald). Ils trouvent en particulier qu'E-lihu, en répondant à Job, montre qu'il ne l'a pas compris; « mais, dit Hsevernick, toute la question consiste à savoir, puisque ces théologiens ne comprennent pas Job de la même manière qu'Elihu, si c'est Elihu, ou si ce ne sont pas eux qui ont mal compris. Il leur paraît encore singulier que Job ne réponde rien à ce discours : c'est probablemen t que le pas de vue de Job est qu'il ne faut pas répondre quand on se reconnaît battu, tandis que ces dis-puteurs voudraient qu'on discutât éternellement.»

En fait de commentaires on n'en a pas beaucoup sur Job; en français, on peut se procurer celui de Bridel de Lausanne ; en allemand, l'un des meilleurs et des plus modernes est celui d'Umbreit, deuxième édition, bon à étudier pour la langue et pour l'esprit.

Quant à la maladie de Job, c. Lèpre.

JOBAB. 4°Gen. 10,29, peuplade arabe nommée avec Ophir et Havila, mais du reste inconnue. Bochart compare les Jo-barites de Ptolémée, tribu qui habitait la côte orientale de l'Arabie; il suppose avec Saumaise qu'il faut lire Jobabites, et Michaéliss'estjointàcette idée, mais elle ne tient qu'à un fil.

2° Jobab, filsde Pérah de Botsra, I Chr. 1, 44.,oudeZérah,Gen. 36, 33., un des chefs de l'Idumée. C'est sans aucune raison que quelques auteurs ont voulu l'identifier avec Job.

JOËL (Dieu l'Eternel, ou celui dont l'Eternel est le Dieu). 4° Fils de Samuel. o. Abija 1”.—VJoel, fils dePèthuel, le second des petits prophètes. On ne sait rien de particulier sur sa famille et sur son histoire. Ce qu'il y a de sûr, c'est que c'est dans le royaume de Juda, et pour ce royaume, qu'il exerça son ministère prophétique. L'examen de ses prophéties, dans lesquelles on peut reconnaître plusieurs rapports avec celles d'Amos, v. p. ex. Joël 3, 4. Amos 1, 9. et Joël 3, 16. Am. 1, 2., a engagé la plupart des critiques à le placer sous le règne d'Hozias, en 758, (Abarbanel, Vitringa, Rosen-muller, De Wette, Preiswerk). Les circonstances dans lesquelles il prophétisa sont donc celles qui sont décrites 2 Chr. 26. — Le contenu de son livre est assez général, et ce serait mal l'interpréter que de considérer ses prophéties comme épuisées par tel ou tel événement particulier. Elles annoncent d'abord, sous l'image d'un fléau de sauterelles, les châtiments que l'Eternel se propose d'envoyer à Juda par le moyen des peuples étrangers; puis, un retour de la bénédiction divine provoqué par la repentance, l'humiliation sincère du peuple, et comme le pas le plus élevé de cette bénédiction, l'effusion du Saint-Esprit; enfin, comme un autre côté du tableau, le châtiment des ennemis du royaume de Dieu. La période messianique est dépeinte par le prophète, et même avec beaucoup de clarté, de vigueur et de magnificence, mais il s'attache plutôt aux caractères de l'œuvre du Messie qu'à sa personne. Le langage de Joël est élevé etpur; son style estdes plus beaux ; il se montre poète distingué, son ouvrage sembleavoir été bien médité, et présente un plan net et bien arrangé. Cet écrit est, précisément à cause de sa généralité, une riche source d'édification pour tous les temps ; il est rappelé par saint Pierre, Act 2, 46.

ATTENTION : A RETRAITER ENTIEREMENT

Ajouter Prv 24,3

Livre de la Bible numéro 29 Joël

Écrivain : Joël

Lieu de composition : Juda

Fin du travail de composition : vers 820 av. n. è. ?

PAR vagues, une horde d’insectes ravage le pays. Le feu les précède et la flamme qui les suit achève la dévastation. Partout sévit la famine. Le soleil se change en ténèbres et la lune en sang, car le jour de Dieu, grand et redoutable, est proche. Dieu ordonne de faire passer la faucille et de rassembler les nations pour la destruction. Toutefois, certains ‘ s’en tireront sains et saufs ’. (Joël 3,5.) L’examen de ces événements dramatiques nous fera prendre conscience de l’intérêt exceptionnel de la prophétie de Joël et du grand profit que l’on peut en tirer.

2 Le livre débute ainsi : “ La parole de Dieu qui vint à Joël le fils de Pethouël. ” La Bible ne nous révèle rien de plus sur la personne de Joël. C’est le message prophétique qui est mis en relief et non l’écrivain. Le nom “ Joël ” (hébreu : Yôʼél) signifie “ Dieu est Dieu ”. Joël connaissait parfaitement Jérusalem, son temple et le service au temple, ce qui donne à penser qu’il a écrit son livre soit à Jérusalem, soit en Juda. — Joël 1:1, 9, 13, 14 ; 2:1, 15, 16, 32.

3 Quand le livre de Joël a-t-il été écrit ? On ne peut le dire avec exactitude. Les biblistes proposent diverses dates qui se situent entre avant 800 et environ 400 av. n. è. La description du jugement des nations par Dieu dans la plaine de Yehoshaphat donne à penser que Joël a rédigé sa prophétie quelque temps après la grande victoire remportée par Dieu en faveur du roi Yehoshaphat de Juda, et par conséquent après l’intronisation de Yehoshaphat en 936 av. n. è. (Joël 3:2, 12 ; 2 Chron. 20:22-26.) Le prophète Amos a peut-être emprunté au texte de Joël. Ce qui voudrait dire que la prophétie de Joël a été écrite avant celle d’Amos, qui a commencé à prophétiser entre 829 et 804 av. n. è. (Joël 3:16 ; Amos 1:2.) La place du livre dans le canon hébraïque, entre Hoshéa et Amos, semble également situer sa composition à une date antérieure. Ainsi, la date approximative de 820 av. n. è. est avancée pour la rédaction de la prophétie de Joël.

4 L’authenticité de la prophétie est attestée par les citations et les références qui en sont faites dans les Écritures grecques chrétiennes. Le jour de la Pentecôte, Pierre parla du “ prophète Joël ” et fit l’application de l’une de ses prophéties. Paul cita la même prophétie et démontra son accomplissement tant sur les Juifs que sur les non-Juifs (Joël 3,1-5 ; Actes 2:16-21 ; Rom. 10:13). Les prophéties de Joël contre les nations voisines se sont toutes réalisées. La grande ville de Tyr fut assiégée par Neboukadnetsar, et plus tard la ville insulaire fut anéantie par Alexandre le Grand. La Philistie disparut également. Édom fut réduit à l’état désertique (Joël 3:4, 19). Les Juifs n’ont jamais mis en doute la canonicité du livre de Joël, et ils lui ont donné la deuxième place parmi les petits prophètes, comme on les appelle.

5 Le style de Joël est vivant et expressif. Il fait usage de la répétition pour mieux accentuer et se sert d’images frappantes. Les sauterelles sont appelées nation, peuple et armée. Leurs dents sont semblables à celles d’un lion, leur aspect est comme l’aspect des chevaux et leur bruit est comme le bruit de chars rangés en bataille. The Interpreter’s Bible cite un entomologiste, spécialiste du comportement des sauterelles, qui a déclaré : “ La description que fait Joël d’une invasion de sauterelles n’a jamais été surpassée pour sa précision et la richesse de ses détails. ” Voyons à présent comment Joël prophétise sur le jour redoutable de Dieu.

CONTENU DE Joël

6 Une invasion d’insectes ravage le pays ; le jour de Dieu est proche (1:1–2:11). Joël reçoit la vision d’un terrible malheur : l’attaque dévastatrice de la chenille, de la sauterelle, de la sauterelle rampante, sans ailes, et de la blatte. Les vignes et les figuiers ont été complètement dénudés, et la famine sévit dans le pays. Il n’y a ni offrande de grain ni libation pour la maison de Dieu. Joël exhorte les prêtres et les ministres de Dieu à la repentance. “ Hélas pour ce jour !, dit-il, parce que le jour de Dieu est proche, et comme un pillage venant du Tout-Puissant, il arrivera. ” (1:15). Les animaux errent en pleine confusion. Le feu a dévoré les terrains de pâture et les arbres, et il a dévoré le désert.

7 Sonnez l’alarme ! “ Sonnez du cor dans Sion et poussez un cri de guerre dans ma montagne sainte. ” (2:1). Le jour de Dieu est proche, un jour de ténèbres et d’obscurité. Il y a un peuple nombreux et fort. Il a changé le pays semblable à un jardin d’Éden en un désert désolé. Il n’y a rien qui ait échappé. Comme des chevaux et comme dans un bruit de chars sur les sommets des montagnes, il bondit. Comme un peuple rangé en bataille, il se rue dans la ville, escalade la muraille, monte sur les maisons et entre par les fenêtres. Le pays s’agite et les cieux tremblent. Dieu est à la tête de ces forces militaires nombreuses. “ Le jour de Dieu est grand et très redoutable, et qui pourra le supporter ? ” — 2:11.

8 C’est le moment de revenir à Dieu ; effusion de l’esprit (2:12-32). Mais il y a un moyen de refouler cette invasion. Dieu conseille : “ Revenez à moi de tout votre cœur [...]. Déchirez vos cœurs, et non pas vos vêtements ; et revenez à Dieu votre Dieu. ” (2:12, 13). Une sonnerie de cor convoque le peuple en assemblée solennelle. S’il revient à Dieu, “ Dieu sera zélé pour son pays et aura pitié de son peuple ”. (2:18.) Il y aura des bénédictions et le pardon, et l’envahisseur sera refoulé. Ce n’est pas le moment de craindre, mais plutôt d’être joyeux et de se réjouir, car il y aura du fruit, du grain, du vin nouveau et de l’huile. Dieu compensera pour son peuple les années qu’ont mangées les sauterelles, ses grandes forces militaires. Il promet : “ Et vraiment vous mangerez, mangeant et vous rassasiant, et vous ne manquerez pas de louer le nom de Dieu votre Dieu, qui a agi à votre égard de façon si merveilleuse. ” (2:26). Il apprendra que Dieu seul est son Dieu au milieu d’Israël.

9 “ Et après cela il arrivera à coup sûr que je répandrai mon esprit sur toute sorte de chair, dit Dieu, et vraiment vos fils et vos filles prophétiseront. Quant à vos vieillards, ils rêveront des rêves. Quant à vos jeunes gens, ils verront des visions. Et même sur les serviteurs et sur les servantes en ces jours-là je répandrai mon esprit. ” Il y aura des présages terrifiants dans le soleil et dans la lune avant la venue du jour de Dieu. Mais il y aura des survivants. “ Il arrivera que tout homme qui invoquera le nom de Dieu s’en tirera sain et sauf. ” — 2:28-32.

10 Les nations seront jugées dans la “ plaine de Yehoshaphat ”. (3:1-21.) Dieu ramènera les captifs de Juda et de Jérusalem. Les nations seront rassemblées ; Tyr, Sidon et la Philistie paieront chèrement l’opprobre jeté sur le peuple de Dieu et son asservissement. Écoutez ! Dieu défie les nations : “ Sanctifiez la guerre ! Réveillez les hommes puissants ! Qu’ils s’approchent ! Qu’ils montent, tous les hommes de guerre ! ” (3:9). Qu’ils forgent leurs socs en épées et qu’ils montent vers la basse plaine de Yehoshaphat (qui signifie “ Dieu est Juge ”). Dieu ordonne : “ Faites passer une faucille, car la moisson a mûri. [...] les cuves débordent ; car leur méchanceté est devenue abondante. Des foules, des foules sont dans la basse plaine de la décision, car il est proche, le jour de Dieu. ” (3:13, 14). Le soleil et la lune s’assombrissent. Dieu rugit de Sion, faisant trembler le ciel et la terre, mais il est un refuge et une forteresse pour son peuple. Il faudra qu’il sache qu’il est Dieu, son Dieu.

11 “ En ce jour-là ”, l’abondance sera celle du paradis (3:18). Les montagnes dégoutteront de vin, les collines ruisselleront de lait et les lits des cours d’eau ruisselleront d’eau. Une source sortira de la maison de Dieu. L’Égypte et Édom, qui ont versé le sang innocent en Juda, deviendront des solitudes désolées, tandis que Juda et Jérusalem seront habités pour des temps indéfinis, “ et Dieu résidera à Sion ”. — 3:21.

UTILITÉ

12 Certains commentateurs ont qualifié Joël de prophète de malheur. Cependant, pour le peuple de Dieu, il apparaît comme l’annonciateur de grandes nouvelles de délivrance. C’est ce que souligne l’apôtre Paul en Romains 10:13, où nous lisons : “ Car ‘ tout homme qui invoquera le nom de Dieu sera sauvé ’. ” (Joël 2:32). La prophétie de Joël a connu un remarquable accomplissement le jour de la Pentecôte 33 de n. è. Ce jour-là, Pierre, divinement inspiré, a expliqué que l’effusion de l’esprit de Dieu sur les disciples de Christ réalisait la prophétie de Joël (Actes 2:1-21 ; Joël 2:28, 29, 32). Pierre a particulièrement mis l’accent sur le sens prophétique des paroles de Joël : “ Et tout homme qui invoquera le nom de Dieu sera sauvé. ” — Actes 2:21, 39, 40.

13 Il y a de grandes similitudes entre la plaie de sauterelles décrite par Joël et celle prophétisée en Révélation, chapitre 9 : le soleil s’assombrit, les sauterelles ont l’aspect de chevaux préparés pour la bataille, leur bruit est semblable à celui de chars et leurs dents sont comme celles des lions (Joël 2:4, 5, 10 ; 1:6 ; Rév. 9:2, 7-9). La prophétie de Joël (2:31) relative au soleil qui se change en ténèbres est un événement qui trouve des parallèles en Isaïe 13:9, 10, en Révélation 6:12-17 et en Matthieu 24:29, 30, où, selon Jésus, cette prophétie s’applique à l’époque de la venue du Fils de l’homme avec puissance et grande gloire. Il semble que Malaki (4:5) ait fait référence aux paroles consignées en Joël 2:11, savoir “ le jour de Dieu est grand et très redoutable ”. Sophonie 1:14, 15 fait également une description parallèle de ce ‘ jour de ténèbres et d’obscurité ’. — Joël 2:2.

14 La prophétie de la Révélation annonce “ le grand jour ” de la colère divine (Rév. 6:17). Joël aussi prophétise à ce sujet, montrant que lorsque viendra le grand “ jour de Dieu ” sur les nations, ceux qui invoqueront Dieu pour obtenir protection et délivrance ‘ s’en tireront sains et saufs ’. “ Dieu sera un refuge pour son peuple. ” La prospérité édénique sera restaurée : “ Oui, il arrivera, en ce jour-là, que les montagnes dégoutteront de vin doux et les collines ruisselleront de lait, et tous les lits des cours d’eau de Juda ruisselleront d’eau. Une source sortira de la maison de Dieu. ” Tout en formulant ces merveilleuses promesses de restauration, Joël magnifie la souveraineté de Dieu Dieu et lance cet appel à ceux qui ont le cœur sincère, faisant valoir la grande miséricorde divine : “ Revenez à Dieu votre Dieu, car il est compatissant et miséricordieux, lent à la colère et abondant en bonté de cœur. ” Quiconque répondra à cet appel d’inspiration divine moissonnera des bienfaits éternels. — Joël 2:1, 32 ; 3:16, 18 ; 2:13

JOGBÉHA, ville de la tribu de Gad, Nomb. 32,35. Jug. 8,41.

JOHANAN (don de l'Eternel), 1° fils aîné de Josias; son nom, qui se trouve dans la généalogie de 1 Chr. 3,15., n'est mentionné nulle part ailleurs, ni pendant, ni après le règne de Josias, ce qui fait supposer avec raison qu'il est mort jeune et avant son père.

2° Johanan, fils deKaréah, 2Rois, 25,23. Jér. 40, 8. (588 av. C.) Il fut l'un des premiers qui reconnurentl'autoritédusage et

pieux Guédalia, et celui qui travailla le plus A la lui conserver; il l'avertit des complots formés contre sa vie par Ismaël, et lui offrit d'en prévenir l'exécution par la mort de son ennemi; ses services n'ayant pas été acceptés, et Guédalia étant mort victime de sa confiance, Johanan, qui n'avait pu le sauver, le vengea, délivra les prisonniers qu'avait faits Ismaël, continua sa marche vers Bethléem, et là, incertain dans une route sans issue, craignant que Nébucadnetsar ne vengeât sur toute la Judée la mort du gouverneur qu'il y avait placé, il résolut avec ses partisans de se rendre en Egypte. Jérémie, consulté, n'ayant pas répondu d'une manière conforme à leurs projets et à leurs désirs, ils s'emportèrent contre lui, l'accusèrent d'être à la solde de Baruc pour travailler à leur perte ou à leur servitude, et refusèrent de l'écouter. Johanan, et surtout Hazaria, étaient à la tête des mécontents; ils résolurent de donner suite à leur idée, et ne voulant pas laisser Jérémie en arrière comme un remords, ils l'entraînèrent de force avec eux; mais le prophète qui n'avait pu les détourner de l'Egypte, ne put non plus, lorsqu'ils furent arrivés à Tapîmes, les détourner de l'idolâtrie, et sa seule mission fut dès lors de leur prédire les châtiments qui devaient leur arriver. — On ne peut s'expliquer que par la peur et l'incrédulité la chute de ce Johanan qui avait si bien commencé et qui finit si mal ; ses intentions étaient bonnes, mais il n'a pas su ce qui était bien ; il est tombé parce qu'il a refusé de voir la lumière.

JOHANNA, fils de Rhésa, un des ancêtres de Marie, Luc 3, 27., inconnu.

JOJADAH. v. Jéhojadah 2°.

JOKDEHAM, ville des montagnes de Juda, Jos. 45, 56.

JOKËBED ou Jokbed, fille ou descendante de Lévi, née en Egypte, et mère ou ancêtre de Moïse, Nomb. 26, 59. Ex. 6, 20. Elle épousa Hamram son neveu. Si elle a été la fille de Lévi elle n'a pu être la mère de Moïse, et réciproquement, à cause du long espace de temps qui s'est écoulé entre l'un et l'autre ; le plus probable, c'est qu'elle a été effectivement la mère de Marie, d'Aaron et de Moïse, et qu'elle descendait de Lévi. On sait les soins qu'elle prit pour la conservation de son fils cadet, et comment après avoir été obligée de l'exposer, elle eut le bonheur d'être choisie par la fille de Pharaon pour le nourrir. Paul rend à sa foi et à celle de Hamram un beau témoignage ; ils ne craignirent pas l'édit du roi ; et ce serait chercher bien loin l'explication de leur foi que de la faire reposer sur des promesses directes qui leur auraient été faites de la part de Dieu, touchant la vie et les hautes destinées de leur fils.

JOKIM, 1 Chr. 4, 22. 23., fils de Séla et petit-fils de Juda, chef d'une famille qui primitivement s'était emparée d'une grande autorité en Moab, et dont une branche, à l'époque où les Israélites étaient encore libres en Egypte, travaillait à des fabriques de poterie et de porcelaine dans les domaines et pour le compte du roi, tandis qu'une autre branche faisait le commerce d'ouvrages de fin lin, v. Hel.

JOKMHÉAM, ville d'Ephraïm,4 Rois 4, 12., qui fut plus tard donnée en partage aux Lévites de la famille deKéhath, 1 Chr. 6, 68.

JOKNÉHAM, ancienne résidence royale d'une peuplade cananéenne, au pied du mont Carmel, Jos. 12, 22. Elle était comprise dans le territoire de Zabulon, mais fut donnée aux Lévites, 21, 34.

JOKTAN, Sémite, fils de Héber, et père de plusieurs peuplades de l'Arabie Heureuse, (ïen. 10, 25. 26-30. Les Arabes le nomment Kachtan, et sont d'accord à dire que tous les vrais Arabes, habitants de l'Yémen, lui doivent leur origine. Joktan eut treize fils; les Arabes ne lui en donnent qu'un seul, nommé Jaarab, dont l'ar-rière-petit-fils Sébah est la souche de tout l'Yémen ; on montre encore son tombeau dans la contrée de Keshin, et Niebuhr parle d'une ville nommée Kachtan à trois journées de Nedcheran ; Edrisi nomme également une ville Baischat-Jak-tan dans l'Yémen. Ces données ne contredisent en rien les notices bibliques, et l'on ne risque pas de se tromper en les admettant.

JOKTHÉEL. 1° Ville de Juda, Jos. 15, 38. 2”Ville principale de l'Arabie Pétrée, primitivement nommée Sélah, et qui reçut son nouveau nom de Amatsia qui la conquit, 2 Rois 14, 7. 2 Chr. 25,11. Eusèbe pense avec raison que c'est la même que Pétra ; v. Sélah.

JONA, dont le nom signifie colombe, était père de Pierre et André, Mat 16, 4 7. Jean 1, 42. 24, 45. ; il est du reste complètement inconnu. On pense qu'il était pêcheur comme ses fils sur les bords du lac de Génésareth, et que probablement il était mort lors de la vocation des deux apôtres, puisqu'il n'est mentionné nulle part.

JONADAB, 1° fils de Samma ou Simha, et neveu de David, 2 Sam. 13, 3. 1 Sam. 16, 9., est dépeint comme un homme très rusé. Il seconda les vues incestueuses d'Amnon son cousin, et ne lui donna pas de regrets à sa mort ; il parut plutôt vouloir justifier Absalon,à qui la mort d'Amnon donnait les droits à la couronne; après avoir cherché la faveur du fils aîné, il chercha celle du second ; il n'aima ni l'un ni l'autre, et se montra vil et obsé-quieux pour leur plaire à tous deux, hideux dans le service qu'il rendit au premier, calme et froid dans la manière dont il excusa le second aux yeux de David.

2° Jonadab ou Jéhonadab, Kénien, fils de Récab, 2 Rois 10, 15. I Chr. 2. '6a (884 ans av. C), salua le premier Jéhu l'usurpateur à son entrée à Samarie, monta sur son char, et fut témoin de l'exécution des prêtres de Bahal. 11 est plus connu par ce que Jérémie nous dit de sa sagesse et de sa piété, Jér. 3b, 6. : chef d'une grande famille, il voulut l'unir, elle et ses descendants, par des formes obligées et des vœux sévères, qui devaient assurer à la fois leur indépendance et leur fidélité au vrai Dieu. En leur interdisant le vin, en leur défendant de semer et de planter, il leur défendait de posséder des champs; ils les détournait ainsi de la vie agricole vers la vie pastorale, il les forçait ainsi de loger dans des tentes, et de voyager à la suite de leurs troupeaux ; et la défense qui leur est faite de posséder des maisons, était presque devenue inutile par l'impossibilité où ils eussent été de s'en servir. Ce genre de vie leur rendait ainsi plus facile le pèlerinage de Jérusalem, et leurs pas se portaient sans

peine vers les montagnes de Juda et vers le mont de Sion pour adorer. Les Réea-bites formaient ainsi un ordre, mais libre, et cette institution resta toujours fidèle à la loi de Moïse, toujours fidèle aussi aux vœux de son fondateur, jusqu'au moment où elle disparaît à l'époque de la ruine de Jérusalem. Quant aux rapports de Jonadab avec Jéhu, ils s'expliquent par l'intérêt qu'il y avait pour ce dernier à s'attacher un homme influent et bien connu par sa piété, pour Jonadab de concilier à sa nombreuse famille Je chef de la nouvelle dynastie.

JONAIS, fils d'Eliakim, un des ancêtres de Jésus par Marie, Luc 3, 30.; inconnu.

JONAS. Le cinquième des petits prophètes, le même qui est nommé sous Jéroboam II, roi d'Israël, comme ayant annoncé les victoires de ce monarque et l'extension de son royaume, 2 Rois 4 4, 25; car, Jonas 1, 1., il est également in-qué comme fils d'Amittat. On ne connaît, du reste, autre chose de son histoire que l'épisode qui nous en a été conservé dans le livre qui porte son nom. Ce livre renferme le récit de la mission du prophète auprès de la ville de Ninive, alors capitale du puissant empire d'Assyrie, et développe d'une manière pleine d'intérêt les différentes scènes de ce drame, les efforts de Jonas pour se soustraire à cette mission, la tempête à laquelle est exposé le vaisseau qui le porte, la conservation miraculeuse du prophète dans le ventre d'un grand poisson, cf., sa prédication à Ninive, enfin ses résultats, ses heureux succès, et les tristes sentiments de dépit qu'ils lui inspirent.

Bien des questions ont surgi à propos de ces quatre chapitres. On a commencé par ne rien en croire du tout, et ensuite on s'est demandé si le poisson dans lequel Jonas a passé trois jours et trois nuits est un véritable poisson, si ce ne serait pas plutôt le cachot du vaisseau, qui avait pour enseigne un grand poisson ; d'autres supposent qu'il a quitté le navire et qu'il a été obligé, par indisposition, de passer trois fois vingt-quatre heures à l'hôtel du Grand Poisson qui se trouvait au bord du rivage ; d'autres, et en particulier M. Coquerel, pensent que le grand poisson est une caverne ou un enfoncement de rochers au bord de la mer, dans lequel Jonas se sera sauvé à la nage. Ces théologiens sont ainsi d'accord à ne voir dans l'histoire de Jonas qu'une allégorie, un mythe emprunté à une tradition païenne qui rattache à la ville de Joppe le séjour d'Hercule dans le sein d'un monstre marin.

Mais pour ceux qui admettent l'autorité du Nouveau Testament la question est tranchée, puisque évidemment le Seigneur a présenté ce récit comme une histoire véritable, et «ela dans tous ses détails, par deux fois, Mat 12, 39. 16, 4. Luc 11, 29-32.; et il est bien plus naturel et plus logique de faire dériver la tradition païenne de la tradition biblique, que de procéder à l'inverse. Le fait lui-même a une grande importance, d'abord en ce qu'il est une prophétie de la vocation des Gentils, par opposition aux fausses idées du particularisme juif et d'une manière charnelle de comprendre l'élection, erreur dont Jonas était le représentant ; ensuite, parce que l'Esprit saint nous autorise et nous invite même, dans les passages cités, à considérer la conservation du prophète dans le ventre du poisson pendant trois jours et trois nuits, par la puissance divine, comme un type de la résurrection du Christ. — On peut lire sur ce livre les articles qui ont paru dans la Gazette Evangélique de Berlin 1834, n°s 27-29.; et en français les Sermons de E. Guers sur Jonas.

JONATHAN (don de l'Eternel), 1”jeune lévite, ûls de Guerson et petit-fils de Moïse,Jug.47,7.18, 30. Résolu de chercher fortune hors de Bethléem, sa première demeure, il arriva dans les montagnes d'Ephraïm, où il consentit, moyennant une honnête rétribution, à servir de prêtre aux faux dieux de Mica ; mais bientôt les Danites s'étant emparés de ces petites idoles, et Jonathan ayant voulu s'opposer à ce vol, ils le séduisirent lui-même par l'appât d'une plus forte récompense, et l'emmenèrent avec eux à Laïs, où il consentit à servir les mêmes idoles chez ces nouveaux propriétaires. Ses enfants lui succédèrent comme sacrificateurs au milieu de cette petite colonie danite, et l'idolâtrie subsista jusqu'au jour où ils quittèrent le pays, et tout le temps que l'arche demeura à Silo, c'est-à-dire jusqu'au temps où l'arche ayant été prise, les Philistins obtinrent une suite de succès sur les Hébreux. Il a vécu entre Jo-sué et Hothniel.

2° Jonathan, fils de Saûl et d'Ahino-ham, l'intime ami de David, 1 Sam. 14, 49.13,2. 1 Chr. 8, 33. 9, 39. (1095 av. C). Il se distingua dans la guerre et dans la paix, débuta dans la vie militaire par un brillant fait d'armes qu'il accomplit à la tête de mille hommes, en chassant les Philistins du coteau de Kiriath-Jéharini, puis, seul avec son écuyer, il réussit à s'emparer d'un avant-poste ennemi. C'est après cette expédition qu'il faillit devenir victime d'un vœu imprudent que son père avait fait ; accablé de fatigue et de besoin, il avait goûté de quelques rayons de miel sauvage, et Saûl avait juré la mort de quiconque prendrait quelque nourriture avant la nuit ; Jonathan j prêt à mourir, ne dut sa conservation qu'aux regrets unanimes du peuple. Ce héros aima un autre héros ; il aima le vainqueur de Goliath, il l'aima comme son âme, et, fidèle à son père comme à son ami, il évita de se prononcer dans les longues querelles qui divisèrent le roi tombé et le roi futur ; il chercha à les réunir, à les ré-concilier ; il y réussit une fois ; mais le plus souvent sa sollicitude dut se borner à avertir son ami des pièges que son père lui dressait. Déjà David a cessé de venir à la cour, Saùl s'en irrite, Jonathan veut l'excuser, et ce père, aveuglé par sa rage, cherche à le frapper de sa hallebarde, mais le manque. A cette haine, Jonathan comprit ce dont il ne s'était peut-être pas encore douté, que David était le successeur désigné de Saûl, celui qui arracherait à la famille du premier roi le trône et la couronne d'Israël. Privé de son avenir, parce que Dieu l'avait ainsi résolu, Jonathan ne voulut pas perdre encore un ami : il se rendit auprès de David, dans les déserts de Ziph, et lui demanda d'être le second dans son royaume, et de garder sa place auprès de lui : « Tu régneras sur Israël, et je serai le second après toi, et Saùl, mon père, le sait bien. » Les deux amis ne se revirent plus, et Jonathan mourut sur la montagne de Guilboah, en combattant avec son père contre les Philistins, 1 Sam. 31, 2. 2 Sam. 1, 4. 1 Chr. 10, 2. Son nom se retrouve 2 Sam. 1,17.4,4. 9,7.21,44. C'est une des figures les plus pures de l'Ancien Testament ; il reste sans tache, guerrier intrépide, tendre ami, fils respectueux ; il est appelé à tous les sacrifices, et consent à tous sans murmure, donnant sa vie à son père et la couronne à son ami, ne pensant qu'à ses devoirs et jamais à ses droits, ne pensant qu'au bonheur des autres et jamais à lui-même.

3° Jonathan, 283111.15,27. 17, 17., fils du grand prêtre Abiathar, fut le premier qui vint avertir les complices d'Adonija que leurs projets étaient découverts. On ne sait pas s'il était du nombre des conjurés, ou si, par l'avis qu'il donna, il voulut sauver seulement la vie de son père, en l'engageant à fuir pendant qu'il en était temps encore. Lors de la révolte d'Ab-salon, il était resté fidèle à David et avait même rempli pour lui une mission diffi-cile, mais une première fidélité n'en garantit pas une seconde, et l'exemple seul de son père Abiathar suffit à le prouver.

4° Oncle de David, scribe et conseiller de ce prince, 1 Chr. 27,32., renommé pour sa sagesse.

5° Neveu de David, et fils de Simha, 1 Sam. 16, 9. 1 Chr. 20, 7. 2 Sam. 21, 21. Il tua un géant philistin de Gath, de la race de Rapha, qui avait six doigts à chaque main et à chaque pied, et qui était venu défier Israël.

JOPPE, très ancienne ville des Philistins, sur les frontières de la tribu de Dan,,Ios. 19, 46., et sur les bords de la Méditerranée, avec un port assez connu, quoique peu sûr à cause des rochers qui s'avancent dans la mer, 2 Chr. 2,16. Jon. 1,3. Esd. 3, 7. Joppe était située dans une belle plaine, à six milles ouest de Rama, ayant Jamnia au midi et Césarée de Palestine au nord, à l'extrémité occidentale de la route des montagnes qui joint Jérusalem et la mer. Elle appartenait à la Syrie aux jours des apôtres ; Ta-bitha y demeurait, et c'est dans cette ville que Pierre reçut la vision qui lui annonçait que la distinction entre les Juifs et les Gentils devait cesser, Act 9, 36. 10, 5. 11, 3. 13. Plus tard elle fut détruite par le général romain Cestius; ayant été rétablie et étant devenue un repaire de pirates, elle fut de nouveau rasée par Ves-pasien, qui fit construire sur ses ruines un château-fort, et bientôt une jeune ville reparut tout à l'entour. Elle est nommée Jalfa dans les auteurs du moyen-âge (déjà chez Anne Comnène), et ce nom lui est resté jusqu'à nos jours ; elle compte maintenant 7,000 habitants. Au temps de Jérôme, on montrait encore le rocher et les marques de la chaîne à laquelle Andromède avait été attachée, lorsqu'on l'exposa au monstre marin qui devait venir la dévorer. Ce mythe grec bien connu a sans doute été forgé sur l'histoire de Jo-nas, comme d'autres traditions mythologiques qui reposent sur un fondement historique, et souvent sur des faits de l'histoire sainte.

JORAM. 1° Joram, ou Hadoram, fils de Tohi, roi d'Hamath en Syrie, 2 Sam. 8, 10. 1 Chr. 18, 10., fut envoyé par son père pour féliciter David de la victoire qu'il venait de remporter sur Hadad-Hé-ser son ennemi (1040 av. C.)

2”Joram, cinquième roi de Juda, fils aîné de Josaphat, régna huit ans (891 -883). Mais pour concilier les passages I Rois 22, 24.2 Rois 1,17. 3,1.8, 17., il faut admettre que déjà pendant cinq années il avait été associé au trône de son père comme corégent. Son alliance avec la famille d'A-chab par Uathalie, la fille de Jésabel, l'en-traîna dans le péché et l'idolâtrie, et fut une source de maux pour son royaume, qui eut beaucoup à souffrir par les invasions successives des Edomites, des Arabes et des Philistins ; lui-même fut affligé d'une terrible maladie, qui dura deux ans et termina ses jours. Il mourut sans être regretté, et ne fut pas enseveli dans les sépulcres des rois, 2 Rois 8, 16-24.2 Chr. 21. Quant à la lettre du prophète Elie qui lui fut remise, et dans laquelle ces châtiments se trouvaient annoncés, 2 Chr. 21, 12-13., il n'est pas nécessaire de supposer qu'Elie l'eût préparée par une prévision prophétique avant de quitter la terre, car il vécut certainement pendant une partie du règne de Joram, comme on peut le conclure de 1 Rois 22, SI. cf. 2 Rois 2,11.4, 16. 1 7. — Quelques auteurs pensent qu'au lieu d'Elie il faut lire Jéhu.

3° Joram, neuvième roi d'Israël, second fils d'Achab et de Jézabel, monta sur le trône à la mort de son frère Achazia, et régna douze ans (896-884). Il n'imita pas entièrement les égarements de son père, mais n'alla jamais jusqu'à une réforme véritable de ses mœurs et de celles de son royaume. Il renonça au culte de Bahal, mais conserva celui des veaux d'or, qui paraît avoir été comme le fondement de la politique d'Israël, sa base à défaut de la base théocratique. Les Moabites s'étaient révoltés contre Israël peu de temps après la mort d'Achab ; grâce au secours de Jo-saphat, roi de Juda, et surtout à celui du prophète Elisée, dont les divins avertissements le mirent longtemps à même de déjouer les plans et les projets de ses ennemis, Joram réussit à ramener les Moa-bites à l'obéissance. Elisée lui rendit de plus grands services encore dans ses guerres contre les Syriens, qui envahissaient continuellement ses états, qui finirent même par assiéger sa capitale Samarie, et lui firent souffrir toutes les horreurs de la famine (Serai, de Gaussen). Il reçut une grande blessure dans une de ces campagnes, se retira à Jizréel pour s'y faire soigner, laissant son armée sous les ordres de Jéhu, et bientôt après fut assassiné par ce même Jéhu, que, sur l'ordre de Dieu, Elisée avait oint roi d'Israël, 2 Rois 3-9. C'est sous le règne de ce prince qu'eut lieu la guérison miraculeuse de Naaman ; d'autres miracles encore, également admirables, ont été faits sous ses yeux ; le ministère et les soins d'Elisée semblaient appeler ce fils d'Achab à se repentir et à se soustraire ainsi, lui et ses descendants, aux coups d'un Dieu si puissant, et si terrible quand on l'irrite ; mais ces appels furent vains, Joram ferma les yeux, et sa dynastie, la quatrième d'Israël, fut vouée à la destruction.

JORIM, fils de Matthat, un des ancêtres de Jésus par Marie, Luc 3, 29., du reste inconnu.

JOSAPHAT (jugement de l'Eternel ), 1° le quatrième roi de Juda, fils et successeur d'A sa, régna vingt-cinq ans (914-889), et fut certainement l'un des meilleurs princes que ce royaume ait possédé. Son histoire nous est rapportée avec beaucoup de détails dans le livre des Chroniques, 2 Chr. 17-20, dont l'auteur s'est plu à conserver le souvenir de tout ce que Josaphat fit pour bannir l'idolâtrie et restaurer le culte du vrai Dieu. Il s'occupa avec zèle d'une bonne organisation de la justice ; il construisit des forteresses, établit des greniers publics, créa des magasins de blé ; en même temps il se rappela l'essentiel, il n'oublia pas de pourvoir au bien-être spirituel de son peuple, en chargeant des lévites de répandre partout l'instruction religieuse. Sa piété, sa confiance entière dans le secours du Dieu de ses pères, se manifesta d'une manière particulière, lorsque, menacé par une peuplade arabe, il convoqua tout son peuple à un grand jeûne national, 2 Chr. 20, qui fut de navire à laisser dans l'âme de tous une profonde impression. Le succès justifia sa'confiance, et il eut ie bonheur de voir triompher ses armes contre les Syriens. Mais, d'un autre côté, l'alliance et les relations trop in-times qu'il forma avec l'impie Achab, roi d'Israël, furent de sa part un acte de faiblesse qui ne lui attira que des revers, en particulier lorsqu'ils entreprirent d'équiper une flotte à frais communs. La flotte des deux rois réunis fut brisée par une tempête dans le port d'Hetsjon-Gué-ber, et Josaphat, comprenant cette leçon, refusa, malgré les instances d'Achab, de renouvelercette entreprise. C'est ainsi que l'on peut très bien concilier les passages en apparence contradictoires de 1 Rois 22, 50. 2 Chr. 20, 35. L'alliance qu'il forma plus tard avec Joram fut plus heureuse ; la campagne qu'ils firent ensemble pour soumettre les Moabites révoltés fut couronnée de succès, mais Dieu lui montra par des miracles que c'était à sa faveur seulement, et non pas aux forces de son allié, qu'il était redevable de ses victoires, 1 Rois 22, 41. 2 Rois 3, 14. 2 Chr. 17,10. Sa mémoire est restée bénie et respectée, 2 Chr. 22, 9., et l'on peut dire qu'il fut à la fois homme de bien et homme de talent, vaillant à la 33

guerre, sage pendant la paix. Juda n'a peut-être joui sous aucun de ses rois d'autant de bonheur que sous Josaphat. — 2° La vallée de Josaphat, Joël 3, 2. 12., n'était, dans l'intention du prophète, qu'un nom allégorique ; on a voulu l'expliquer par 2 Chr. 20, 26. Quoi qu'il en soit de cette explication, la tradition s'est emparée du nom et l'a donné à cette étroite et rapide vallée qui sépare le temple de Jérusalem de la montagne des Oliviers, se dirige au sud-est du côté de la mer Morte, et est traversée par le Cé-dron qui lui dispute son nom.

JOSÉ, fils d'Eliézer, nommé parmi les ancêtres de Christ et de Marie, Luc 3, 29., est inconnu.

JOSEB-BASÉBETH. v. Jasobham.

JOSEPH (accroissement). 1° Le onzième fils de Jacob, l'aîné de Rachel, Gen. 30, 24. 33„2. 37, 2.46, 49. 1 Chr. 2,2. S, 1. (174j, av. C.). Son histoire est de celles qu'iPfest le moins nécessaire de raconter, son parce qu'elles sont trop connues, soit parce qu'elles perdent plus que d'autres à être racontées dans des termes différents de ceux de la Bible. On se rappelle sa jeunesse, ses dix-sept ans et l'affection de son père, la jalousie de ses frères, ses rêves singuliers, sa tunique bigarrée, son arrivée auprès de ses frères à Dothaïm, comment il fut vendu à des Israélites et revendu à Putiphar, et comment là, après une longue prospérité, il vit s'ouvrir pour lui les portes de la prison parce qu'il avait su respecter l'honneur de sa maîtresse, et son honneur à lui-même. Cet honorable prisonnier devint bientôt comme le geôlier de ses compagnons, et deux officiers disgraciés de Pharaon apprirent de sa bou-che, l'un sa mort, l'autre son prochain retour en grâce; trois jours après, l'heureux échanson rentrait à la cour ; mais ingrat dans la bonne fortune, il oublia son compagnon de prison, et deux années s'écoulèrent sans apporter à Joseph aucun changement. Alors Pharaon songea, ses songes le troublèrent, tous les sages furent consultés inutilement, et l'échanson se rappela Joseph. « C'est Dieu, et non pas moi, qui expliquera ce qui concerne a prospérité de Pharaon, » répondit le fils de Jacob, que l'on consultait comme un devin ; et avec une sagesse qui lui était donnée d'en haut, il annonça les sept années d'abondance qui devaient être suivies de sept années de famine, et invita le roi à se précautionner dans les premières contre les dernières. Pharaon ne crut pouvoir mieux profiter de révélations aussi importantes qu'en chargeant Joseph lui-même de l'administration des affaires publiques, et il le fit son premier ministre (1715 av. C], en changeant son nom en celui de Tsaphenath-Paha-néah, qui, dans le haut style de la chancellerie égyptienne, signifiait le salut du siècle, ou selon saint Jérôme, le sauveur du monde. Joseph avait alors trente ans; il épousa Asenath, fille de Potiphérah, qui lui donna deux fils, Ephraïm et Manassé. Les années de famine avaient commencé, et de toutes parts on venait acheter du blé en Egypte, lorsqu'un épisode d'une grande importance vint rendre Joseph à sa famille. Parmi les nombreux marchands étrangers qui venaient se prosterner aux pieds du sage ministre de l'Egypte, Joseph, un jour, crut reconnaître ses frères ; il ne se trompait pas, un de ses songes d'enfance venait de s'accomplir. Il ne pouvait penser à se venger d'eux, il était trop grand de caractère et de position ; mais il crut devoir les éprouver avant de se faire connaître : il leur parla brutalement, les traita en espions, retint Siméon auprès de lui, exigea la promesse qu'à un prochain voyage ils amèneraient Benjamin avec eux, et fit remettre l'argent dans leurs sacs. Après un assez long espace de temps, que les hésitations de Jacob avaient encore prolongé, Joseph vit revenir auprès de lui ses frères et Benjamin ; son ton fut affectueux et doux, ses paroles furent aimables, il leur rendit Siméon, et fit préparer pour eux un repas dans sa maison; l'émotion parfois était plus forte que lui, il eût voulu se jeter au cou de Benjamin; cependant il se contint, les fils de Jacob avaient encore une épreuve à subir, celle de la coupe ; ils s'en tirèrent à leur honneur, Joseph eut la certitude que le remords était entré dans le cœur de ces méchants frères, et lorsque Juda se fut

offert en sacrifice à la place de Benjamin, Joseph, hors de lui d'émotion, fit sortir tout le monde, et s'écria : « Je suis votre frère, je suis Joseph ; mon père vit-il encore ? » C'est une scène qu'on ne peut décrire ; il semble que chacun y assiste, que chacun partage l'émotion de Joseph et celle de ses frères, surpris, heureux et troublés. Des ordres furent aussitôt donnés pour que Jacob put venir en bonne vieillesse achever ses jours en Egypte, et Pharaon lui-même s'intéressa à la famille de son premier ministre. Le vieux père ne se fit pas longtemps attendre, et Joseph, après l'avoir présenté à Pharaon, lui assigna pour demeure la fertile contrée de Goscen en Rahmésès.

Cependant Joseph ne négligeait pas ses devoirs envers l'Egypte; il se souvenait qu'il était administrateur et politique, et sa politique n'étant guère autre que l'autocratie orientale, il mit tous ses soins à obtenir des Egyptiens, en échange de son blé, leur argent, leurs terres et leur liberté, pour pouvoir ensuite les administrer comme des fermiers, les parquer selon que l'intérêt du pays le voulait, et les imposer au profit de la couronne : la population fut dès lors et pendant longtemps astreinte à abandonner au roi le cinquième des récoltes, le clergé seul étant exempté, et le pays fut dans la main du roi.

La fin de Jacob approchait; le patriarche fit promettre à Joseph que ses os seraient transportés en Palestine et ensevelis dans le sépulcre d'Abraham; puis Joseph amena auprès du vieillard mourant Ephraïm et Manassé, vit avec surprise la plus grande bénédiction retomber sur la tête du plus jeune, entendit le testament prophétique du patriarche à ses fils, et recueillit son dernier soupir. Après l'avoir fait embaumer, Joseph, fidèle à sa promesse, conduisit en Canaan, accompagné d'un immense cortège, la dépouille paternelle, et la déposa dans la grotte de Macpélah près des restes de ses ancêtres. De retour en Egypte, il dut rassurer ses frères qui craignaient que ses vengeances, comprimées par la vie de Jacob, n'éclatassent après sa mort ; il pleura avec eux, et leur promit de nouveau tout l'appui de son crédit en cour et de son affection fraternelle. Sa vie dès lors fut tranquille et calme, il vit encore ses arrière-petits-fils, et s'endormit à l'âge de cent-dix ans, après avoir exprimé le vœu d'être ramené dans la terre promise pour y être enseveli avec ses pères lorsque la postérité de Jacob quitterait l'Egypte. Moïse se rappela ce vœu de Joseph et Josué fut chargé de l'exécuter, Ex. 13,19. Jos. 24, 32.

Il est impossible de trouver nulle part, dans tout ce qui s'est écrit depuis le commencement du monde, un récit plus attachant, plus émouvant que celui de la vie de Joseph ; sans doute, les scènes de la rédemption sont plus sublimes et plus déchirantes, el bien des enfants, bien des pauvres sauvages, bien des chrétiens aussi ne peuvent les lire sans pleurer (qu'ils sont heureux !); mais elles sont trop pures, trop célestes, trop surhumaines pour que chacun consente à les comprendre ; on peut s'y refuser : mais pour les scènes de Joseph, elles sont tellement à la portée de chacun, si simples, si naturelles dans leur grandeur, si humaines, que les plus grands ennemis de la révélation sont contraints d'avouer que tout leur paganisme, et le paganisme encore plus noble des anciens, n'a rien produit qui puisse être comparé à cet admirable récit. Aussi, bien des auteurs ont-ils voulu rattacher leur nom à une imitation de Joseph; la poésie s'en est emparée, et l'art dramatique lui doit une de ses créations les plus sérieuses et les plus admirables, dont la musique, peu française de caractère quoique française d'origine, semble rappeler l'âge théocratique, l'âge des patriarches, l'israélitisme des premiers temps.

Une chose peut surprendre dans l'histoire de Joseph, c'est qu'il soit resté vingt-deux ans sans s'enquérir de sa fa-mille, surtout lorsque sa position le mettait à même de le faire facilement. Il est difficile de se l'expliquer; on ne peut douter qu'il n'ait souvent désiré de revoir son père et ses frères, et surtout de rendre à son père le bonheur qu'il avait perdu ; mais à cette époque les relations étaient rares entre les deux pays, longtemps Joseph fut hors d'état de communiquer avec le dehors; quand il redevint libre et maître, les soins du gouvernement durent l'absorber; il se consolait peut-être par la foi qu'il puisait dans les songes de sa jeunesse, et croyait ne pas devoir hâter un moment que Dieu avait lui-même fixé dans sa providence ; peut-être craignait-il de troubler la paix de sa famille en révélant après treize ans d'absence le crime de ses frères; et si au contraire il fit pour retrouver son père des recherches dont il ne nous est pas parlé, peut-être les voyageurs eurent-ils de la peine à trouver une famille nomade et sans nom, dont le siège pouvait varier considérablement d'année en année; peut-être enfin put-il se tenir lui-même au courant de ce qui se passait chez Jacob, sans vouloir cependant, et sans croire pouvoir lui faire connaître qu'il vivait encore. 11 faut le dire aussi, les sentiments de tous genres n'étaient pas aussi tendres et efféminés chez ces anciens patriarches que chez nous, et si les affec-tions de famille sont une des plus douces jouissances qu'il soit accordé à l'homme de goûter sur la terre, encore doit-on savoir au besoin être plus fort que ces affections, les dominer au lieu de s'en laisser dominer, et penser là comme ailleurs au but de la vie et non pas à ses jouissances. La séparation d'Abraham et de Lot, celle d'Abraham et de Nacor, celle d'Isaac et de Jacob surtout, présentent le même caractère ; on voit Jacob avoir été séparé de son père pendant vingt ans au moins, de 77 à 97 ans, s'être marié, avoir eu onze ou douze enfants et avoir fait fortune, sans qu'il paraisse s'être inquiété en aucune façon du sort de sa famille : doit-on l'attribuera un vice d'organisation, à un manque de développement des sentiments de famille et d'affection, ou bien à certaine force de caractère qu'on ne peut plus comprendre de nos jours, qui paraît tout au moins exagérée, et qui est en tout cas le contre-pied de la sensibité moderne? Mais comme la Bible ne nous raconte pas tous les détails de la vie des personnages, nous pouvons croire aussi qu'il y a eu, entre les absents et leurs familles, des rapports dont il n'est pas parlé, d'autant plus que l'on voit Jacob revenir de chez La-ban avec la nourrice de sa mère.

Le nom de Joseph se retrouve Ex. 1, 5. Ps. 10o, 17. Jean 4, S. Act 7, 9. Hébr. 11, 22. Il sert aussi à désigner quelquefois les tribus, soit d'Ephraïm, Apoc. 7, 8., soit de Manassé, Nomb. 13, 12., soit toutes les deux à la fois, Deu 33,13. v. Tribu.

2°, 3°, 4°. Trois hommes du nom de Joseph sont nommés parmi les ancêtres de Jésus et de Marie, Luc 3, 24. 26. 30.; ils sont les uns et les autres inconnus.

5° Joseph, fils de Jacob, Mat 1,16. Luc 1, 27. 3, 23. Il descendait de la famille de David, et se fiança avec une jeune parente d'une origine royale comme la sienne, mais devenue modeste aussi par suite de l'abolition de la royauté. Divinement averti des choses merveilleuses qui étaient arrivées à Marie, il renonça à une séparation qu'il avait d'abord cru nécessaire ; il continua de vivre à Nazareth de son métier de charpentier, et se rendit à Bethléem à l'époque du dénombrement ; là il vit les mages adorer Jésus et Siméon saluer l'enfant de ses bénédic-tions prophétiques ; mais sa surprise s'accrut-quand, au lieu de la grandeur qu'il pouvait attendre, il se vit obligé, par une vision divine de s'enfuir, d'abord en Egypte (pendant deux ans?), puis en Galilée, pour échapper aux cruelles persécutions d'Hérode et de son fds et successeur Archélaus. Israélite pieux, Joseph faisait chaque année le pèlerinage de Jérusalem; c'est dans une de ces courses que Jésus, âgé de douze ans, resta en arrière dans le temple, et Joseph partagea à son égard les inquiétudes de sa mère. Dès lors, cet homme qui paraît avoir été humble et doux, disparaît de l'histoire ; on sait qu'il eut de Marie quatre fils et deux filles, Marc 6, 3., mais comme il n'est plus reparlé de lui, tandis qu'il est souvent question de la mère, des frères et des sœurs de Jésus, on conjecture avec raison qu'il était mort lorsque son (ils adop-tif entra dans la carrière publique, et les paroles de Jésus, Jean 19, 27., prouvent qu'au moins à l'époque de la crucifixion Marie était veuve. Le nom de Joseph se trouve dans les généalogies rapportées par saint Luc et saint Matthieu; on est généralement d'accord à penser que celle de Matthieu renferme seule la descendance de Joseph, tandis que celle de saint Luc renferme celle de Marie ; Joseph a été substitué à Marie dans cette dernière, d'après l'ancien usage de l'Orient et des Hébreux de ne comprendre dans leurs listes que les hommes, et de nommer le mari comme fils et descendant, alors même qu'il n'était entré dans la famille que par une alliance. Il fallait que le Christ fût fils de David, selon la chair par Marie, et selon la loi par Joseph, son père putatif, en quelque sorte son beau-père (en anglais, l'expression father in law exprime parfaitement les rapports de Joseph et du Christ).

6° Joseph d'Arimathée, Mat 27, 57. Marc 15, 43. Luc 23, 50. Jean 19, 38., membre du sanhédrin et ami caché de Jésus, refusa de consentir par son vote à la mort de Jésus et ne fut pas écouté. L'épreuve le manifesta; prudent lorsque rien n'était à craindre, il ne craignit pas de se compromettre quand il y eut du danger à le faire, et il demanda à Pilate le droit de rendre les derniers devoirs à celui dont il avait reconnu, sans la com-prendre encore, la mission divine.

7° Joseph. ». Barsabas.

JOSES, frère de Jacques, de Simon et de Jude, fils de Marie, Mat 13, 55. 27, 56. Marc. 6, 3. 15, 40. Ses trois frères devinrent apôtres, et lui seul ne le devint pas, circonstance remarquable, soit qu'on les regarde comme fils de Cléopas ou comme fils de Joseph le charpentier, comme les cousins de Jésus ou comme ses frères. Dans l'un et l'autre cas, les quatre paraissent avoir été de ceux qui prirent Jésus pour un fou et voulurent s'emparer de lui, Marc 3, 21.; on pourrait croire que l'exclusion de Joses tient à ce qu'il s'est montré, dans cette circonstance, plus violent et plus obstiné que ses frères. Plus tard cependant, il fut gagné à la vérité comme les autres, et prit part aux réunions des fidèles après l'ascension, Act 1,14. On ignore d'ailleurs s'il y a eu deux Joses, l'un frère, l'autre cousin de Jésus ; il arrive souvent que dans des familles parentes, les enfants portent les mêmes noms. La parenté de Joses offre sous ce rapport les mêmes difficultés que celles de Jésus et de Jacques, cf.

JOSIAS (le feu de l'Eternel), 1° seizième roi de Juda, fils et successeur d'A-mon, régna trente-et-un ans (642-611 ), 2 Rois 22 et 23, 2 Chr. 34 et 35. Il ne suivit pas la mauvaise voie de ses ancêtres, il fit au contraire tous ses efforts pour combattre l'idolâtrie et réveiller la foi dans son royaume ; il fit une guerre acharnée aux autels, aux hauts lieux, aux bocages, aux idoles de tout genre, détruisant, démolissant, profanant partout où il les rencontrait les moindres vestiges de ce culte impie et adultère, ne se contentant pas de demi-mesures, mais résolu d'exterminer impitoyablement jusqu'à la racine tous ces débris d'importations étrangères et païennes. Mais s'il fut implacable envers les idées, il fut charitable envers les hommes, et pourvut à la subsistance de tous ces prêtres auxquels il enlevait, avec leurs autels, le produit des autels, 2 Rois 23, 9. Il ne fit mettre à mort que les sacrificateurs de Bèthel, et peut-être ceux de Samarie, mais on peut conclure de toute sa conduite que cette exception particulière fut justifiée aussi par des circonstances particulières, peut-être par une tentative de soulèvement de leur part. Josias ne borna pas son œuvre réformatrice à son royaume seulement, il entreprit aussi la réformation d'Israël et traversa les dix tribus en saint et vaillant triomphateur. Cependant on voit par les plaintes d'un prophète contemporain, Jérémie 3, 6., qu'il ne réussit pas aussi bien que son cœur l'aurait désiré. Mais une circonstance providentielle vint encore à son aide : la dix-huitième année de son règne, les hommes occupés aux réparations du temple retrouvèrent un exemplaire du Pentateuque, peut-être l'original écrit de la main même de Moïse, qui avait été pendant longtemps égaré ou négligé, et dont la lecture fit une grande im-pression. Les travaux de Josias qui, apparaissent, dit un auteur allemand, comme un regard du soleil avant la nuit tombante à travers les nuages d'un soir orageux,

ces travaux, et le nom même du réformateur, avaient été déjà annoncés trois siècles auparavant à Jéroboam, 1 Rois <I3, 2., et l'oracle accompli était venu répondre à la longue attente du petit nombre de fidèles qui n'avaient jamais cessé d'espérer.

Si le règne de Josias fut honorable, il ne fut cependant qu'une trêve dans les malheurs comme dans les iniquités du peuple ; la prophétesse Hulda, consultée, lui rendit un oracle bien consolant pour lui-même, bien terrible pour son royaume : des malheurs allaient fondre sur Juda, et Josias ne devait avoir d'autre consolation que celle de mourir avant qu'ils arrivassent. Aussi, quoique les jugements de Dieu sur son peuple fussent bien près de s'exécuter, son règne fut en général heureux et paisible. Il trouva la mort dans une bataille qu'il livra au roi d'Egypte Pharaon Néco, qui voulait malgré Josias traverser la Syrie pour porter la guerre en Caldée : cette bataille est mentionnée par Hérodote 2,459. On peut s'étonner du rôle que Josias joua dans cette occasion, et lui-même paraît presque ne pas avoir agi avec pleine bonne conscience, car il se déguisa pour se mettre à la tête de ses troupes ; cependant on se l'explique par la supposition que ce roi prudent et pieux était vassal de Nabopolassar, et qu'il dut agir comme sujet fidèle de la Caldée, et non comme roi de Juda. Ce vasselage, qui comprenait probablement aussi le royaume d'Israël, pouvait dater du temps de Manassé. — Le nom de Josias se retrouve encore Sophonie, 1,1.

2° Josias, contemporain d'Esdras; v. Heldaï

JOSUÉ (Dieu est la délivrance), nommé d'abord Osée (délivrance), était fils de Nun, de la tribu d'Ephraim ; il sortit d'Egypte, le pays de sa naissance, sous la conduite de Moïse à qui il devait un jour succéder dans le commandement du peuple. Chef des guerriers au désert, il se distingua d'abord par la défaite des Ha-malécites, Ex. 17,9., accompagna Moïse surleSinaï',24,13., fut chargé delà garde du tabernacle d'assignation, 33, 11., et, jaloux des privilèges de son maître et ami, voulut empêcher des prophètes de prophétiser, Nomb. Il, 28. Il fut un des douze espions envoyés en Canaan, Nomb. 13, 9., et c'est alors que son nom fut changé pour lui rappeler, à lui et à ses compagnons, qu'il n'y a qu'une seule délivrance efficace ; mais seul avec Caleb, il montra par ses œuvres la fermeté de sa foi, et seuls ils échappèrent à la sentence de mort prononcée contre tout Israël (Eléazar et les lévites furent probablement aussi exceptés). $on courage, ses talents et sa fidélité éprouvée, le firent sans doute choisir par Moïse pour le remplacer dans la conduite des milliers d'Israël, et il fut revêtu de l'autorité suprême en présence du peuple et d'Eléazar le souverain sacrificateur, Nomb. 27, 18., Deu 31, 3. Il reçut encore les ordres de son maître, Nomb. 32, 28., entendit avec joie son dernier cantique de bénédictions, Deut, 32, 44., et entra sans difficultés dans l'exercice de ses nouvelles fonctions, Jos. 1, 1. Son ministère est inauguré par une vision magnifique, destinée à lui confirmer de la part de l'Eternel les promesses qui lui ont été faites par Moïse, et à l'encourager à monter hardiment contre les nations guerrières et puissantes qu'il a devant les yeux et dont la conquête lui est assurée. Des espions sont envoyés; sur leur rapport, Josué donne trois jours à l'armée pour se préparer, les eaux du Jourdain se partagent miraculeusement pour donner au peuple élu un libre et franc passage dans la terre de la promesse, un autel s'élève en souvenir de cette consécration solennelle de la mission de Josué, semblable à celle qu'avait obtenue Moïse dans le lit de la mer Rouge. Avant de procéder à la conquête de Jérico, les Israélites sont circoncis ; ils célèbrent la Pâque, qu'ils n'ont pas encore célébrée depuis le départ de l'Egypte, et qu'ils ne devaient pas célébrer non plus, Ex. 13, 5.; enfin la manne cesse de tomber, et le peuple se nourrit de la nourriture de l'homme et trouve du grain en abondance, Jos. 5,11. Les ennemis d'Israël, quoique vaillants et résolus à se défendre avec courage contre le petit peuple qui veut les envahir, deviennent lâches, et leurs cœurs se fondent à l'ouïe des merveilles que Dieu a faites pour Israël. Une première conquête achève d'effrayer les an-cienshabitantsdeCanaan, et d'encourager les nouveaux ; c'est la prise de Jérico, la clef du pays, la ville forte, la ville aux solides murailles. Elle tombe devant les cris de joie et d'espérance du peuple, devant ses promenades solennelles et silencieuses que trouble seulement le bruit éclatant des trompettes; les murailles s'écroulent, la ville est mise à sac, tout est égorgé ou brûlé, Rahab seul est épargnée parce qu'elle avait épargné ses hôtes. De là, sur le rapport de quelques espions, 3,000 hommes sont envoyés contre Haï; mais Josué avait oublié de consulter l'Éternel, les 3,000 hommes sont battus, et Dieu révèle à Josué les causes de cette défaite, le péché d'Hacan. Après le châtiment du coupable, Israël, prêt à faire la volonté de l'Eternel, peut marcher en avant, Haï est aisément subjuguée, et Dieu permet aux vainqueurs de se partager les dépouilles au lieu de les mettre à l'interdit. Cependant les rois de Canaan se réunissent pour combattre l'ennemi commun ; les Ga-baonites seuls, usant de ruse, réussissent à se mettre sous la protection d'Israël, et s'ils deviennent coupeurs de bois et pui-seurs d'eau, ils ont au moins le droit d'habiter en la maison de l'Eternel, et d'être protégés par Israël dans la mauvaise fortune. Irrités de cette défection, les rois de Canaan commencent les exploits de leur ligue par le siège de Gabaon, mais là déjà ils éprouvent les coups de Josué, en même temps que les Gabaonites peuvent se féliciter de l'alliance qu'ils ont faite : un grand carnage afieu, les cinq rois sont mis en fuite, le jour est trop court pour l'achèvement de la victoire, Josué commande au soleil et à la lune de s'arrêter, et les cinq rois sont mis à mort au fond de la caverne dans laquelle ils ont cherché leur refuge. Profitant de ses avantages, Josué assiège plusieurs autres villes cananéennes, Makkéda, Libna, La-kis, Héglon, Hébron, il saccage tout le pays depuis Kadés-Barné jusqu'à Gaza, de Goscen jusqu'à Gabaon, et devenu maître de toute la partie méridionale de Canaan, il rentre triomphant à Guilgal où le peuple était campé. Une ligue du Nord succéda à la ligue du Midi, Jabin succéda à Adonitsédec, et malgré leur multitude ils ne furent pas plus heureux, ils ne s'assemblèrent que pour être détruits d'un seul coup. Josué les chargea à l'irapro-viste, et les battit tellement qu'il n'en laissa échapper aucun; il revint de là à Hatsor, qu'il brûla ainsi que toutes les villes d'alentour, et en fit mourir les enfants, les rois et les chevaux. Mais il fallut quelques années pour réduire à l'obéissance tout le pays, car ces petits rois se succédaient les uns aux autres à mesure que Josué en abattait quelques-uns, et il fallut leur faire la guerre à tous, aucun ne s'étant rendu sans combat. Ce ne fut donc que six ou sept ans après leur entrée en Canaan que les Israélites purent commencer le partage des terres, étant maîtres alors de tout le pays, à l'exception de quelques villes, Gaza, Gath et Asdod, qui étaient restées aux Hanakins, et de quelques peuplades qui purent conserver longtemps encore leur indépendance, n'ayant pas été exterminées lorsqu'elles pouvaient l'être, et comme Dieu avait ordonné à Jo-sué de le faire.

On suppose en général que le sacrifice du mont Hébal (8, 30-35.) dont nous avons parlé en son lieu, ne fut célébré qu'alors, une fois que le peuple put se reposer enfin de ses longues et pénibles guerres. C'est dans le même temps à peu près que se passa la touchante scène d'une noble querelle, de franches explications, et d'ai-mable réconciliation : ce furent des jours de réveil qui peuvent compter parmi les plus beaux de toute l'histoire d'Israël ; Jos. 22.

Deux tribus et demie demeuraient au delà du Jourdain ; la terre promise devait être partagée entre les autres neuf et demie ; ce partage se fit peut-être au fur et à mesure que le peuple avançait dans le pays, et proportionnellement à la force et à la population des tribus ; les villes de refuge furent désignées, et les Lévites se virent assigner les lieux de leur héritage. Lorsque tout fut en règle à cet égard, que les tribus furent entrées en possession de leur territoire, et que les parts furent faites, Josué crut pouvoir à son tour se choisir un héritage avec le consentement du peuple, et il prit Timnath-Sérah en la montagne d'Ephraïm. Servi le dernier, il dut se contenter encore d'une petite ville peu importante, située dans une contrée moins favorisée que d'autres, mais il était près de Silo, et le voisinage du saint lieu ne fut sans doute pas sans influence sur son choix.

Josué avançait en âge, il touchait au terme de sa carrière, il avait été une lumière ardente et vive; l'Ecriture sainte nous présente peu de caractères qui aient été aussi actifs au service de leur maître, aussi fidèles dans leur profession, aussi inébranlables dans leur foi ; l'histoire tout entière ne présente aucun conquérantdont les guerres offrent le même caractère de justice dans le but, et de dépréoccupation personnelle dans l'exécution. Il mourut comme il avait vécu ; sa dernière pensée fut pour la gloire de son Dieu et pour le bonheur de son peuple. Agé de cent dix ans, et voyant approcher son heure, il fit convoquer toute l'assemblée d'Israël, ses anciens, ses chefs, ses juges et ses officiers, et lui, seul survivant de tous ceux qui avaient vu la captivité de l'Egypte, seul survivant de tous ceux qui avaient vu les scènes du désert, gouverneur de vingtHiinq années et vrai patriarche et roi du peuple, il ne parle à ceux qui l'entourent, ni de lois, ni de conquêtes, ni d'administration ; un mot suffit à ses victoires, et son discours d'adieu ne suffit pas à leur dire tout ce qu'il voudrait sur les dangers de l'idolâtrie, et l'importance pour eux tous de rester fidèles à ce Dieu qui leur avait toujours été fidèle. Peu de temps après, il les rassemble de nouveau en Sichem pour leur adresser une dernière fois des paroles d'exhortation, il leur rappelle les merveilles que Dieu a faites en leur faveur, et les presse de se décider d'une manière franche sur le Dieu qu'ils veulent adorer : mais pour moi, leur dit-il, pour moi et ma maison, nous servirons l'Eternel. Alors il traite alliance avec le peuple, lui propose des ordonnances et des statuts, met par écrit tout ce qui vient de se passer, et dresse pour monument une grande pierre sous un chêne : puis il s'endort âgé de cent dix ans, et le peuple qui le pleure et qui n'a plus de chef, l'ensevelit à Timnath-Sérah dans le lieu de son héritage.

Le nom de ce pieux conquérant se retrouve Jug. 1,1. Néh. 8, 17. Act 7, 45. Hébr. i, 8.

Josué paraît être l'auteur du dernier chapitre du Deutéronome ; quant au livre qui porte son nom, les Juifs le lui attribuent assez ordinairement ; cependant il ne paraît pas qu'il en soit l'auteur : les uns y voient un extrait du livre de Jahzer ou du Droiturier, Jos. 10, 13; d'autres pensent qu'il a été composé par Eléazar le souverain pontife, contemporain de Josué; d'autres enfin supposent, avec vraisemblance, que Josué a écrit quelques mémoires détachés, qui ont été plus tard réunis, complétés, et rédigés par un prophète, Esdras par exemple, u. Haevernick's Einleitung.

La célèbre station du soleil et de la lune, qui a été l'objet de tant de plaisanteries, d'explications, de doutes et d'hypothèses, forme la principale difficulté de l'histoire de Josué, et l'une des plus grandes de la révélation tout enlière. On a essayé des traductions différentes du texte, on a imputé à la poésie des paroles qui appartiennent à la prose, on a fait de l'armée des cieux une armée terrestre, du soleil qui brille au firmament l'étendard d'une des compagnies de Josué, de la reine des nuits le drapeau d'un autre corps d'armée, des paroles prophétiques de Josué un ordre stratégique donné à ces compagnies de se poster, l'une sur Gabaon, l'autre sur les hauteurs qui dominent la vallée d'Ajalon. Ces diverses tentatives, toutes plus ou moins hasardées, toutes forcées, car l'interprétation littérale est la seule naturelle, doivent leur naissance aux nombreuses objections, aux difficultés réelles que soulève le récit biblique dès qu'on le prend à la lettre. Nous n'appellerons pas sérieuse l'objection tirée du langage même de Josué, qui paraît supposer le mouvement du soleil, et non la rotation de la terre. Josué parle comme tout le monde, comme les plus savants, comme l'Annuaire du Bureau des longitudes; tout le monde dit : Le lever, et le coucher du soleil. Et, comme Chaiibard le fait remarquer, l'ordre de s'arrêter, donné simultanément

au soleil et à la lune, non seulement ferait supposer, mais prouve même que Jo-sué, ou celui qui lui dictait ses paroles, ne confondait pas à cet égard l'apparence avec la réalité. Mais on peut regarder comme sérieuses les trois objections suivantes, auxquelles nous répondrons en peu de mots : o) Si la terre s'est réellement arrêtée, tout ce qui était alors debout, principalement dans les zones tor-ride et tempérées, arbres, maisons, hommes, animaux, doit avoir été à l'instant même renversé et brisé par la violence du choc de l'atmosphère. — Oui, si l'atmosphère ne s'est pas arrêtée avec la terre; non, si au contraire l'atmosphère, qui fait en quelque sorte partie intégrante du globe, s'est arrêtée avec lui; non, surtout, si l'arrêt, au lieu d'être subit, a été graduel. 6) Il répugne d'admettre comme historique un passage dont on s'est autorisé pour condamner Galilée et le véritable système du monde. — Sans doute; mais comme ce passage n'a été qu'un prétexte mal compris, on aurait tort de conclure de l'abus contre l'usage, c) Mais la plus grave objection, c'est que, d'après le récit biblique, ce dérangement du système de l'univers, ce bouleversement de toutes les lois du mouvement des corps célestes, ce cataclysme général, n'aurait eu lieu que pour donner aux Israélites le temps de consommer la déroute de leurs ennemis, lorsqu'il y aurait eu une foule d'autres moyens moins effrayants, moins effroyables, pour obtenir le même résultat. — Les réponses à cette objection sont faibles, du moins à notre pas de vue. On peut dire que Dieu subordonnait la terre entière aux succès de son peuple, comme il subordonne à notre globe le récit de la création tout entière; que la prise de possession des Israélites devait être marquée par des signes dans le ciel et sur la terre; que Dieu se proposait peut-être de détruire une partie du monde d'alors par un déluge partiel (v. plus bas), et que les deux faits ont coïncidé ; que dans la bouche de Josué, inspiré de l'Esprit de Dieu, ces paroles sont moins un ordre qu'une proclamation ; qu'il se borne à annoncer le fait que Dieu lui a révélé ; que, dans tous les cas, les historiens juifs sont bien excusables d'avoir attribué à une intervention de Dieu en leur faveur le prolongement de jour qui leur a assuré la victoire, etc. Mais si ces réponses sont faibles, nous pouvons demander aussi quelles conclusions l'on veut tirer de l'objection. En conclura-t-on que la station du soleil et le double jour qui en est résulté soient des faits imaginaires P Ici nous en appelons à la géologie, et nous trouvons une fois de plus, que le plus ancien de tous les livres en est aussi le plus vrai, à quelque pas de vue qu'on le considère, et que la science ne mérite son nom que lorsque ses progrès l'ont conduite jusqu'à rendre témoignage à la révélation.

Si la terre s'est réellement arrêtée, que le temps d'arrêt ait été de 40 secondes, ou de 18 minutes, peu importe (v. Gaus-sen, Théopneustie, p. 360. sq.), l'immensité des eaux de la mer a dû nécessairement continuer le mouvement qui lui était commun avec le globe, et se déverser ainsi sur les continents ; et, en second lieu, le globe cessant d'être sollicité à s'aplatir vers les pôles par la rotation, a dû tendre à reprendre sa forme, sphérique originelle, se renfler vers les pôles, se rétrécir à l'équateur ; de là des convulsions, des tremblements de terre, des ruptures. Or, la géologie et les traditions rendent témoignage de ce double phénomène.

La tradition : en effet, le déluge de Deucalion, selon la chronologie vulgaire, remonte à l'an du monde 2504 environ ; Josué, né l'an 2460, aurait eu alors quarante-quatre ans (il était certainement plus âgé, mais lorsqu'il s'agit de déluges, et dans des temps où l'art des dates n'était pas très avancé, l'on doit se contenter de dates qui concordent à un demi-siècle près) ; la coïncidence entre ces deux événements paraît prouvée ; on peut en dire autant du déluge d'Ogygès, appelé aussi Ogygus, et peut-être le même que l'Augias des fables grecques, dont Hercule nettoya les étables par une inondation. Platon, dans son Timée, fait intervenir des prêtres égyptiens, qui reprochent aux Grecs de ne parler jamais que d'un seul déluge, alors qu'il y en a eu plusieurs, « un déluge, entre autres, accompagné de tremblements de terre, qui dura l'espace d'un jour et d'une nuit (24 heures), et engouffra l'Atlantide

elle-même, qui disparut entièrement, abîmée sous les flots, » etc. Le long jour des Hébreux se retrouve encore sous le déguisement d'une double nuit, dans les traditions des Latins et des Grecs, qui l'attribuèrent aux voluptueux caprices de Jupiter (Ovid. Amor. 1,13. Prop. 2, 22. Lucain, Phars. 6.). La double nuit correspond au double jour si, comme on va le voir, la station de la terre a eu lieu peu après le lever du soleil; alors il devait encore faire nuit chez les Grecs, et la variante de la traditftn prouve, mieux que ne ferait son entier accord, la réalité même du fait.

La géologie, avons-nous dit, rend témoignage à l'histoire. Au moins on a constaté une formation de 4$CTains tertiaires de transports dont ona^té longtemps avant de reconnaître le caractère spécial, et qu'on ne peut expliquer que par une inondation violente, subite, courte, générale, mais partout partielle, dirigée de l'occident à l'orient, et parfois, par suite de circonstances particulières, du nord-ouest au sùd-est, beaucoup plus forte vers l'équateur que vers les pôles, autant de caractères qui ne s'expliquent que par une suspension momentanée du mouvement de rotation du globe. Cette formation, confondue tantôt avec les terrains secondaires supérieurs, tantôt avec les alluvions modernes qui se forment sous nos yeux, comprend les grands dépôts de sable de l'A-frique occidentale (Sahara, etc.), des côtes occidentales et boréales de l'Europe et de la Nouvelle-Hollande, les dépôts arénacés de la Sffiérie, avec les gros quadrupèdes qui y ont conservé leurs poils et leur peau, les brèches coquillières ou falun, les brèches osseuses du calcaire jurassique, les cavernes à ossements du même dépôt ; les coquillages bivalves qu'on y rencontre y sont entassés sans ordre, tandis que dans les autres formations ils sont toujours dans leur position naturelle, c'est-à-dire, leur valve supérieure en haut. Ce fait démontre la soudaineté et la brièveté de la catastrophe. Les forêts souterraines qu'on trouve ensevelies sous les sables de la Russie septentrionale sont dirigées du nord-ouest au sud-est ; enfin l'on voit en Auvergne des produits volcaniques et pseudovolcaniques, alternant avec les sables et graviers qui recouvrent les formations secondaires les plus récentes de ces contrées, et l'on a reconnu parmi les fossiles carbonisés, au-dessous d'un de ces amas volcaniques, une planche travaillée par la main de l'homme (à Boutaresse), ce qui semble faire remonter à une date comparativement peu ancienne l'amas de ces terres sableuses et crétacées, et le gisement de cette formation.

Ces faits qui rendent plausible, probable, et même nécessaire, l'interruption momentanée du mouvement de rotation de la terre, ces faits dont le souvenir s'est conservé ailleurs que chez les Hébreux, et qui semblent écrits sur les ruines qui couvrent la surface du globe, sont développés dans les Eléments de géologie du modeste et savant Chaubard (1833), de manière à ne laisser presque aucun doute dans l'esprit. Il nous a paru convenable d'en reproduire les traits principaux, à cause de l'importance du sujet, et de l'invraisemblance apparente du miracle. La station de la terre se place donc, comme phénomène, sur le même rang que le phénomène de la création et celui du déluge, et si sa cause nous paraît moins digne du but, nous répondrons encore avec Chaubard : Quelles conclusions veut-on en tirer ?

Ajoutons, d'après le même géologue : a) que Josué se trouvait vers la position de Beth-Horon-la-Basse au moment où le soleil suspendit sa course; 6) que, vu de là, le soleil avait en ce moment 24° 10' environ d'amplitude ortive nord ; c) que ce jour est postérieur au 20 mars et antérieur au 24 juillet ; Chaubard le fixe au 5 juillet environ ; la lune devait se trouver dans son troisième quartier; d) enfin, que le soleil n'était levé que depuis 26 ou 27 minutes lorsqu'il s'est arrêté.

Voir sur l'ensemble de cette question Chaubard, Elém., p. 267-334. La géologie renferme encore tant de mystères que l'on ne saurait rien affirmer ; chaque savant présente son système, et nous commande le doute par son absolutisme même. Il suffit d'ouvrir un ouvrage quelconque pour s'en convaincre. Le travail de Chaubard nous a paru ne pas répondre à tout d'une manière satisfaisante, mais il a le grand mérite d'être simple, sans prétentions, naturel, et de se rapprocher de la révélation plus que tous les autres systèmes, ce qui est une garantie contre l'erreur, car c'est toujours là qu'il faut en revenir. Ce qu'il dit des terrains de la dernière formation est d'ailleurs plus fort et plus solide que les raisons qu'il allègue pour expliquer les formations précédentes.

2° Josué de Bethsémès, 1 Sam. 6, 14. C'est au milieu de son champ que s'arrêtèrent lesjeunes vaches que les Philistins avaient attelées au char qui devait emmener du milieu d'eux l'arijhe sainte. Les deux génisses furent offertes en holocauste à l'endroit même où elles s'étaient arrêtées, mais l'indiscrète curiosité des Betbsémites donna à ce lieu un renom de malheur, à cause de la plaie soudaine qui fut leur châtiment.

JOTBA. v. Jatba.

JOTHAM, 1° le plus jeune des fils de Gédéon, et celui qui échappa seul au massacre de toute la famille, ordonné par Abimèlec,Jug. 9, 5. Il est connu par la fable qu'il raconta aux gens de Sichem, la première fable que l'on découvre dans toute l'antiquité, et qui prend place deux siècles au moins avant le grand fabuliste de l'Orient : cette fable de l'égoïsme puni se disthigue par son élégance, sa poésie, et la juwiwse de son application. Jotham ne tira, du reste, pas d'autre vengeance des Sichémites qui avaient abandonné la famille de son père, et il s'enfuit en diligence à Béer entre Jérusalem et Béthel.

2° Jotham, onzième roi de Juda, fils et successeur d'Hozias, occupa le trône pendant seize ans (759-743). Il fit le bien devant l'Eternel, sans pouvoir cependant extirper l'idolâtrie de Juda, 2 Rois 15, 33. cf. 2 Chr. 27, 2. La nation seule fut coupable du bien qu'elle empêcha le roi de faire, et Jotham eut un règne prospère et florissant : il pourvut à la sûreté du royaume par la construction de places fortes, et agrandit la porte principale du temple. Au dehors ses armes triomphèrent des Hammonites, et il en reçut pendant trois années un riche tribut en argent et en blé. Il mourut en paix, et fut enseveli dans les sépulcres de ses pères. Son nom se retrouve Es, 1,1. 7, 1. Os. 1,1. Mich. 1,1.1 Chr. 5, 17. Mat 1, 9. Son avènement au trône fut marqué par le commencement du ministère d'E-saïe, qui fut son contemporain, ainsi que Osée et Michée.

JOTSADAK. v. Jéhotsadak.

JOUR. Les Hébreux comptaient leurs jours d'un coucher de soleil à l'autre, selon le commandement de Moïse, Lév. 23, 32. Les Romains avaient deux sortes de jours avec des noms différents, le jour civil et le jour naturel : le premier était le même que chez nous ; le second, qui était celui de la vie ordinaire, commençait à six heures du matin, et finissait à six heures du soir. Le jour civil des Juifs variait en longueur, suivant les saisons de l'année, mais était toujours partagé en douze parties ou heures, Jean 11, 9., qui devaient elles-mêmes varier considéra-blement, puisque les plus longs jours allaient jusqu'à 14 heures 4 2 minutes, tandis que les plus courts ne comptaient que 9 heures 48 minutes, et que la différence était ainsi de 4 heures 28 minutes. Il ne paraît pas du reste que les Hébreux, avantl'exil, aient connu d'autres divisions du jour que la division naturelle du matin, du midi, Gen. 43, 16. Deu 28, 29., et du soir ; on peut y joindre encore l'aurore et le crépuscule : c'est des Babylo-niens qu'ils ont pris, comme les Grecs aussi, d'après Hérodote 2,109., la division du jour en 12 heures, Dan. 4, 19. 5, 5., division qui fut dès lors généralement adoptée et qu'on retrouve dans le Nouveau Testament. C'est à la même époque probablement que remonte aussi la division du jour en quatre parties, et celle de la nuit en quatre veilles, cf. — Quant aux jours de fête, v. Fêles.

C'est par journées de chemin que les premiers patriarches, et même les Juifs postérieurs, jusqu'après les temps de l'exil, appréciaient les distances, Gen. 30, 36. 31, 23. Ex. 3, 18. 3,3. Nomb. 10, 33. 33, 8. Deu 1, 2. 1 Rois 19, 4. 2 Rois 3, 9. Jon. 3, 3. cf. 1 Macc. S, 24. 7, 45. Tob. 6,1. La même expression se retrouve encore dans le Nouveau Testament, Luc 2, 44., et dans Josèphe. Dans les anciens temps cette manière sommaire de mesurer l'éloignement de deux villes était la plus ordinaire, peut-être la seule, comme elle est encore en usage de nos jours chez les Arabes et les Perses ; mais sous le pas de vue géographique c'est une évaluation sans valeur, les journées des caravanes variant aisément de 6 à 12 lieues; la journée moyenne est évaluée à 7 lieues ; Hérodote, 4, 101., quia donnée ajournée moyenne le chiffre le plus élevé, lui donne 200 stades ou 8 lieues.

JOURDAIN, le plus grand fleuve de la Palestine. Son nom (en hébreu, Jarden ou Yarden) vient, selon les uns de yeor ou yôr, qui signifie fleuve, et Den ou Dan, fleuve qui a sa source près de Dan ; selon les autres, et avec plus de probabilité, de yarad, descendre, couler avec impétuosité (comme en allemand Rhein, le Rhin, vient de rinnen, couler). Il a plusieurs sources, dont deux principales; l'une est l'Hasbény ou Hasbéya, ruisseau qui par-court la haute vallée de l'Hermon sur un sol noir, basaltique et poreux ; l'autre est le Banjas, qui sort d'une grotte profonde au pied des flancs boisés de l'Hermon, dans une belle et pittoresque contrée ; ce second ruisseau, dont les eaux arrivent, dit-on, du lac de Thiala par des canaux souterrains, acquiert immédiatement une largeur considérable. Le Banjas est le bras le plus considérable du Jourdain : il se réunit, quelques lieues plus bas, à l'Hasbény et à plusieurs autres ruisseaux qui descendent de tous les côtés, et forme le lac Mérom, dont les rives sont marécageuses. Lorsque les eaux sont hautes, à l'époque de la fonte des neiges, ce lac remplit la vallée presque entière, sur une largeur de trois lieues ; en d'autres temps, au contraire, il n'est plus qu'un marais, ou parfois même il se dessèche et disparaît presque complètement (Seet-zen). Alors des roseaux, le papyrus et d'autres plantes aquatiques, croissent sur son sol noir et gras, et des bêtes sauvages, des sangliers et des serpents y cherchent leur demeure. De là la vallée se rétrécit extrêmement, et le Jourdain parcourt 23 kilom. environ, avec une très grande rapidité, entre le bras est de l'Hermon et les montagnes de Nephthali. (A deux kilom. au-dessous du lac Mérom est un pont qu'une tradition inexacte a nommé pont de Jacob). Après une quarantaine de kilom. il entre dans le lac de Gé-nésareth, qu'il alimente et d'où il ressort 25 kilom. plus bas. Son cours se régularise alors, et l'espace de 100 kilom. environ il marche du nord au sud, presque parallèlement à la Méditerranée, dans une vallée chaude et profonde appelée la grande vallée du Jourdain (arabe, El Ghor), très étroite d'abord, mais qui s'élargit vers le midi. Les deux parois de montagnes qui forment cette vallée ne présentent aucune interruption sensible, et, comme le Jura du côté de la Suisse, elles semblent dans le lointain être de hautes murailles d'un bf;u à la fois mat et foncé. La chaîne orientale est la plus élevée, la plus continue et la plus uniforme. La vallée du Ghor se divise en trois parties : la supérieure, qui participe à la nature du lac de Tibériade ; la moyenne, dont la largeur est de 7 à 8 kilom., et qui présente de beaux pâturages, quelques habitations et quelques ruines; enfin leGhor inférieur, qui participe à la nature de la mer Morte ; sa largeur est de 20 kilom. ; il comprend la campagne de Moab, sur la rive orientale, Nomb. 22,1. 26, 3. 63. 33, 48., et celle de Jérico, Jos. 4,13.5, 10., sur la rive occidentale. La largeur et la profondeur du Jourdain varient beaucoup, suivant les lieux et les saisons de l'année. A son entrée dans le lac Mérom on évaluera largeur à 20 pas, à 80 lorsqu'il sort du lac de Génésareth, de 60-90 pieds près de Jérico, de 2 à 300 à son embouchure dans la mer Morte ; sa profondeur près de Jérico est de 5 à 6 coudées ; elle n'est que de 6 ou 7 pieds à 800 pas au sud de la mer de Tibériade, et en été seulement de 3 pieds. (Ces diverses mesures sont prises dans divers ouvrages ; on craindrait, en les réduisant à l'unité, de commettre ! des erreurs, les mots pieds, pas, coudées, etc., n'ayant pas toujours la même valeur). Le Jourdain est poissonneux, ses rives sont couvertes d'arbres et de roseaux, de joncs, de cannes et de saules ; ses eaux sont troubles et jaunâtres, plutôt tièdes que froides, mais potables et pouvant se conserver assez facilement. — L'Ecriture sainte parle du Jourdain en près de deux cents endroits : on sait les miracles dont ce fleuve a été le témoin, le partage de ses eaux sous Josué, 3,13.; comment Elie et Elisée le passèrent à sec, 2 Rois 2, 8.; comment le fer de la hache surnagea, 2 Rois (S, 6. 7., et la descente & saint Esprit sur notre Sauveur lors de son baptême, Mat3,16. v. encore Gen. 14, 14-20. cf. Ps. 110, 4. Hébr. 5, 6.10. 7, 1-4. — Nomb. 23,24,25,31,12. cf. Apoc. 2, 14. — Jos. 1,2. 14. Jér. 12, 5. 49, 19.50, 44. Zach. 11, 3.

JOZABAD ou Jéhozabad, elJozaoarou Zabad, fils, le, premier d'une Moabite, le second d'une Hammonite, tous deux prosélytes, assassinèrent Joas sur son lit, pour venjtfçr la mort de Zacharie, et furent mis à mort eux-mêmes par Amatsia, fils et successeur de Joas, 2 Rois 12, 21. 14, o. 2Chr. 24, 26. 25, 3.

JUBAL, Gen. 4, 21., fils de Lémec et de Hada, et frère de Jabal. Il inventa, disent nos versions, le violon et les orgues, ou, d'une manière plus générale et sans pouvoir préciser davantage, les instruments à cordes et les instruments à vent, peut-être une espèce de guitare et une sorte d'harmonica. Chez tous les peuples, l'invention de ces instruments de musique remonte à une haute antiquité, et l'on aime assez à l'attribuer à quelque personnage important; c'est ainsi que les Grecs ont leur Apollon, dont le nom n'est pas sans quelque rapport étymologique avec celui de Jubal. Remarquons encore combien la découverte de cet art, si difficile en même temps qu'il est si naturel, touche de près à l'époque où les premiers métiers utiles ont commencé d'être inventés, combien l'agréable et l'utile ont aimé à marcher de front dans l'histoire du développement de l'humanité. «.Musique.

JUBILÉ, v. Année du Jubilé.

JUCAL. v. Jéhucal.

JUDA. 1° Le quatrième fils de Jacob et de Léa, Gen. 29, 35. 35, 23. 37, 26. 1 Chr.2,1. Mat 1,2. Luc, 3, 33 (1755 av. C). Ce fut lui qui sauva la vie de Joseph, et qui conseilla de le vendre au lieu de le tuer. Après un si grand crime, l'union ne pouvait plus exister parmi des frères aussi jalousement haineux. Juda s'éloigna de sa famille, et vint demeurer à Hadullam. Il y fit la connaissance d'une Cananéenne, nommée Suah, qu'il épousa, et dont il eut trois fils. Il maria successivement les deux aînés à une jeune fille, Tamar, idolâtre comme Suah, et, après leur mort, il la destina encore pour épouse à Séla, le plus jeune de ses fils ; mais il tardait à accomplir ce mariage, soit que Séla fût trop jeune, soit plutôt que Juda craignît pour son cadet un sort semblable à celui des deux aînés. En attendant, il devint veuf; quand les jours de son deuil furent écoulés, il se rendit à Timnath, non loin d'Hadullam, et, ayant rencontré une femme qu'il prit pour une prostituée, il vint vers elle, lui promit un chevreau, et lui donna des gages. Bientôt après, on lui rapporta que Tamar, sa belle-fille, était enceinte ; qu'elle avait violé la foi promise à Séla, qu'elle était adultère : le supplice du feu, en usage contre ce crime parmi les anciens peuples (Jug. 15,6.), est impitoyablement prononcé par Juda contre Tamar ; mais il doit révoquer sa sentence lorsqu'elle lui prouve, en lui montrant les gages qu'elle a reçus de lui, que c'est de lui-même que lui vient son déshonneur. Cette honteuse histoire se lit au 38e chapitre de la Genèse, triste épisode dans une vie qui a eu des moments sublimes à côté de beaucoup de faiblesses et de lâchetés. On ignore à quelle époque on en doit placer le commencement et la fin ; il est probable que, lors de la vente de Joseph aux Ismaélites, Juda était déjà marié ; car, depuis ce moment jusqu'à la reconnaissance de Joseph en Egypte, il ne se passa que vingt-deux ans, temps qui serait trop court pour comprendre toute l'histoire de Suah et de Tamar, le mariage de Juda, la naissance de trois fils, et le mariage possible de son cadel ; or, lors du voyage d'Egypte, tout cet épisode est terminé. Sur le mariage successif d'une femme à trois frères, cf. Deu 25, o. L'impression que ce récit laisse dans le cœur est un dégoût profond, une sorte de mépris pour la licence effrénée d'une époque pareille, v. Grandpierre, Essais sur le Pen-tateuque. Nous ne voudrions pas avoir parmi nos ancêtres le fils illégitime d'un beau-père et de sa belle-fille ; mais Jésus ne l'a pas craint : il est descendu en ligne directe de ce Phares, l'un des deux jumeaux de Juda et de Tamar.

A l'époque de la famine, on trouve de nouveau Juda réuni à son père et à ses frères, Gen. 43, 3. C'est lui qui décide Ja-cobà laisser veniravec eux Benjamin; c'est lui qui porte la parole devant Joseph, quand il voit Benjamin sur le pas d'être retenu comme esclave ; c'est enfin lui qui vient annoncer à Joseph l'arrivée de son père.

Juda, qui paraît avoir hérité du droit d'aînesse, en suite de l'inceste de Ruben avec Bilha, et de la violence de Siméon et de Lévi contre les Sichémites, est le chef de la plus grande des tribus d'Israël. On la voit la plus nombreuse dès le temps de Moïse, Nomb. 1, 26. 27., marchant dans le désert à la tête des autres, .N'ornb. 2, 3. 10, 14. et s'avançant la première au combat. Jug. 1, 2. 20, 18., comme elle figure aussi la première dans l'énumération de 1 Chr. 42, 24. Son territoire s'étendait, à l'est, jusqu'à la mer Morte; à l'ouest, jusqu'à la Méditerranée; au sud, il allait de l'extrémité de la mer Morte au ruisseau d'Egypte ; au nord, de l'autre extrémité de la même mer jusqu'à Jamné, par la vallée du Cé-dron et par Kiriath-Jéharim. Juda était donc, par sa position, le défenseur naturel des frontières méridionales |u pays contre les Philistins, les Hamalécnes, les Edomites et l'Egypte. 11 reçut en partage 115 villes: dont 29 dans des contrées inconnues, voisines d'Hamalek et d'Edom, dans le pays du midi ; 42 dans la plaine, depuis le pied des montagnes du plateau à la Méditerranée; 38 sur la montagne ou sur le plateau, et 6 dans le désert qui est à l'ouest de la mer Morte. Quoiqu'il en ait cédé plusieurs à Siméon, à Dan et à Benjamin, son territoire resta cependant encore plus grand qu'aucun autre, à l'exception peut-être de celui de Manas-sé. Il combatttit longtemps contre les Cananéens de son territoire, contre les Philistins, les Iduniéens et les autres peuples voisins, avant que de les soumettre entièrement. Ses ennemis étaient plus redoutables encore que ceux de Ma-nassé, et ses frontières plus importantes que celles de l'Hauran, mais il en vint à bout ; la prière de Moi'se fut exaucée : « 0 Eternel, écoute la voix de Juda ! que ses mains lui suffisent, et sois-lui en aide contre tous ses ennemis! » (Deu 33, 7.) Les prédictions du vieux Jacob s'accom-plissaient aussi : « Juda. est un faon de lion ; il s'est couché comme un lion qui est en sa force, comme un vieux lion ; qui le réveillera ? — Sa main a été (sous David) sur le collet de ses ennemis, et (depuis la royauté davidique), ses frères se sont prosternés devant lui, » Gen. 49, 8. Juda habitait un pays de vignobles, et ses déserts même étaient de bons pâturages, selon ce que Jacob avait annoncé (ibid. 41 et 12.) « Il attache à la vigne son ànon, et au cep excellent le petit de son ânesse; il lave son vêtement dans le vin, et son manteau dans le sang des grappes ; il a les yeux vermeils de vin, et les dents blanches de lait.»

Après la mort de Saùl, la tribu de Juda se sépara des onze autres, et reconnut seule la royauté de David, alors âgé de trente ans, pendant qu'Is-Boseth, fils de Saùl, régnait sur tout le reste du pays. Juda soutint son roi les armes à la main, et vit, au bout de sept ans et demi, son parti victorieux et les tribus ennemies se réunir à lui : cette vaillante tribu devint ainsi la première du royaume en influence ; elle conserva ses avantages, et David y fixa sa résidence. Mais celle d'Ephraïm ne put voir sans jalousie ce triomphe qui assurait à une autre tribu la prépondérance à laquelle elle avait toujours aspiré; et, profitant du mécontentement qui s'était manifesté chez plusieurs tribus sous le règne de Salomon, et qu'elle s'était sans doute appliquée à entretenir, elle se mit à leur tête à la mort de ce monarque, et, ne pouvant réunir à elle le royaume tout entier, elle proclama la division du Royaume en deux parties, dont l'une fut appelée, de son nom, royaume d'Ephraïm (quelquefois, mais improprement, royaume d'Israël), et l'autre, royaume de Juda.

Deux tribus seules, celles de Juda et de Benjamin, composèrent le royaume de Juda ; il faut y joindre cependant aussi quelques villes de Dan et de Siméon, 2Chr. 11, 10. 1 Rois 19, 3. Mais si ce royaume fut petit, il n'en resta pas moins le plus important des deux, non seulement parce qu'il avait à sa tête la dynastie légitime, la royauté davidique, mais encore parce qu'il renfermait la plus grande ville de toute la Palestine, Jérusalem, et Je temple et le tabernacle, seul sanctuaire vers lequel pussent se tourner les Juifs pieux et fidèles du royaume des dix tribus; enfin, Juda commandait à l'Idu-mée, dont les ports lui étaient assujettis, et pouvaient être pour lui d'une grande utilité militaire ou commerciale; mais il ne sut pas toujours profiter de ses avantages. La faiblesse numérique du royaume de Juda ressort de ce qui est dit, <l Rois 12,21., que Roboam, voulant attaquer Jéroboam, ne put mettre sur pied que 180,000 hommes, chiffre bien peu considérable quand on se rappelle ce que nous avons dit des armées de ces anciens temps ; on voit encore, par 2 Rois, 1 4, 9., l'immense différence que le roi d'Israël mettait entre sa puissance et celle de Juda. Mais, dans l'esprit du peuple, la dynastie de Juda fut toujours considérée comme la légitime, tandis que celle d'Israël était sortie d'une révolution, et n'avait pas pour elle ce droit divin que, seule parmi toutes les dynasties qui ont existé, celle de David a pu revendiquer à juste titre ; les prophètes n'ont pas manqué de relever toujours cette légitimité du royaume de Juda. Sans doute, un prophète prédit à Jéroboam son avènement au trône d'Israël, et lui annonça même qu'il serait béni s'il était fidèle ; mais une prédiction n'est pas une autorisation ; v. d'ailleurs 1 Rois 14,14. Jéhu même, nouvel usurpateur, fut également consacré roi d'Israël par un prophète, 2 Rois 9, 1 sq., et la dynastie de Jéroboam tomba comme elle s'était élevée. Le royaume de Juda était garanti, à l'orient, par de puissantes frontières naturelles, contre ses ennemis extérieurs; mais, des trois autres côtés, il était presque sans défense. Sa durée, jusqu'à sa destruction par les Rabyloniens, a été, d'après les calculs les plus exacts, de 387 ou 388 ans (Ezéchiel, 4, S., en nombres ronds dit 390), c'est-à-dire de g1/3-588 av. C. Les chiffres indiqués dans les li vres historiques pour le règne de chaque roi porteraient la somme totale des années à 393 ans et six mois ; mais les années n'étant pas toujours complètes, il est bien facile de réduire ce chiffre à celui de 387 sans altérer la justesse des calculs. Voici la liste de ces vingt rois :

Roboam régna 17 ans, 1 R. 14,21.

Abijam — 3 — 13,1.2.

Asa — 41 — 18,10:

Josaphat — 25 — 22,42.

Joram — 8 2R. 8,17.

Achazia — 1 — 8,26.

Hathalie ' — 6 —11,3.

Joas — 40 — 12, 1.

Amatsia — 29 — 14, 2.

Hosias — 52 — 18, 2.

Jotham — 16 — 15,33.

Achaz — 16 — 16, 2.

Ezéchias — 29 — 18, 2.

Manassé — oS — 21, 1.

Amon — 2 — 21,19.

Josias — 31 — 22, 1.

Joacbaz — 3 mois — 23,31.

Jéhojakim — 11 —23,36.

Jéhojacuin — 3 mois — 24, 8.

Sédécias — 11 — 24,18.

Ce fut, pendant toute l'existence du royaume, une seule et même dynastie; le fils (et presque toujours l'aîné) monta sur le trône à la place de son père, et cet ordre ne fut changé ni par l'usurpation momentanée d'Hathalie, ni par le meurtre de Joas, ni par celui d'Amon, ni même par l'intervention étrangère qui détrôna Joachaz et lui donna pour successeur Eliakim son frère (Jéhojakim), et qui, plus tard encore, remplaça Jé-hojachin par son oncle Mattania (Sédécias), frère de Joachaz. 2 R. 11, 1. 12, 20. 21, 23. 23, 34. 24, 17. Malgré la solidité du trône de Juda, presque aucun de ses règnes ne fut tranquille : dès le comdont il profita pour rallier sous son autorité religieuse ceux qui étaient demeurés de reste en Israël; mais bientôt, jeté entre les armées d'Egypte et d'Assyrie, il devint la proie de la première de ces puissances ; la dynastie cède à l'influence malfaisante de l'Egypte, contre laquelle les prophètes avaient déjà de bonne heure essayé de la mettre en garde; d'un autre côté Nébucadnetsar, le conquérant de Babylone, creuse la fosse où doit périr l'indépendance et la royauté terrestre de ce petit royaume : il chasse vers l'occident de l'Asie ses troupes innombrables, pille Jérusalem, conduit en [ captivité la meilleure partie du peuple, et finit par bouleverser et détruire entièrement capitale et royaume, sous le règne et par la fausse politique de Sédécias, qui n'avait que l'ombre du pouvoir et qui ne la sut pas même conserver, 2 Rois 24, 20. Ez. 17, 15.

Le culte du vrai Dieu ne fut jamais entièrement abandonné, alors même que l'idolâtrie avait pris possession du pays, et plusieurs rois s'efforcèrent, comme Josias, de maintenir la pureté du culte et de lui rendre l'éclat qu'il avait eu aux premiers temps de la royauté juive, sous David et Salomon ; cependant ce ne fut, le plus souvent, qu'une religion extérieure et cérémonielle, Jér. 6, 20. 7, 4. Les prêtres jouirent d'un grand crédit à la cour de plusieurs rois, mais ne réussirent pas toujours à purifier les mœurs, contre le relâchement desquelles les pro-phètes, et notamment Esaïe, s'élevèrent souvent et avec énergie. — Dans la période qui s'écoula depuis Ezèchias jusqu'à la fin, une lutte s'éleva entre la royauté et l'aristocratie, Ez. 22, 6., et les grands essayèrent plus d'une fois de mettre les rois faibles dans une hinteuse dépendance; parfois ils réussirent, Jér. 4, 9. 36, 12. 37, 15. 38, 25.

Comme mœurs publiques, l'Ecriture fait ressortir : un fort penchant à l'incrédulité, Es. 5, 19. 7, 13. 28, 9.29, 11. 30, 9., et un système de désobéissance à quelques-unes des prescriptions de la loi divine, la violation du jour du Seigneur, Jér. 17, 21. 34, 9. Ez. 5, 6., un luxe, une mollesse effrénée, Es. 3,16. S, 14., qui mencement il dut lutter contre Israël, et acheta le secours des rois syriens ; puis l'anarchie du royaume schismatique lui donna la paix pour quelques années, 1 R. 14-46. Lorsque Israël se fut raffermi, les deux cours rivales conclurent unealliance, 1 R. 22, bientôt suivie d'un mariage, 2 R. 8, 18., qui blessa le royaume de Syrie, premier allié de Juda. Les suites de. cette alliance furent fâcheuses, sous le double pas de vue politique et reli-gieux, pour le royaume de Juda qui n'eût pas dû rechercher la faveur des tribus rebelles. Une nouvelle révolution j dans le royaume des dix tribus mit fin à I cette alliance, et les Syriens irrités fondirent alors sur Juda, qui dut racheter sa faiblesse par de grands sacrifices, 2 Rois 12, 17, Un succès momentané rendit à Juda son premier courage et remonta son ardeur : il réussit à ramener sous le joug les Edomites qui l'avaient secoué naguère, 2 Rois 14, 7., et enivré de cette victoire, il déclara la guerre au royaume d'Israël, 2Rois 14, 8.; mais Jérusalem fut pillée, et la guerre cessa. L'anarchie ayant recommencé en Israël, Juda put respirer un moment plus à l'aise et jouir en paix de ses conquêtes sur l'Idumée, 2 Rois 14, 22. Puis Israël, remis de ses troubles in-térieurs, renouvela ses attaques contre Juda, et s'allia aux rois de Syrie, qui s'emparèrent à leur tour des ports d'E-dom, 2 Rois 16, 6. Juda, trop faible pour résister seul, crut se fortifier par une nouvelle alliance avec une puissance infidèle, et rechercha le secours de l'Assyrie, qui s'étendait déjà vers l'Euphrate ; mais au iieu d'être son allié, Juda fut bientôt son vassal tributaire, 2 Rois 18, 7.; il dut. comme le cheval de la fable, servir de monture à son libérateur. Il essaya de secouer ce joug, se reposant sur l'appui qu'il attendait de l'Egypte, 2 Rois 18, 24.; mais il est probable qu'il n'eût fait qu'aggraver sa position, si un miracle de l'Eternel ne fût venu lui rappeler, en dispersant l'armée d'Assyrie, qu'il vaut mieux se confier en Dieu que de se reposer sur les grands, 2 Rois 19. Israël fut emmené captif, les armées de l'Assyrien durent se tourner vers d'autres ennemis, et Juda eut un temps de répit, endurcissait de jour en jour le cœur et aveuglait le peuple, Esaïe 32, 9. Ezé-chiel 11, 3. Jér. 5, 3.21.; l'injustice pa-raît avoir été à l'ordre du jour, et l'oppression des faibles, Es. 5, 20. 10, I. Jér. 5, 28.22,3.; le mensonge et la trom-perie avaient chassé la confiance mutuelle, Jér. 9, 3.; enfin le peuple se livrait sans honte comme sans crainte, au culte de] dieux étrangers, Jér. 10, 3. et ailleurs, Ez. 6, 5. et ailleurs; des prêtres même de Jèhovah se joignirent souvent à ces profanations, soit ouvertement, soit en secret, Soph. 3, 4. Ez. 44, 10. C'est ainsi que ce malheureux royaume mûrissait lentement pour sa ruine ; il ne dut qu'à des circonstances étrangères de survivre comme il le fit au royaume d'Israël. — Quant au sort du pays et de ses habitants pendant l'exil, v. Guédalia.

2° Juda, lils de Joseph ; — 3° fils de Johanna, et 4° fils de Joseph, Luc, 3, 30. 26. : deux des ancêtres de Jésus par Marie; l'un et l'autre inconnus.

JUDAS. 1° Le dernier des douze apôtres, Mat 10, 4. Marc 3,19. Luc 6, 16, Jean 6, 71. Il était surnommé Iscariot, soit qu'il fût de la tribu d'Issacar, dont ce surnom serait un abrégé, soit plutôt qu'il fut de Kérijoth, ce que son nom indiquerait en hébreu. Compagnon de Jésus dans toutes ses courses, il était chargé de la bourse et du maniement des aumônes, et son caractère, peut-être naturellement avare, trouva dans cette circonstance un aliment de cupidité qui le perdit. Pour l'avare, le simple plaisir de l'addition est déjà une sensualité ; son bonheur consiste à ajouter, sa douleur est de soustraire. Au souper de Bé-thanie, on le vit regretter le parfum que Marie avait répandu sur la tête et sur les pieds de Jésus, Jean 12, 4.; les autres disciples parurent croire aussi que cette dépense était une prodigalité, et que le prix en eût été employé plus utilement à soulager les pauvres, Matt. 26, 8. Marc 14, 4. Mais les pauvres n'étaient pour Judas qu'un prétexte ; s'il était avare, il était aussi voleur : l'un conduit à l'autre ; et dans la société dont il faisait partie, société fondée sur l'amour et sur la confiance, on n'examinait pas ses comptes, on le laissait faire, et il en abusait. Irrité, soit de ce qu'une occasion si favorable pour commettre un nouveau larcin lui eût été enlevée, soit des reproches indirects que Jésus lui avait faits, et dont il était mieux à même que les autres de comprendre la portée, il conçut à la première occasion (Jean 13, 2.) le projet de se procurer de l'argent d'une autre manière. Les marchands étaient tout trouvés, la chose à vendre était également sous sa main ; il vendit son maître, argent comptant, aux sacrificateurs pour le prix ordinaire d'un esclave, 30 pièces d'argent, cf. Ex. 21,32. De ce moment les détails donnés par les quatre évangélistes présentent quelque incertitude sur l'ordre des événements. Judas paraît être retourné vers Jésus à Béthanie, Marc 14,17. : il revient avec lui à Jérusalem, le jeudi; il prend sa place au milieu des douze, dans la maison où la dernière Pàque juive va être célébrée sous la forme d'un symbole, près de celui qui va être immolé comme le véritable agneau pascal qui ôte les péchés du monde ; il entend Jésus déclarer qu'un traître est au milieu d'eux; Jésus lui donne un morceau trempé, et le malheureux, qui voit Pierre et Jean parler avec leur maître sur cette trahison qui les effraye tous, ose encore demander : Maître, est-ce moi ? Il sort alors, et, sachant que Jésus va passer la nuit en Gethsémané, il va s'entendre avec les rêtres pendant que la cène s'achève et que Jésus prie pour le monde et bénit ses disciples. Bientôt le Sauveur a passé le Cédron, et le traître vient l'embrasser au lieu même qu'il vient de tremper de ses larmes, de ses sueurs et de son sang. Le Fils de l'Homme est saisi comme un brigand par les valets des prêtres ; il quitte Gethsémané pour la croix. Mais bientôt Juda apprend que son maître a été condamné à mort ; peut-être s'était-il flatté que Jésus échapperait à ses ennemis cette fois, comme en d'autres rencontres ; il avait supposé peut-être que Jésus en serait quitte pour une réprimande, une interdiction, tout au plus la prison. Il n'avait pas prévu, il ne pouvait pas prévoir une condamnation à mort : le dernier des supplices n'était fait que pour le dernier des criminels, et Judas, comme Pilate, ne voyait rien en Jésus qui fût digne de mort ; il avait compté sans la haine, sans la haine des prêtres. Aussi, quand il apprend la terrible sentence, tourmenté de remords, il va rendre l'argent, mais on ne lui rend pas la victime ; il est plus facile d'ôter la vie à un homme que de la lui rendre; et le fils de perdition, désespéré, va se pendre, nous dit saint Matthieu, 27, o. Saint Pierre ajoute que son corps s'est crevé par Je milieu, la corde s'étant peut-être rompue, et que ses entrailles ont été répandues à terre, Act l, 18.

Judas le traître a-t-il communié ? Cette question, débattue depuis des siècles, n'a pas été résolue, et ne le sera pas; elle dépend de l'impossible solution des trois questions suivantes : 1° le chapitre 43 de Jean parle-t-il du souper de la Pâque, ou bien d'un repas qui eut lieu à Béthanie deux jours auparavant? v. Tholuck ad Joli., 13. 2° Si ce chapitre parle du souper de la Pâque, Jésus a-t-il institué la cène avant ou après le lavage des pieds ? Si ce fut avant, Judas était là ; si ce fut après, il n'a pas communié puisqu'il est dit (v. 30) qu'il partit aussitôt après avoir pris le morceau. 3° Le morceau trempé que Jésus lui donna était-il un morceau de l'agneau pascal, le pain même de la communion, ou bien encore un mets indifférent ? Cette question, au reste, est moins importante que quelques personnes n'ont voulu la faire, etsi même Judas a communié, il l'a fait, non comme traître, puisqu'il n'était pas manifesté, mais comme disciple ; à coup sûr, il n'aurait pas été admis à la cène le lendemain, parce qu'alors il eût été reconnu comme impie et comme traître déclaré; aucun des apôtres n'eût voulu manger avec lui. (v. sur la cène de Judas : Guers, Essai sur les Eglises, 143-146; Bauty, Réponse, 81 ; F. Olivier, Réponse, 102-105, etc.)

Jésus a fait de cet homme le plus malheureux de tous les hommes, Matin, 26, 24., et l'on a tout dit quand on a dit un Judas.

2° Judas le Galiléen, Act 5, 37., appelé de même par Josèphe, qui lui donne aussi le surnom du Gaulonite (Antiq. 18, 4, 1. 20, 5, 2.), était de Gamala, ville fortifiée, au bord de la mer de Galilée, dans la basse Gaulonite. D'accord avec un certain Tsadok, il chercha à exciter les Juifs à la révolte, à propos d'un recensement ordonné par l'empereur Auguste, l'an 7 de l'ère chrétienne, trente-sept ans après la bataille d'Actiam, et les poussa à refuser de payer à un monarque terrestre un impôt qu'ils ne devaient qu'au Roi des rois. Il périt dans un engagement ; la sédition fut apaisée, mais ses adhérents n'en continuèrent pas moins leur œuvre de soulèvement, et, plus tard, sous les ordres de Manahem, son fils, et d'Eléazar, ils reprirent les armes, allumèrent dans toute la Judée le feu de la révolte, et furent cause de l'arrivée des Romains et de la ruine de tout le pays. Gamaliel, en disant que ce parti avait été dissipé, était mal informé, ou bien il a voulu parler seulement d'une dispersion momentanée.

3°|Judas, propriétaire de la maison où logei Paul à Damas ; inconnu. Act 9,11.

4° Judas Barsabas. v. Barsabas 2°.

JUDE, surnommé Lebbée (mon cœur), ou Thaddée (ma poitrine), l'un des douze, était frère de^Jacques, de Joses et de Simon, fils de Cléopas et de Marie. Les Evangiles ne nous rapportent de lui qu'un seul fait, la demande qu'il adressa au Sauveur pendant le dernier souper : « Seigneur, d'où vient que tu te déclareras à nous, et non pas au monde P » Jean 14, 22. Sa vie et sa carrière apostolique sont peu connues ; les traditions des différentes Eglises varient à son sujet. Selon les pères de l'Eglise grecque, il a prêché l'Evangile dans l'Idumée, l'Arabie, la Syrie et la Mésopotamie, et il est mort tranquillement à Edesse. Les auteurs syriens le font mourir martyr à Bayrouth, en Syrie. Selon les écrivains de l'Eglise latine, il a pénétré en Perse, où il a succombé aux fureurs des mages. Eusèbe raconte qu'un des soixante-dix disciples, nommé Thaddée, a été envoyé par Thomas à Edesse, et la tradition syriaque parle également d'un Addée ou Thaddée qui aurait évangélisé la Mésopotamie, mais qui ne serait pas un des douze. Enfin, selon Hégésippe, les petits-fils de Jude auraient été dénoncés à Do-mitien comme sectateurs de Christ, prétendu roi d'Orient et descendant de David; mais l'empereur, voyant leur pauvreté et leur profonde ignorance politique, les aurait fait relâcher aussitôt.

Epître de Jude. L'auteur lui-même se nomme Jude, serviteur de Jésus-Christ, frère de Jacques. Plusieurs opinions ont été mises en avant ; cependant celle qui regarde Jude l'apôtre comme auteur de l'épître l'emporte de beaucoup sur les autres, soit par l'unanimité de la tradition, soit par l'autorité des théologiens nombreux qui l'ont adoptée, soit enfin, par l'évidence des arguments qui militent en sa faveur. 1° De Wette, et d'autres avec lui, voient l'auteur de l'épître dans Jude frère de Jacques et fils d'Àlphée, mais différent de celui qui est surnommé Lebbée ou Thaddée, lequel Jude selon eux devrait être entendu comme fils et non frère de Jacques, Luc 6, 16. Act 1, 13. Jude Lebbée serait ainsi fils d'un Jacques inconnu. Us s'appuient, entre autres, sur ce que l'auteur de l'épître ne prend pas le nom d'apôtre. Mais on peut répondre que l'auteur était libre de se désigner comme il l'entendait, et qu'il a omis son titre d'apôtre comme Paul,Phil. 1,1. Il a préféré se faire connaître quant à son autorité par le titre de serviteur de Christ, et quant à son individualité par celui de frère de Jacques.—2° Wel-ker a pris Jude pour Judas Barsabas, et Schott, lisant Judas Bar-Zébed, ferait de ce Jude un troisième fils de Zèbédée, opinion qui n'a pas même besoin d'être réfutée.— 3°Grotius, qui voudrait voir dans cette épître une allusion à la secte gnos-tique des carpocratiens, l'attribue à un Jude évêque de Jérusalem sous Adrien, vers 130, et retranche en conséquence les mots « frère de Jacques,» contre l'autorité de tous les manuscrits.—4° Enfin, l'opinion à laquelle nous n'hésitons pas à nous ranger, attribue l'épître à l'apôtre Jude surnommé Lebbée et Thaddée, frère de l'apôtre Jacques et fils d'Alphée. Jacques, l'èvêque de Jérusalem, si connu et si estimé dans l'antiquité chrétienne, était le seul qui eût assez de célébrité pour que Jude pût se servir de son nom comme d'une recommandation suffisante, et si Jude n'y a pas ajouté le nom de son père, c'est qu'Alphée était peu connu et qu'il n'a servi à distinguer les deux Jacques qu'aussi longtemps que le fils de Zèbédée était encore en vie.

On ne sait rien de positif sur l'époque de la composition de cette épître, non plus que sur l'occasion qui lui a donné naissance. 11 y a un rapport intime entre cette lettre et la seconde de Pierre, et nous en reparlerons à propos de cette dernière. 11 est probable que c'est aux mêmes lecteurs que l'une et l'autre ont été adressées ; elles ont toutes deux le même but, celui qui est indiqué versets 3 et 4. Un mal immense s'était glissé dans les Eglises, mal semé par les faux chrétiens qui poussèrent les doctrines de l'Evangile, et notamment celles de Paul sur la lin de la loi et sur la liberté, jusqu'à la licence dans la conduite, en propageant des idées qui plus tard se développèrent dans le gnosticisme, et selon lesquelles le Dieu des Juifs, organisateur de l'univers et objet du culte judaïque, aurait été un esprit subordonné et même malin ; c'était en un mot une satire faite sur la doctrine de Paul. Pierre et Jude, qui habitèrent longtemps l'Orient, virent le mal et s'y opposèrent. Jude commença, et Pierre vint plus tard le soutenir de son autorité plus connue sinon plus réelle, en développant la lettre de Jude à laquelle il a emprunté plusieurs détails. — L'authenticité de cette épître n'a jamais été sérieusement contestée ; elle ne fut reçue dans le canon syrien qu'au quatrième siècle, et Eusèbe raconte qu'elle était reçue par les uns et lue dans les Eglises, mais que d'autres ne la reconnaissaient pas, non plus que celle de Jacques et les deux dernières de Jean. On comprend facilement qu'une si petite lettre, qui de plus n'était pas de la main de Paul, et qui fut adressée à des Eglises de l'Asie Mineure, ne soit pas entrée en circulation aussi vite que d'autres. Jérôme nous apprend encore, une raison qui a pu retarder la reconnaissance publique de cette épitre ; c'est une de ces raisons dogma-tiques que les pères ont souvent préférées aux raisons critiques, le fait de la citation du livre d'Enoch ; mais v. cet article. Au reste, les témoignages en faveur de l'authenticité remontent assez haut, et sont assez nombreux pour l'établir d'une manière complète. Clément d'Alexandrie, Origène et Tertullien la citent en propres termes; un autre passage d'Origène est douteux.

JUDÉE. Ce nom tout à fait général, et qui signifie proprement terre des Juifs, fut employé d'abord pour désigner tout le territoire occupé par la nation juive, la Palestine, la terre de Canaan. C'est surtout immédiatement après le retour de l'exil que cette dénomination prévalut, peut-être parce que la plupart de ceux qui revinrent appartenaient à l'ancien royaume de Juda. Il désigna plus tard, d'une manière déjà plus spéciale, la partie sud de la Palestine, les territoires de Juda et de Benjamin, avec une portion de ceux de Dan et de Siméon. La division par tribus ayant disparu depuis l'exil, cette contrée à laquelle fut ajoutée encore la partie méridionale des montagnes d'Ephraïm, et peut-être la plaine entière de Saron, ne fut plus connue que sous le nom de province de Judée, Mat 2,1.3,1.4, 25. Luc 1, 65. 2, 4. Jean 3, 22. Act 2, 9. Après la mort d'Hérode le Grand, la Judée reprit une espèce d'existence politique ; elle fut donnée en partage par Auguste à Archélaiis, de même que la Sa-marie et l'Idumée, et la province redevint royaume ; mais cet état dura peu ; Archélaiis ayant été banni, la Judée fut annexée à la Syrie, et gouvernée par des procurateurs. Agrippa, petit-fils d'Hérode, la ramena de nouveau sous son sceptre, mais à sa mort elle fut rendue à la Syrie, à laquelle elle ne cessa plus d'appartenir jusqu'à ce qu'arriva la catastrophe qui mit fin, pour un temps, à l'existence du peuple juif comme peuple.

La Judée était une contrée presque tout entière montagneuse par la réunion des montagnes d'Ephraïm et de Juda qui parcouraient le pays du nord au midi, et qui ne s'abaissaient que vers l'ouest; mais ces montagnes étaient pour la plupart d'une grande fertilité, et de riches vallées portaient en diverses directions l'abondance de leurs productions et la fraîcheur de leurs eaux.

JUGE, jugement, justice. De même que dans chaque maison c'était le chef de la famille qui exerçait l'autorité su-prême à tous égards, et particulièrement pour les différends qui pouvaient s'élever entre les membres de la famille, de même dans les tribus, les villes et les bourgades, ce droit appartenait, en matière de jugements civils et criminels ordinaires, à des juges laïques, les mêmes qui sont nommés anciens, Deu 21, 2. 3. i. 6. 16, 18. Ex. 48,13-26. Les sacrificateurs formaient une instance supérieure, sans cependant qu'on puisse les comparer à une cour d'appel, puisque c'était aux juges et non pas aux parties de décider si l'affaire serait portée plus loin, Deu 17, 8.49,17. C'était aux portes delà ville que les juges tenaient leurs audiences, et comme les Israélites étaient tous laboureurs, sortant le matin pour se rendre aux champs et revenant le soir, le lieu choisi pour rendre la justice était ainsi le plus public qu'il put y avoir, et les passants pouvaient s'arrêter, écouter ou déposer. Deu 21, 19. 22, 15. 25, 7. Ruth. 4, 1. Prov. 22, 22. Am. 5, ta. Zach. 8, 46. Le plaignant et l'accusé comparaissaient en personne; ce dernier était en habit de deuil et se tenait à la gauche, Zach. 3,1. 3. Les débats étaient simples et oraux, les jugements sommaires; l'accusé était de fait presque toujours jugé par ses pairs, propriétaires et laboureurs comme lui, et le tribunal était un jury sans doute peu versé dans la loi, mais bien instruit des faits. La justice paraît avoir été entièrement gratuite. La preuve légale résultait du témoignage, mais il fallait au moins deux témoins; cet ordre est trois fois répété dans le Pentateuque, Nomb. 35, 30. Deu 17, 6. 4 9, 15.; à défaut de témoins suffisants, le serment était déféré au prévenu, Ex. 22,11. cf. Hébr. 6, 16. Le sort paraît avoir été introduit plus tard pour la décision de questions trop difficiles à trancher, Prov. 16, 33. 48, 18. ; mais la torture, cette invention du paganisme inconnue aux Hébreux, ne pénétra dans leur vie publique que sous les Hérodes. Dans les cas où la loi ne parlait pas assez clairement, on consultait l'Éternel, Lév. 24, 12. Nomb. 45, 34. 35. On voit par ces détails que les formes étaient toutes en faveur de l'accusé.

A l'époque des juges, ce furent ces hauts magistrats qui décidèrent des questions difficiles, Jug. 4, 5. Samuel paraît avoir établi une espèce de jurisprudence plus régulière, faisant lui-même, et plus tard faisant faire par ses fils le tour du pays pour l'administration de la justice, 1 Sam. 7, 16. 8, 1. Après lui, les rois furent juges, et non seulement en dernière instance, mais encore juges ordinaires, et abordables à tous ceux de leurs sujets qui venaient pour demander justice; on peut en voir des exemples 2 Sam. 15, 2. 6. cf. 2 Chr. 19, 4. 5. 1 Rois 3,16. 2 Sam. 14, 4. 2 Rois 15, 5. Cependant on trouve sous David et sous Salo-mon rétablissement de tribunaux spé-ciaux pour les différentes localités, cf. 1 Chr. 23, 4. 26, 29. Lors de la réorganisation judiciaire qui fut faite par Josa-phat, ces tribunaux eurent à régler tout ensemble les cas de conscience et les procès civils ou criminels; ils se composaient des sacrificateurs, ou d'un seul, réunis au juge du lieu ou bien au chef du pays; dans ce dernier cas c'était la cour suprême, 2 Chr. 19, 8. 11.

Les prophètes et le livre des Proverbes montrent que de nombreuses plaintes s'élevaient sur la partialité des juges, et l'on peut se convaincre que, malgré les sévères défenses de la loi à cet égard, Deu 1, 17., la vénalité des juges était presque générale, comme aussi les faux témoins étaient à l'ordre du jour, Es. 1,23.5,23. 40, 1. .Jér. 22, 3. Am. 4, 1. 5, 12. 6, 12. Mich. 3, 11. 7, 3. Zach. 7, 9. Prov. 18, 10. 24,23. 6, 19. 12, 17. 19, o. 24, 28. cf. déjà 1 Sam. 8, 3.

Les1 rois avaient le droit, principalement en matières criminelles, de prononcer des sentences de leur chef; c'était une justice de cabinet, comme on la rencontre encore de nos jours en Orient, 4 Sam. 22, 16. 2 Sam. 4, 9.1 Rois 22, 26. 2 Sam. 12, 5. 2 Rois 24, 46. Jér. 36, 26.

Selon l'usage oriental l'exécution suivait de près la sentence ; lorsque la peine de mort avait été prononcée et qu'il n'y avait pas un vengeur du sang, c'étaient d'ordinaire les spectateurs qui remplissaient cet office en lapidant la victime. Les témoins, plus solennellement responsables, devaient jeter la première pierre. Deu 17,7. 5.25, 2. Jér. 37, 45.

Des contrats de vente se faisaient aussi assez souvent en public, Jér. 32,4 0.44., devant les juges ou simplement devant des témoins, Jér. 32, 25. Ruth. 4, 9., et ce genre de notoriété pouvait remplacer pour eux les preuves écrites.

Pendant l'exil et après le retour, un ordre semblable de judicature continua de subsister, et Esdras institua des juges de chaque ville pour la nouvelle colonie. Esd. 7,25. 10, 14.

Sur tout ce sujet, «. Cellérier, Esprit de la Lég. mos. 1, 183. sq. II, 80. sq.

JUGES. C'est le nom particulier que l'Ecriture donne à ces hommes extraordinaires qui furent suscités entre les jours de Josué et ceux de l'établissement de la royauté, charge en dehors des autres, fonction passagère, et toujours une manifestation spéciale de la bonté de l'Eternel. Le peuple n'était pas encore maître du territoire, il n'en occupait aucune portion d'une manière complète et définitive; partout les Cananéens étaient mêlés aux Israélites qui, dans le commencement, avaient voulu, contre l'ordre de Dieu, ménager leurs ennemis, et qui ne purent plus les déposséder entièrement lorsqu'ils le voulurent. Ce premier désavantage politique était encore aug-menté par le penchant naturel de ce peuple au sensualisme religieux; et bien loin de songer toujours à repousser les premiers habitants du pays, ceux d'Israël se laissèrent entraîner plus d'une fois à partager leur idolâtrie : c'est ainsi qu'avant la venue de Jephthé, nous les voyons adorer les uns après les autres, ou tous à la fois, les dieux de Syrie, de Sidon, de Moab, des Hammonites et des Philistins. N'ayant ainsi ni territoire assuré, ni principes religieux auxquels ils s'attachassent d'une manière sûre et ferme, ils étaient sans force; et l'histoire sainte nous montre, dans ces six différentes servitudes, autant de châtiments pour autant de chutes religieuses. Ces servitudes consistaient parfois en de simples tributs à payer, Jug. 3,13.; d'autres fois c'étaient une série d'hostilités, des atteintes continuelles à la propriété, l'enlèvement des moissons ou des troupeaux, Jug. 6,3.11-, avec quelques intervalles de repos. Lorsque la détresse était arrivée à son comble, les Juifs idolâtres retournaient à Jéhovah qui, seul, pouvait les délivrer ; c'est alors que Dieu leur envoyait des juges revêtus de toute puissance, qui chassaient l'ennemi et ramenaient le peuple au sanctuaire. Quinze juges gouvernèrent ainsi le pays avec des interrègnes plus ou moins longs; ce sont :

Hothniel, 1405 av. C. Jug. 3, 9.

Ehud, 1325 — — 3,15.

Samgar, 4305 — — 3,34.

Débora, 1283 — — 4, 4.

Gédéon, 1243 — —6,12.

Abimélec, 4236 — — 9, 4.

Tolah, 1233 — — 10, 1.

Jaïr, 1210 — — 10, 3.

Jephthé, 1188 — — 11, 1.

Ibtsan, 1182 — — 12, 8.

Elon, 1173 — — 12,11.

Habdon, 1163 — — 12,13.

Samson, 1157 — —13,24.

Héli, 1137 — 1 Sam. 1, 9.

Samuel, 1116 — —7,13.

On peut voir chacun de ces articles en son lieu et place, ainsi que mon Histoire des Juges. Quant à la chronologie, on ne peut la déterminer ; en additionnant toutes les dates qui se trouvent dans le livre des Juges, on arrive pour cette seule période, au chiffre de 462 ans qui ne peut s'accorder avec celui de 480 indiqué, 1 Rois 6, 1., pour toute la période qui s'est écoulée depuis la sortie d'Egypte jusqu'à la construction du temple. On a donc été obligé de réduire ce chiffre, ce que l'on a essayé de faire, soit en regardant comme simultanées des administrations qui semblent indiquées comme successives (par exemple Samgar et Débora), soit en confondant la durée des servitudes avec celle du gouvernement du juge qui a précédé ou suivi (par exemple Ehud et l'oppression de Jabin ; l'oppression des Philistins et les judicatures de Jephthé, Ibtsan, Elon, Habdon et Samson). Ces calculs sont ar-bitraires; plusieurs peuvent se justifier, tous ne le peuvent pas, et l'on ne doit les regarder que comme des essais. Ussérius, au lieu de 462 ans, n'en compte que 389, Bonnechose 389, Archinard 331, etc.

Livre des Juges. L'auteur en est inconnu, mais comme le livre tire toute son autorité du Dieu qui l'a fait écrire, et non de celui qui l'a écrit, cela importe peu. Les Hébreux l'attribuent généralement à Samuel sur la fin de sa vie, et c'est l'opinion la plus probable, celle qui peut le mieux se soutenir en l'absence de preuves positives. Des passages tels que Jug. 17, 6. 18, 1. 21, 25., montrent que la royauté existait déjà en Israël, et que cependant le royaume n'était pas encore divisé. D'un autre côté, la brusque interruption du livre au chap. 16, après le récit des exploits et de la mort de Samson, lorsque la vie d'Héli et de Samuel eussent dû le compléter, semble indiquer que ces deux hommes vivaient encore, qu'ils appartenaient à l'histoire contemporaine, et que l'auteur n'a pas jugé convenable, peut-être pas même nécessaire, de raconter des faits connus de tous. Cette lacune surprend d'autant plus que le commencement du livre, dont les deux premiers chapitres sont l'introduction, annonce un plan suivi, l'histoire complète d'une époque ; or Héli, et surtout Samuel, ne pouvaient être passés sous silence dans un tra-vail de ce genre : un contemporain seul a pu n'en rien dire, ou faire sur ces deux judicatures un travail à part, et les raisons intérieures sont toutes en faveur de l'opinion que nous avons exprimée. D'autres ont attribué ce travail à Esdras, d'autres enfin supposent que chaque juge a écrit l'histoire de son administration, et qu'un compilateur quelconque en a fait le livre canonique des Juges. — Les trois premiers chapitres sont un exposé de l'état du pays après la mort de Josué, de l'humiliation des Israélites d'abord, puis de leur première idolâtrie; les chap. 4-16 renferment l'histoire des six oppressions et des six délivrances ; c'est l'histoire des juges proprement dite ; les chap. 17-21 contiennent enfin deux épisodes de la profonde immoralité qui s'était introduite en Israël après la mort de Josué, et qui amena sur ce malheureux pays tant de calamités, et la destruction presque totale de la tribu de Benjamin.

Pour plus de détails, v. Haevernick, Ein-leit. II, p. 67—114, et le commentaire de Studer, publié à Berne, 183o, rationaliste, mais bon comme travail critique et philologique.

JUIFS. C'est le nom que prirent collectivement tous les enfants d'Israël sans distinction de tribu après le retour de l'exil ; il dérive soit de Juda la première des tribus, soit du royaume de Juda, auquel Ja plupart de ceux qui revinrent dans leur patrie avaient appartenu : des raisons politiques contribuèrent peut-être aussi à ce que les membres des tribus d'Israël se confondissent par un même nom avec ceux de Juda, parce que c'est à ces derniers seuls que le texte de l'édit de Cyrus semblait rendre la liberté. Le nom de Juifs ou Judéens a dès lors pré-valu.

L'histoire des Juifs est ainsi, en quelque sorte, une continuation de celle des Hébreux ou des Israélites, mais comme elle ne fait pas partie de l'Ecriture sainte, nous n'avons pas à nous en occuper, ici. L'exil de Babylone fut le dernier châtiment des Juifs idolâtres; dès lors, instruits par l'expérience, ils ne coururent plus après les dieux étrangers, mais lorsque le Messie vint, ils le rejetèrent, ne voulant rien d'un roi faible, méprisé, dont la gloire n'était pas de ce monde : ils le crucifièrent, et le sang du Juste retomba sur eux ; la ruine de Jérusalem, la dévastation du pays, la dispersion du peuple vengèrent ce forfait inouï, et les païens sont entrés dans l'alliance de grâce qu'avait rejetée la race élue, la nation sainte. Quel est maintenant l'avenir de ce peuple longtemps si béni ? Cet avenir est sans doute plus brillant encore que son passé, car les dons et la vocation de Dieu sont sans repentance ; ils seront entés de nouveau ; on peut prévoir leur retour à Jérusalem, leur conversion, et par eux l'évangélisationetla conversion du monde, « car si leur chute a été la richesse du monde, et leur diminution la richesse des gentils, combien plus le sera leur abondance. » — Les temps actuels sont significatifs à cet égard, et sans entrer dans des développements que le travail actuel ne comporte pas, je me borne à renvoyer au discours de M. Gaussen, « Les Juifs enfin évangélisés, et bientôt rétablis, » Genève, 4 843, ainsi qu'au Voyage en Orient de MM. Keith, Black, Bonar et Mac'Cheyne, ayant pour titre : « Les Juifs d'Europe et de Palestine. »

JULE, centenier de la cohorte appelée Auguste (l'empereur avait donné son nom à une cohorte dans chaque légion). C'est à lui que Paul et quelques autres prisonniers furent remis pour être conduits en Italie, Act 27. Il témoigna toujours beaucoup de déférence pour l'apôtre, et lui permit d'aller voir ses amis à Sidon. Plus tard, la navigation étant devenue dangereuse, Paul conseilla au centenier de s'arrêter à Beaux-Ports, mais celui-ci, plus confiant en l'expérience du pilote, crut pouvoir continuer sa route. Cependant une forte tempête ne tarda pas à menacer le navire, la vie de tous ceux qui le montaient fut exposée à un danger imminent, et les conseils de Paul furent recherchés et suivis. Jule rendit alors à Paul service pour service, et lui sauva la vie ainsi qu'à tous ses compagnons de captivité, que les soldats voulaient mettre à mort pour les empêcher de s'évader; à Rome enfin, il remit les prisonniers au préfet du prétoire, et paraît avoir obtenu pour Paul un traitement plus doux que celui de la prison, et la liberté de demeurer à part.

JULIE, Rom. 16, 15., femme disciple de Rome, l'épouse de Philologue selon Origène, du reste inconnue. Quelques-uns même pensent que Julie ou plutôt Julias était un homme.

JUNIAS, Rom. 16, 7., ou peut-être Junie, serait, dans ce dernier cas, la sœur d'Andronique, ou sa femme : c'est le sentiment de Chrysostome, de Théophylacte, et d'autres; elle était parente de saint Paul. Le nom d'apôtre que Junias partage avec Andronique a fait croire que c'était un homme. Incertain.

JUPITER, v. Caldéens. Cette divinité bien connue des Grecs et des Romains, n'a été connue des Juifs sous ce nom qu'après l'exil quand Antiochus Epiphanès voulut les contraindre d'adorer Jupiter Olympien à Jérusalem, et Jupiter l'Hospitalier à Guérizim, 2 Macc. 6, 2. A l'époque des apôtres, Barnabas fut pris pour Jupiter en même temps que Paul pour Mercure, et on voulut leur offrir des sacrifices dans le temple de Jupiter qui était à Lystre, Act 14, 12. 13. Des taureaux couronnés sont désignés dans ce passage comme victimes, cf. Iliad. 2, 402. Mneid. 3, 21. 9, 627.

JUSTE. 1° v. Barsabas. — 2° Juste, chrétien d'entre les gentils, logea Paul à Corinthe lorsque celui - ci eut quitté Aquila pour se tourner des Juifs vers les païens. D'anciens manuscrits portent qu'il s'appelait Tite Juste, d'où Chrysostome et Grotius ont cru que c'était le même que Tite à qui Paul a écrit; mais c'est une opinion peu probable. — 3° Jésus appelé Juste, honorablement mentionné par saint Paul parmi le petit nombre de ceux qui, Juifs de naissance, travaillaient activement avec l'apôtre à l'évangélisation des Juifs, Col. 4, 11. Du reste inconnu.

JUSTICE, v. Juge.

JUTTA, ville sacerdotale de la tribu de Juda, située sur un plateau à peu de distance d'Hébron, Jos. 15, 33. 21, 16. Non loin de là se trouvait une des sources du Bésor. Quelques-uns pensent que c'est la ville indiquée Luc 1, 39., et ils lisent la ville de Juda ou Jutta, au lieu de une ville, trouvant cette dernière expression trop vague pour Luc qui aime à préciser.

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